Publié le Écrit par Antoinette Grall

Les abandons d'animaux n'ont jamais été aussi élevés. Ils sont en augmentation de 7% sur les 6 premiers mois de l'année. Parmi eux, beaucoup de chiens. Le boom mondial des adoptions durant la Covid et l'inflation actuelle en sont les principales causes. Alors comment bien le choisir, l'aimer, l'éduquer, le comprendre et tout faire pour ne surtout pas l'abandonner ? Conseils et témoignages.

Le chiffre est éloquent : 300 000 animaux ont été abandonnés en France en 2022, soit un animal toutes les deux minutes, et la tendance s'est accélérée sur les premiers mois de 2023. Une situation alarmante sans précédent qui est une sorte de retour de boomerang après un boom mondial des adoptions durant les différents confinements. Aujourd'hui, alors que la vie économique a repris son cours, beaucoup de gens ont repris le chemin du bureau et sont moins disponibles. La crise et la forte inflation de ces derniers mois ont probablement aussi accéléré le phénomène.

Voilà qui rappelle oh combien prendre un animal est un choix qui doit être mûrement réfléchi et qui engage, pour 10 ou 15 ans.

Alors comment bien le choisir, l'aimer, l'éduquer, le comprendre et tout faire pour ne surtout pas l'abandonner ? Conseils et témoignages.

Bien choisir le chien qui vous correspond

Il existe environ 350 races de chiens différentes. Trouver celle qui correspondra au mieux à votre mode de vie, à votre personnalité sera une clé majeure de la réussite de votre adoption.

À chacun ses critères. Les propriétaires de chiens que nous avons rencontrés n'ont pas hésité à prendre des conseils auprès de vétérinaires ou d'éleveurs.

Nous voulions un chien qui ressemble le plus à un chien, une race qui ne soit pas à la mode pour sortir des sentiers battus.

Thierry Guiho

"Nous voulions un animal au pedigree le plus proche possible du loup. Notre choix s'est arrêté sur un Berger picard, l'une des plus anciennes races de chien appartenant au groupe des bergers. Une bête rustique aux poils rêches, avec une petite bouille qui nous plaisait. Elle nous rappelait le chien de la belle et du clochard. Cet animal méconnu, polyvalent, joyeux et affectueux cochait tous les traits de caractère que nous recherchions", confie Thierry Guiho.

Pour la famille Laloux, l'objectif était différent : 

"Nous voulions un chien dissuasif et non agressif, un bon gardien. Les conseils d'un vétérinaire ont éclairé notre choix. Un Cane Corso a intégré la famille."

Eric Laloux

Pour la famille Bourhis, il fallait un chien adapté à la vie citadine :

"Je souhaitais plus de nature dans ma vie. J'avais peur qu'une race de chien trop sportive ne soit pas adaptée à mon style de vie en appartement. Après de nombreux échanges avec une éleveuse, j'ai choisi un Berger australien. L'éleveuse a préféré me vendre le chiot sachant que je sortirais obligatoirement avec lui pour le promener. Par expérience, elle sait que certaines personnes ayant un jardin ne font parfois que leur ouvrir la porte pour aller prendre l'air. Cet aller-retour n'équivaut pas à une promenade", relate Sophie Bourhis.

Évaluer la quantité et la qualité des sorties

Sortir son chien est primordial pour son bien-être. Sara Suède, éducatrice canine à l'association Woof'in conseille au minimum trois sorties par jour, de trente minutes à une heure, et environ trois petites sorties "pipi".

Quand un chien arrive dans votre vie, c'est un gros changement, il faut s'organiser.

Sophie Bourhis

"Mes séances d'éducation canine m'ont appris qu'il valait mieux une balade de 30 minutes avec une longe tant que le chien n'a pas un bon rappel plutôt qu'une balade d'une heure en laisse, car il a besoin de liberté, de se dépenser physiquement, de rencontrer d’autres chiens, de flairer et d'explorer librement son environnement. Aussi, les jours où vous n'allez pas bien, écourtez votre promenade parce que le chien ressent la tristesse du maître et ne profite pas vraiment de sa sortie. Ces points sont essentiels pour son équilibre mental.", souligne Sophie Bourhis. L’équipement ne doit pas être choisi à la légère. Il aura un réel impact sur la façon dont votre chien vivra sa balade. 

Quand il arrive dans un foyer, un chien devient quasiment un nouveau membre de la famille. Il modifie les équilibres. Des habitudes se crééent. C'est ce que nous confie Laureline, propriétaire d'un Berger australien.

Je travaille sur quatre jours et sors mon chien à la frontale tous les matins, qu'il pleuve ou qu'il vente avant d'aller travailler, c'est quelque chose qui me plaît.

