Airbnb : pourquoi les nouvelles règles de location de courte durée ne font pas l'unanimité

Désormais, les particuliers qui mettent leur logement en location sur la plateforme Airbnb devront s'enregistrer au préalable dans leur mairie. C'est un des durcissements de règles en cours dans cinq communes du Golfe du Morbihan, dont Vannes, Arradon et Larmor-Baden. Une manière de limiter le nombre de meublés touristiques qui ne fait pas que des heureux.

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"Pour moi ce n'est pas l'idéal." Kathia Berthet, gérante d'une société de conciergerie à Vannes ne s'en cache pas : le durcissement des règles administratives et fiscales ne va pas dans son sens.

Chiffon en main, elle contrôle la propreté d'un logement vannetais avant l'arrivée de nouveaux locataires de courte durée. "Moi je ne pense pas que c'est une mesure qui ne va pas beaucoup peser car les propriétaires de locations de courte durée ne sont pas si nombreux, analyse-t-elle sceptique. Moins de 5% des logements sont en location courte durée ici, ce n'est pas ça qui fait la pénurie de logements."

Réponse à la pénurie de logements

Tel est pourtant le but recherché de ce changement de réglementation. Dans le Golfe du Morbihan, six communes ont décidé de durcir les règles de mise en location : Larmi-Baden, Arradon, Vannes, Séné, Sarzeau et Saint-Gildas-de-Ruys.

Obligation de déclarer son bien en mairie, durée limitée de mise en location... Le but, selon les municipalités, est de durcir leur politique face à l'explosion du nombre de logements en location saisonnière. Une situation qui aggrave la pénurie de logements et fait s'envoler les prix des loyers.

"Mon but c'est vraiment de loger les Vannetais, de la plus petite enfance jusqu'à la fin de leur vie, réplique Hortence Le Pape, adjointe maire de Vannes à l'urbanisme et conseillère communautaire logement et habitat. C'est également de loger les étudiants. On a une population étudiante qui se renouvelle chaque année et qui va frôler les 10.000 étudiants à l'horizon 2030."

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Nouvelles règles pour locations touristiques sur Airbnb. Réactions en pays vannetais où la mesure ne fait pas que des heureux. ©R. Bonnant, Y. Etienne et Pierre-Yves Cheval.

Comment loger tous ces habitants ? Des logements existent, mais ils sont souvent réservés aux touristes. Les propriétaires ayant jusqu'à présent plus d'intérêts financiers à opter pour des locations de courte durée.

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Finie la niche fiscale

Le sujet fait l'objet de débats depuis plusieurs mois. Portée par la députée finistérienne Rennaissance Annaig Le Meur et le député socialiste des Pyrénées-Atlantique Iñaki Echaniz, une proposition de loi transpartisane a été adoptée par l'Assemblée nationale en janvier 2024.

Elle vise à réguler le nombre de locations touristiques en alignant la fiscalité des locations de longues et de courtes durées. Jusqu'à présent, les locations en meublé de tourisme bénéficiaient d'un abattement fiscal de 71 à 50%, alors que les locations à l'année n'avaient droit qu'à 30% d'abattement.

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Le même taux de 30% devait donc s'appliquer à toutes les locations, mais les sénateurs ont amendé ce texte au printemps, en réintroduisant un abattement plus favorable de 50% pour les meublés "classés", pour "inciter au classement", parfois coûteux, de ces logements touristiques.

Finalement le Sénat a adopté à l'unanimité le mardi 21 mai la proposition de loi amendée destinée à lutter contre la crise du logement par la régulation des locations de tourisme. La niche fiscale "Airbnb" devrait donc disparaître.

Passé le contretemps de l'été (et l'annulation par le Conseil d'Etat du paragraphe permettant aux loueurs de logement en Airbnb de continuer à bénéficier d'une niche fiscale rabotée par erreur par le gouvernement dans la loi de finances pour 2024), voilà donc que les règles se durcissent ici et là.

Enregistrement obligatoire

La plateforme Airbnb obtempère, bon gré malgré. Dans un communiqué publié ce mercredi 21 août 2024, elle argumente en utilisant les termes de "développement responsable".

"Airbnb annonce le lancement sur sa plateforme de l’enregistrement obligatoire à Vannes, Arradon et Larmor-Baden pour favoriser un développement responsable des locations de courte durée." Et la plateforme de détailler les étapes

  • Tous les hôtes créant une nouvelle annonce d’hébergement entier loué en courte durée sur Airbnb doivent désormais obtenir et afficher un numéro d’enregistrement sur leur annonce pour accueillir des voyageurs.
  • Dans un délai de trois mois, l’enregistrement obligatoire sera étendu à l’ensemble des annonces déjà existantes d’hébergements entiers loués en courte durée dans ces villes et les annonces de meublés de tourisme n’ayant pas obtenu un numéro d’enregistrement seront supprimées.

Sur son site internet, Airbnb liste les communes concernées par l'enregistrement obligatoire et/ou la limitation automatique à 120 nuits pour les résidences principales sur Airbnb. On en compte hui en Bretagne, c'est beaucoup moins que dans d'autres régions...

Une ville dans les Côtes-d'Armor : Dinan, une seule aussi dans le Finistère : Quimper, Saint-Malo en Ille-et-Vilaine, et dans le Morbihan : Lorient et Port-Louis en plus de celles déjà citées ci-dessus.

Évolution obligée des pratiques

Une décision qui ne fait pas les affaires de propriétaires qui ont investi pour louer sur des courtes durées. C'est le cas de Julien Le Texier. Lui a souscrit un prêt bancaire sur 20 ans il y a un an et demi, pour financer l'achat d'un appartement dans le centre de Vannes. Un studio uniquement destiné à la location type Airbnb. Le voilà aujourd'hui contraint par la municipalité de limiter ses locations de courte durée à 6 ans maximum.

"Le fait qu'on puisse rebasculer au bout de six ans sur une location classique, forcément pour moi, ça va être beaucoup moins intéressant, déplore-t-il. Je risque de ne pas m'y retrouver et de ne pas amortir le logement par rapport à l'emprunt et aux travaux effectués."

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Seule concession de la ville de Vannes : aucune contrainte ne pèsera sur les propriétaires de meublés Airbnb l'été, s'ils louent à des étudiants pendant l'année scolaire. Une condition, qui devrait pousser les propriétaires à changer de stratégie, et aider les communes du littoral à se projeter.

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