Action symbolique devant une concession de voitures allemandes à Vannes ce lundi matin. Une cinquantaine d’agriculteurs s’est rassemblée, en compagnie d’une vache, pour dire non au traité du Mercosur, l’accord de libre-échange avec l’Amérique latine.
Elle se demandait bien pourquoi on l’avait sorti du pré... Pas le moindre brin d'herbe à brouter pour cette vache sur le parking asphalté de la concession automobile Audi de Vannes. Cette petite promenade matinale avait surtout pour but d’interpeller.
"C’est bagnoles contre bétail", résume Marie-Eve Taillecours, l’une des porte-paroles de la Confédération Paysanne dans le Morbihan. Avec elle, une cinquantaine de paysans et paysannes venue de plusieurs départements bretons.
L’accord entre l’Union européenne et les pays du Mercosur sont surtout marqué par un échange entre le bétail de l’Amérique latine et l’export de voitures allemandes par exemple. C'est le symbole de notre mobilisation.
Marie-Eve Taillecours, porte-parole de la Confédération Paysanne dans le Morbihan
Ces accords de libre-échange, sur la table depuis 25 ans, entre les pays de l’Union européenne et les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Bolivie, Paraguay et Uruguay) vont en effet être de nouveau discutés lors du sommet du G20 qui s’ouvre ce lundi au Brésil.
Un traité qui prévoit la suppression des droits de douane, notamment sur les importations de viandes. En échange, les exportations européennes seront facilitées. Les Allemands attendent beaucoup de ce traité pour relancer leur industrie automobile.
"À quoi ça sert de bien produire si c’est pour, à côté, vendre des produits dégueulasses ?"
La Confédération Paysanne est opposée depuis toujours à ce traité et elle est l’une des seules organisations syndicales à se mobiliser aujourd’hui (tous les syndicats sont cependant opposés à cet accord). Selon la Conf, 20 000 emplois et 400 fermes seraient menacées en France.
"C’est complètement con, en fait, s’emporte Félice Branger, éleveur laitier à Rostrenen dans les Côtes-d’Armor. À quoi ça sert de bien produire si c’est pour, à côté, vendre des produits dégueulasses ?"
Les agriculteurs dénoncent en effet le manque de contrôle des produits issus du Mercosur et la trop grande différence de qualité entre la viande française et la viande d’Amérique latine, notamment sur la question des normes environnementales et sur l’usage des pesticides.
"Ces accords aident à la volatilité des prix, martèle Marie-Eve Taillecours. Nous, nous voulons des prix garantis, des prix planchers, nous voulons un revenu qui permet aux paysans et aux paysannes de se nourrir, de payer leurs charges et d’avoir une vraie protection sociale."
Amplification de la déforestation
Dans un contexte général d’élections professionnelles syndicales qui doivent se dérouler fin janvier, la Confédération Paysanne pointe du doigt la FNSEA. "Certains ont un double discours et profitent par ailleurs d’accords de libre-échange". La Conf prône la souveraineté alimentaire aussi bien pour les paysans français que pour ceux d’Amérique du Sud.
Dominique Raulo est éleveur laitier à Muzillac dans le Morbihan. Pour lui, cet accord ne profitera qu’aux actionnaires et à un type d’agriculture ultra-productiviste qui se fera au détriment de l’environnement.
Qui dit accord du Mercosur, dit agrandissement des fermes en Amérique du Sud. Elles sont déjà très grandes et contribuent à la déforestation et à l’expulsion des petits paysans là bas.
Dominique Raulo, éleveur laitier à Muzillac
Un non-sens social, sanitaire et environnemental pour la Confédération Paysanne qui prévoit d’autres rassemblements la semaine prochaine dans le Finistère, l’Ille-et-Vilaine et les Côtes-d’Armor. Dans les semaines qui viennent, les mobilisations d'agriculteurs pourraient d'ailleurs s'intensifier, avec en ligne de mire de plus larges revendications.