Laureline Renno

"Je savais que mon chien aurait un gros impact sur mon mode de vie. Heureusement que j'avais anticipé tout cela," souligne Laureline Renno, propriétaire d'un Berger australien.

Selon Sara Suède, présidente de l'association Woof'in, l'incapacité de se projeter est un facteur d'abandon. "Demandez-vous si dans trois mois, vous serez toujours en mesure de promener votre chien", suggère-t-elle. En France, 49 276 chiens étaient abandonnés en 2022.

Éduquer son chien

Selon Sara Suède, chaque sortie est le terrain de jeu idéal pour l'apprentissage des ordres de base. Il nécessite du temps et de la patience. L' "assis", le "coucher", le "pas bouger", le "stop" peuvent être acquis assez rapidement selon l'âge et le tempérament du chien. À cela s'ajoute par étapes la désensibilisation à l'environnement (bruits, humains et autres chiens). Toutes ces parenthèses de jeu, ces exercices de discipline rendent le chien moins peureux et plus à l'écoute de son maître. 

Le travail est énorme, si tu y arrives, ton chien est équilibré, pas destructeur, la complicité, la relation avec l'animal est géniale.

Sophie Bourhis

Sa capacité à s'émerveiller est un antidote au désenchantement, avec lui, je vis l'instant présent. Je savoure de rares moments luxueux de paix et de contemplation.

Sylvie Guiho

Pour Sara Suède, éducatrice canine, l’éducation du chien passe souvent par l’éducation du maître. Elle pense que chaque propriétaire devrait être titulaire de l'ACACED (attestation de connaissances pour les animaux de compagnie d'espèces domestiques). Cette formation rapide et condensée donne un maximum d'information sur le comportement du chien. Pour elle, "le comprendre aide à ne pas l'abandonner tant ses bienfaits sont nombreux", confie-t-elle.

Le spécisme, ennemi du chien

“Pour un amour réciproque, un respect mutuel, pour que chacun trouve sa place, il faut mettre à bas toutes ces idées reçues de dominance, de supériorité de l'homme sur l'animal" explique Sara Suède. "Éduquer par la frayeur, se revendiquer chef de meute interespèce n'a aucun sens". 

Je conseille l'éducation positive, de la fermeté, de la douceur et de la compréhension. Vous maintenez l'autorité sur votre chien tout en vous mettant à sa place.

Sara Suède

"Respecter l'animal est la première chose que j'ai apprise à mes enfants. Il y a des règles à suivre, par exemple, il ne faut jamais le caresser lorsqu'il mange. Il faut le laisser tranquille. Ce comportement génère un respect mutuel", souligne Eric Laloux.

Le chien, c'est une école de la vie, il apprend aux enfants la patience et le goût de l'effort, avec lui rien ne s'obtient en un claquement de doigts, l'éducation demande du temps.

Agnès Laloux

Si tu considères et traites bien ton chien, il va te donner le meilleur de lui-même. Il faut être sincère, ne pas vouloir le dominer, fixer des règles du jeu et remplir ce cadre d'amour.

Sylvie Guiho

Connaître le coût de son chien

Le contexte économique 2023 a beaucoup joué sur l'abandon des chiens. Subvenir à tous leurs besoins est de plus en plus difficile. Selon l'étude Nielson, QJ, l'inflation des aliments pour chien aurait augmenté de 18% sur un an. À l'alimentation s'ajoutent les frais de vétérinaires.

Nous constatons un effet début de mois où nous travaillons beaucoup et fin de mois où le travail est très calme.

Vincent Delubac, vétérinaire

D'autres frais ponctuels peuvent venir gonfler la facture, un chien malade nécessitant des soins onéreux, ou des problèmes de comportements imposant des frais d'éducation canine. Toilettages, accessoires, gardes peuvent venir compléter l'addition. Il est difficile de donner un chiffre exact pour le coût annuel d'un chien. Toutefois, Sara Suède, présidente de l'association Woof'in estime le budget annuel à 600 € pour un petit chien sans problème de santé particulière, et à plus de 1.600 € pour un grand chien. Pour réduire l'impact financier des grosses dépenses vétérinaires, les assurances santé pour chien se sont développées et peuvent être une option intéressante (environ 200 € de cotisation annuelle).

Stériliser son chien

Une portée non désirée et vous voilà avec 4 à 8 chiots dont vous ne savez que faire. La stérilisation règle ce problème. La SPA aide les propriétaires d'animaux sous certaines conditions de ressource pour les frais de stérilisation, de vaccination, d'identification, d'alimentation et frais de vétérinaires. Pour cela, il vous faut remplir le formulaire en ligne sur le site de la SPA.

