Le parquet général de Lyon renonce à se pourvoir en cassation. Vincenzo Vecchi, lourdement condamné en Italie, pour des violences lors du G8 de Gênes en 2001, ne sera pas remis à son pays natal par la justice française. "Un immense soulagement" pour le militant altermondialiste italien, qui vit en Bretagne.
"C'est un immense soulagement, la reconnaissance d'un combat légitime mené depuis quatre ans", a réagi Maxime Tessier, l'un des avocats de l'Italien, réfugié à Rochefort-en-Terre, dans le Morbihan depuis 2010, après sa condamnation à 12 ans et demi de prison. La peine avait ensuite été réduite à dix ans.
La Cour d'Appel de Lyon avait refusé l'extradition du militant
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon avait ouvert la voie, ce vendredi 24 mars, à cette extinction de procédure, en refusant de remettre Vincenzo Vecchi, 49 ans, aux autorités judiciaires italiennes. Mais l'avenir du militant restait entre les mains du parquet général, qui, finalement, "ne régularisera aucun pourvoi en cassation", selon la décision judiciaire communiquée mardi.
Dans son arrêt vendredi, la chambre avait considéré notamment que remettre à son pays natal Vincenzo Vecchi, visé par un mandat d'arrêt européen depuis 2016, "constituerait une atteinte disproportionnée au droit au respect à (sa) vie privée et familiale". Ce mandat émis à la demande de l'Italie avait conduit à son interpellation en 2019 dans le Morbihan, où il vit.
Insertion professionnelle et familiale et "enracinement" à Rochefort-en-Terre
Dans leurs plaidoiries lors de l'audience du 24 février, ses avocats avaient longuement insisté sur son insertion professionnelle et familiale, mais aussi sur son "enracinement" dans son village de Rochefort-en-Terre (Morbihan), où il travaille comme charpentier, associé d'une coopérative de construction de maisons à ossature bois.
À l'audience, le représentant du ministère public avait, lui, réclamé la remise du militant à son pays, s'appuyant sur une décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), intervenue en mars 2022, trois ans après les premières procédures lancées en France.
Les charges de "dévastation et pillage", sans équivalent en France
Les cours d'appel de Rennes en 2019 et d'Angers en novembre 2020 avaient rejeté la demande de Rome, celle d'Angers justifiant en substance sa décision par le fait que les charges de "dévastation et pillage", créées sous le régime du dirigeant fasciste Mussolini, n'avaient pas d'équivalent en France.
Mais après un nouvel appel du parquet général, la Cour de cassation avait pris avis auprès de la CJUE. Celle-ci avait indiqué qu'il n'était pas exigé de "correspondance parfaite" et que la France ne pouvait pas s'opposer à l'extradition. L'affaire avait alors été renvoyée à la cour d'appel de Lyon.
Prescription définitive des faits en 2032 en Italie
Ce n'est toutefois pas sur ce volet du dossier, largement critiqué par le comité de soutien du militant et par des personnalités comme Annie Ernault, prix Nobel de littérature, ou l'ancienne juge d'instruction Eva Joly, que la chambre a refusé vendredi de faire droit aux autorités italiennes : elle a en effet estimé que la "condition de double incrimination" était "satisfaite" pour une partie des faits visés.
Les avocats de M. Vecchi n'ont d'ailleurs pas manqué mardi de faire part de leur "inquiétude" sur le fait "qu'une loi illibérale puisse s'appliquer en France".
S'il n'est pas exécuté en France, le mandat d'arrêt européen visant Vincenzo Vecchi reste applicable sur l'ensemble du territoire Schengen, jusqu'à la prescription définitive des faits en Italie, en 2032, soulignent également ses avocats.
Violentes manifestations contre le G8 à Gênes en 2001
Comparaissant libre à l'audience, en présence de nombreux soutiens, le militant italien faisait partie des dix activistes condamnés en Italie, souvent lourdement, après les violentes manifestations contre le G8 de Gênes. Durement réprimées, ces manifestations s'étaient soldées par la mort d'un jeune homme tué par la police.
Coïncidence du calendrier : la décision du parquet général de Lyon intervient alors que la Cour de cassation a confirmé mardi le refus d'extrader dix anciens militants d'extrême gauche italiens, installés en France depuis plusieurs décennies. Rome les réclame pour des faits qualifiés de terrorisme commis lors des "années de plomb".
(Avec l'AFP)