Julien est enseignant et vit dans le Morbihan. Une maladie lui impose un traitement immunosuppresseur. Pour lui, toujours pas de déconfinement, un isolement qui impacte aussi sa compagne et ses enfants.
"Lorsque l’on appris qu’il y avait un premier cluster dans le Morbihan, c’était la veille de la reprise scolaire" se souvient Julien. Cet instituteur retourne malgré tout travailler, pendant une semaine. Atteint d’une maladie inflammatoire, il prend un traitement composé d'immunosuppresseurs. "C’était les débuts de l’épidémie, personne ne savait grand chose, pas même les médecins. J’ai quand même contacté la médecine du travail pour savoir quelle conduite adopter. J’avais un élève qui revenait de l’Oise, un autre cluster." Julien est finalement rappelé, avec la consigne de passer en télétravail, sept jours avant le confinement obligatoire.
Une vie de famille encore en vase clos
Depuis il ne sort pas de chez lui, sauf pour les courses nécessaires, aller à la pharmacie, ou prendre un peu l’air à la plage. "Les différents médecins qui me suivent me disent qu’on n’a pas réellement de recul. Dans le doute il faut continuer à me protéger. Le fait d’avoir un traitement comme le mien augmente les risques." Son médecin généraliste lui a rédigé une attestation qui préconise le confinement prolongé.
Cette situation a des conséquences sur la structure familiale. La compagne de Julien exerce une profession paramédicale, en libéral. "Elle a repris dans des conditions plus restrictives que ses collègues. Elle impose le port du masque à ses patients, désinfecte après chaque passage donc prend moins de personnes." Ses filles ne sont pas retournées à l’école et ne vont pas jouer dans la rue avec leurs copains. "On limite les interactions."
Sortir ou non, une prise de décision difficile
"C’est compliqué, il y a trop d’informations contradictoires. Est-ce qu’il va falloir attendre un traitement. Cela me paraît long." Julien vit au jour le jour. "La façon dont le déconfinement est géré ne me rassure pas, je constate un relâchement ", dit-il à propos du port du masque. Il faudrait selon lui le rendre obligatoire, dans tous les lieux où il y a du passage. Il regrette aussi la politique de tests de la France, réservée uniquement aux personnes symptomatiques.
La problématique des personnes vulnérables est relayée sur les réseaux sociaux,. L’avocate et militante Elisa Rojas, elle-même concernée, regrette que la vie normale et la reprise ne se calent sur la vie de personnes valides et/ou non malade. Les aménagements autorisés pendant le confinement se voient moins justifiés explique-t-elle. Elle confie : "Sur le plan personnel, je dois faire la balance entre ma santé physique (tous ces précautions pour rien et choper le virus au grattage ?) et ma santé mentale qui va rapidement se retrouver en danger si je reste confinée plus longtemps."
Ma vie sociale et ma liberté (comme celles de nombreuses personnes malades et/ou handicapées) étaient déjà limitées à la base. Avec ce virus, elles n’ont fait que se rétrécir davantage. Jusqu’à quand ? Jusqu’à quel point ? Je ne sais pas et c’est sans doute le plus insupportable.
— Elisa ROJAS (@elisarojasm) June 4, 2020
Julien ne sait pas encore comment s'organiseront les vacances cet été. "Je suis l’évolution avec méfiance" conclut-il.