Faire garder son chien, une problématique, mais des solutions

Pour Charlotte Le Gall, cheffe d'équipe du refuge S.P.A de Rennes, " La situation pour faire garder son animal de compagnie est compliquée tant les refuges sont saturés. Les abandons ne cessent d'augmenter et sont moins saisonniers qu'avant, ils s'étalent sur toute l'année." Cette année, nous remarquons un détachement évident de l'homme par rapport à son animal. Nous avons des cas où les gens abandonnent leur chien début juillet et demandent à en réadopter en septembre", poursuit Sara Suède.
Associations, refuges, pensions canines, pet-sitter à domicile, sites d'échanges gratuits d'animaux comme homesisting.fr ou solutions de garde pour une durée déterminée par des seniors, ani-sniors.fr ou par toutes autres personnes empruntemontoutou.com, sites qui proposent des hébergements et des activités comme emmenetonchien.com ou sites qui proposent la garde de son son chien en échange de sa maison comme lieu de vacances… De nombreuses formules plus ou moins onéreuses sont à votre disposition. 

Si je dois m'absenter sans pouvoir le pendre, j'anticipe et le fais garder par un éleveur en qui j'ai toute confiance.

Sophie Bourhis

"Ponctuellement, j'ai la chance d'avoir une sœur qui me dépanne, elle vient vivre à mon domicile pendant notre absence et garde notre chien", confie Eric Laloux. "J'ai déposé Nooka en pension après plusieurs visites de chenils. Certains garantissent un nombre de sorties, ils t'envoient une photo et un petit commentaire, c'est bien agréable de recevoir ce genre de nouvelles lorsque vous êtes séparés. Pour les modes de garde plus courts comme un week-end, ma voisine m'aide avec plaisir, elle récupère mon chien à domicile pour partir en promenade et le nourrit", raconte Laureline Renno.

Privilégier ses vacances avec son chien

Pour les plus investis, les vacances s'envisagent avec son animal.

Je choisis mes vacances avec la contrainte du chien, j'ai envie de partager avec lui des moments où je n'ai plus le travail dans la tête.

Sophie Bourhis

"J’ai pris un chien pour faire de grandes balades, c'est ce que je recherche pendant mes congés, donc je l'amène avec moi" raconte Sophie Bourhis. Pour Agnès Laloux, "le chien a presque une place entière comme une personne supplémentaire dans la famille. C'est donc en toute logique qu'il participe au maximum aux vacances."  Et, pour Laureline Renno, c'était clair dès le départ, les vacances s'envisageraient aussi avec son chien au maximum. 

Abandonner son chien en lui laissant une seconde chance

Si vous souhaitez abandonner votre chien, une prise en charge associative est possible. L'association Woof'in vous propose par exemple de recueillir votre animal et de lui trouver une famille d'accueil. Cette solution de garde dure le temps de trouver de nouveaux propriétaires. Ces familles bénévoles signent un contat avec l'association, et s'engagent sur un temps déterminé pour chaque animal accepté. Pendant cette durée les animaux sont sous la responsabilité de l'association qui en assure aussi la charge financière. Sara Suède nous confie que beaucoup de familles d'accueil n'ont pas de vocation à l'adoption. Ces personnes prennent un animal parce que par exemple elles ne partent pas en vacances ou ne travaillent pas pendant une certaine période. Le grand intérêt pour le pensionnaire quand tout se passe bien est qu'il continue son éducation, parfois même la parfait et aussi ne se désociabilise pas.

Mon challenge est de trouver le bon animal pour la bonne famille d'accueil.

Sara Suède, présidente de l'association Woof'in

"Nous assurons aux animaux adoptés chez nous un suivi de base en éducation canine sur six mois, et venons au besoin chez les nouveaux propriétaires ayant besoin d'un ajustement", poursuit Sara Suède. Les refuges recherchent également des familles pour recevoir des animaux qui ne s'adaptent pas en collectivité ou d'autres au lourd passif qui demandent une attention particulière.

J'aime les animaux, j'aime l'idée de leur donner un nouveau départ, et comme je ne peux pas adopter un autre animal à plein temps, grâce à l'association, je compense ce manque par des "CDD d'adoption".

Émilie Froment, infirmière et bénévole en famille d'accueil

Quelques lois anti-abandon

L'adoption dans les refuges SPA est encadrée depuis ce début d'année. Un certificat d'engagement a été mis par le gouvernement. Il invite les personnes à réfléchir pendant sept jours avant l'adoption de l'animal. "Il est important que tous les membres du foyer viennent au refuge, les visites tissent un lien avec l'animal, la décision doit être collégiale", insiste Charlotte Le Gall, Cheffe d'équipe du refuge S.P.A de Rennes.

En 2024, l'achat en animalerie sera interdit.

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