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Témoignages. VIDÉO. "Je veux que ça s’arrête. Ça va finir en drame ". Immersion dans le monde silencieux des violences conjugales

Publié le Écrit par Michelle Ruan
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Aux services des urgences de Saint Malo et de Dinan, une unité spéciale accueille les victimes de violences conjugales où les soignants assument pleinement leur devoir de signalement. Dans son film "S'il sait que je suis là, il me tue", la réalisatrice Brigitte Chevet nous emmène au cœur de ces services, à l'écoute d'une parole qui reste encore trop souvent sous silence.

Sur les murs des couloirs de l'hôpital de Saint-Malo, un affichage contre les violences conjugales informe les patients de l'existence de consultations gratuites et anonymes.

Très souvent, les victimes se présentent aux urgences, pour une entorse, un hématome, un poignet cassé, une douleur, mais avant de confier l'origine de leurs blessures, le chemin est long et périlleux.

Aux urgences de Saint-Malo, les soignants sont formés pour poser les bonnes questions et ils assument pleinement leur devoir de signalement auprès des forces de l'ordre. 

Ne rien faire, en tant que soignant, c'est cautionner la violence.

Jean-François Bouet, médecin urgentiste

Consultations gratuites et anonymes

Aujourd’hui, toute une équipe travaille coude à coude dans le service du docteur urgentiste Jean-François Bouet, créé depuis 2015. Consultations gratuites et anonymes y sont proposées pour libérer la parole. Empathie et patience sont au rendez-vous.

Enrayer la spirale de l'emprise et des coups

L'équipe, formée de médecins, d'infirmiers, de membres du service social, des urgences et du service pédopsychiatrie, pose de façon systématique la question aux patientes qu’ils rencontrent.

"Pour ne pas cautionner la violence, il faut libérer la parole et signaler le mal", témoigne Jean-François Bouet. 

Comment détecter, si ce n'est par la parole ? Aujourd'hui, on sait soigner les cancers, mais pas les coups.

Docteur urgentiste Jean-François Bouet

Provoquer le déclic

Pour le docteur urgentiste Jean-François Bouet, il y a un moment dans la conversation à saisir et à ne pas manquer. Celui dans lequel le dialogue permet le déclic "non, ce n'est pas normal ce que je vis". Après "le déclic", le temps vient de poser " la limite" insiste le médecin. "Ces femmes sont dans un tel désarroi, qu'il faut beaucoup de patience, d'empathie"

Une culpabilité constante

Sous influence et souvent intoxiquée par des paroles abaissantes, la victime ne peut plus juger ce qui est normal ou ce qui ne l'est pas.

J'ai peur d'être la méchante si je l'accuse

Aveux d'une femme victime de violences

Humiliée, jalousée, agrippée, claquée, surveillée, poussée, la victime, au fil du temps et face à la honte, perd tous ses moyens. L'emprise est de plus en plus forte. Fréquemment, les promesses et les pardons suivent, mais l'engrenage est en marche.

Il ne le reconnaîtra jamais. Il dira que je suis tombée par ce que j'ai loupé la marche.

Une victime, poussée dans l'escalier

Face à l'emprise, une réelle impuissance.

" Au sein de la population générale, 10 % des femmes ont été, sont ou seront concernées par ces violences. À peine un pour cent des consultants est du genre masculin, car il est peut-être encore plus difficile pour eux de venir en parler" précise Brigitte Chevet, la réalisatrice du film.

Ce sont elles qui sont frappées, mais ce sont elles qui ont honte.

Brigitte Chevet, réalisatrice.

" Contrairement au préjugé tenace, les femmes victimes de violences conjugales ne sont pas systématiquement des "cas sociaux ". Mais souvent, les bourreaux les plus aisés font plus attention à ne pas laisser de traces compromettantes, mais ce milieu n'est pas épargné" ajoute-t-elle.

Pour les victimes de violences conjugales,"la situation n'est pas tenable, mais l'impuissance est réelle". Pour le médecin, Jean-François Bouet, "il faut mettre une limite et le plus tôt possible". 

Et il précise "Il faut que ce soit un tiers extérieur qui impose cette limite, les forces de l'ordre sont là pour ça, sinon, c'est le drame".

Ayez confiance. Vous vivez une terreur. Je dois faire un signalement au parquet. Il vous faut une protection, sinon, ça va finir en drame.

Jean-François Bouet

L'accueil, l'écoute, le diagnostic et le signalement sont un enchaînement d'actions à mener, indispensables à l'arrêt final des traumatismes subis. 

" S'il sait que je suis là, il me tue", un documentaire qui dévoile le cheminement de soignants, face à cet immense problème de santé publique que sont les violences conjugales, est à voir dès à présent sur francetv.fr et jeudi 23 novembre, à 22 h 50, sur France 3 Bretagne.

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