"Ma voix, mon choix", quel est ce collectif qui veut rendre l'avortement "accessible et sans danger" en Europe

Dans cette campagne pour les élections européennes, une autre campagne a vu le jour ce 24 avril 2024. Objectif : récolter un million de signatures pour le droit à l'avortement dans l'Union européenne qui reste très inégal d'un pays à l'autre. Alaska, jeune bretonne de 22 ans, a rejoint cette initiative citoyenne.

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Alaska a été parmi les toutes premières signataires de cette Initiative Citoyenne Européenne (ICE). "Nous sommes toutes concernées par cette question, explique la jeune bretonne de 22 ans. À tout moment, notre sœur, notre amie, ou nous-même, nous pouvons être amenées à partir dans un autre pays et avoir besoin de recourir à une interruption volontaire de grossesse. Comment faire si c’est interdit, trop compliqué ou trop cher ?"

Aujourd’hui, en Europe, plus de 20 millions de femmes n’ont pas accès à l’avortement. "J’aurais pu naître dans un autre pays, poursuit Alaska, par solidarité, par sororité, je voulais signer." 

À LIRE : Le nombre d'IVG est en hausse en Bretagne, mais l’avortement est-il accessible à toutes les femmes ?

Un électrochoc

L’inscription en France du droit à l’avortement dans la Constitution a fait réagir les féministes de toute l’Europe. "En discutant avec des Italiennes, des Hongroises, des Polonaises, témoigne la journaliste et militante Alice Coffin, nous nous sommes aperçues que la situation des femmes s’aggravait de façon catastrophique."

On a vu que tout pouvait basculer en quelques heures

Alice Coffin

"Si on a inscrit l'IVG dans notre Constitution, c’est parce qu'on a vu que tout pouvait basculer en quelques heures. Aux Etats-Unis, en Argentine, et plus près de nous, en Europe. On sait que tout est très fragile."

Et la militante commence une longue liste : "toutes les 9 minutes, dans le monde, une femme meurt des suites d’un avortement clandestin. Cela représente 60.000 décès par an."

En Pologne, l’avortement est interdit sauf en cas de viol, d’inceste ou de danger pour la vie. Des conditions si drastiques que seules 26 interruptions volontaires de grossesse ont eu lieu en 2019.

À Malte, l’avortement n’est autorisé que si la vie de la femme qui porte l’enfant est en danger et que le fœtus n’est pas viable.

En Hongrie, l’interruption volontaire de grossesse est autorisée, mais avant l’acte, les femmes doivent écouter le cœur du fœtus.

"En Italie, l’avortement est autorisé depuis 1978. Mais le mois dernier, rappelle Alice Coffin, la première ministre Giorgia Meloni a autorisé les associations anti-avortement à entrer dans les centres d’IVG. Et puis, décrit-elle, la moitié des médecins refusent en utilisant la "clause de conscience" : dans certaines régions, le chiffre monte à 97% de refus."

"On ne peut pas laisser 20 millions de femmes comme cela et fermer les yeux" s’indigne-t-elle.  

L’Europe pour protéger 

Les associations féministes de l’Union ont décidé d’agir en lançant une Initiative Citoyenne européenne. Si elles rassemblent un million de signatures (dans au moins sept pays de l’Union), le Parlement devra étudier leur proposition.

"En matière d'avortement, les pays sont maîtres chez eux, explique Alice Coffin, c'est à eux d'autoriser ou de refuser, mais l’Union Européenne a vocation à intervenir lorsqu’il s’agit de protéger la santé humaine."

"Ma voix, mon choix" propose de créer une solution pour que les femmes qui ne peuvent avorter dans leur pays puissent se rendre dans un autre État membre de l'UE où les centres médicaux leur seraient accessibles. Le texte prévoit aussi d’assurer la prise en charge financière des soins et déplacements.

"Nous demandons à la Commission européenne de soumettre une proposition de soutien financier aux États membres qui seraient en mesure de procéder à des interruptions de grossesse en toute sécurité, conformément à leur droit national, pour toute personne en Europe qui n'a toujours pas accès à un avortement sûr et légal" précise le texte de l’ICE. 

"Cette solution pourrait prendre la forme d'un mécanisme d'adhésion ouvert aux États membres sur une base volontaire. Ceux qui adhéreraient recevraient alors un soutien financier de l’UE pour compenser le poids de cet effort de solidarité.

Notre initiative ne vise pas à harmoniser ni à interférer avec les lois et réglementations des États membres, mais relève plutôt de la compétence d'appui de l’UE, conformément aux règles établies par les traités européens."  

En un mois, l’initiative a rassemblé plus de 56.000 signatures en France, plus de 350.000 en Europe. "Ma voix mon choix" dispose d’un an (jusqu’au 25 avril 2025) pour récolter le million de signatures mais il faut aller vite, précisent les militantes féministes.

"Moyens du bord"

Cette initiative citoyenne n’arrive pas au moment des élections européennes complètement par hasard. "On voit bien un peu partout en Europe l’avancée des mouvements d’extrême droite, ce vent mauvais, selon les mots d'Emmanuel Macron, avec des idées conservatrices, souligne Alice Coffin. Alors, ces élections sont importantes. Si on arrive au million de signatures mais qu’on a voté contre des gens qui refuseront le texte, tout cela n’aura servi à rien."

"Aujourd’hui, décrit Alice Coffin, les Polonaises qui ont les moyens vont se faire avorter en Slovénie. Les autres font avec les moyens du bord, et c’est parfois la mort ! C’est la situation des femmes françaises d’avant la Loi de 1974. On ne peut pas accepter que des femmes meurent ainsi en 2024."

 

Des foulards verts au cou des statues

Ce 1er juin, Alaska et les militantes de toute la France sont invitées à aller accrocher des foulards verts, symbole international de la lutte pour le droit à l’avortement, au cou des statues des villes.

"Cette aventure m’a ouvert les yeux, témoigne la jeune bretonne. La France a inscrit le droit à l’avortement dans la Constitution mais tout n’est pas rose. Dans certaines régions, il y a tellement peu de places de rendez-vous, que les femmes sont obligées d’attendre au risque de dépasser les délais légaux, dans certains endroits, il y a parfois tellement de kilomètres à parcourir que les femmes abandonnent."

"Et même dans les grandes villes, c’est compliqué, poursuit-elle. À Marseille, par exemple, les femmes en situation de handicap ont des difficultés pour avoir accès à l’avortement parce qu’il n’y a qu’un seul gynécologue équipé de matériel pour les accueillir."

"Il y a encore beaucoup de choses à faire" conclut la jeune femme. Tant de choses qu’elle a décidé d’arrêter de travailler quelque temps pour militer pour la cause des femmes.

Pour savoir quelles sont les 38 listes en lice pour le scrutin européen du 9 juin, CLIQUEZ ICI 

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