A l'issue de ces 3 jours dans le département du Cher, le Premier ministre nous a accordé un entretien pour brosser les sujets qui préoccupent la France périphérique.
Dix-huit minutes d'entretien pour parler désertification médicale, attractivité des territoires, agriculture ou emploi. Nous avons abordé avec le Premier ministre, tous les sujets qui aujourd'hui, inquiètent les Français des campagnes notamment. Edouard Philippe n'a pas fait d'annonces particulières. Il s'est voulu rassurant, pédagogue mais "déterminé" à mener les réformes du gouvernement.
Inquiétude des agriculteurs
Durant ces 3 jours dans le Cher, Edouard Philippe a rencontré plusieurs agriculteurs. "Nous avons parlé des perspectives, cela a été instructif et précieux pour moi," a dit le Premier ministre. "Le Cher est une terre où l'agriculture est très diversifiée. Il y a la viticulture, la culture du triptyque blé/colza/orges. Diversifiée géographiquement aussi, où les gens du pays fort-sancerrois sont en difficultés car ils ne sont plus dans une zone agricole défavorisée. Je les ai tous écoutés. Ils occupent une place essentielle dans le système productif français. Ce qui m'a frappé, c'est leur envie d'expliquer leurs difficultés, avec passion mais loin des caricatures qu'on peut voir parfois. Je leur ai parlé du projet de loi du gouvernement pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole (présenté par Stéphane Travert le 31 janvier 2018 en Conseil des ministres.). Une loi qui reprend l'essentiel des états généraux de l'alimentation et qui doit nous permettre de renvoyer le plus possible la valeur ajoutée vers les producteurs et non vers les distributeurs comme c'est le cas aujourd'hui."Santé et ruralité
L'une des préoccupations majeures des Centrais comme des autres Français vivant dans un désert médical, avoir accès à des soins de qualité, avoir un médecin près de chez soi. Comment lutter contre ce fléau ? Depuis plusieurs années, les élus buttent sur la question. Edouard Philippe a eu l'occasion de visiter la maison pluridisciplinaire de Sancoins qu'il a qualifié de "remarquable".Pour le Premier ministre il n'y a pas une seule solution pour résoudre le problème de la désertification médicale. "Il ne faut pas croire que d'un coup de baguette magique, la maison de santé va tout résoudre. Il faut faire comme à Sancoins. Il faut partir d'un projet avec une équipe médicale qui a envie de se regrouper parce qu'elle y trouve un avantage pour pérenniser l'activité. Il faut que les élus les aident. Il ne faut plus créer de maisons de santé en disant que cela fera venir des médecins. Il faut que les médecins créent la maison de santé." "Ça a l'air simpliste mais l'expérience que j'ai en discutant avec les professionnels de santé, avec les élus, me confirme dans cette idée."
L'attactivité des territoires par rapport aux métropoles
Le sentiment d'abandon est fort chez une partie des Français qui vit à la campagne. Sentiment exacerbé par l'image d'Emmanuel Macron et son gouvernement régulièrement accusés de mener une "présidence des villes". Transport, écoles, centres-villes déserts, les sujets de préoccupations de la population sont divers.
"Pour favoriser l'attractivité des territoires ruraux, nous faisons le nécessaire pour que le très haut débit soit disponible partout en 2022. C'est nécessaire pour le confort de vie et l'économie locale".
Les centres-villes des villes moyennes complètement déserts, l'autre préoccupation de nombreux Français. Pour contrer cette fatalité et revitaliser les bourgs et centre-bourgs, le Premier ministre s'est félicité de la signature en sa présence du programme coeur de ville par Nicolas Sansu, maire PCF de Vierzon. "On attend beaucoup de ce plan Cœur de ville, en espérant que les moyens soient mis en œuvre" a expliqué Nicolas Sansu, au micro de Public Sénat. "Les villes petites et moyennes ont beaucoup souffert ces dernières années face aux métropoles. Concrètement, Vierzon veut trouver un nouveau souffle notamment en stimulant le retour des commerces en centre-ville ou en s’appropriant l’habitat privé devenu insalubre. Un projet ambitieux qui ne se réalisera « que si les services publics d’Etat sont maintenus » a insisté Nicolas Sansu, citant notamment les services hospitaliers et ferroviaires de la ville."
Les industries innovantes pas réservées aux grandes métropoles
Edouard Philippe a également parlé innovation pendant son séjour dans le Berry. Le meilleur moyen pour la France de gagner la bataille de l'emploi selon le chef du gouvernement. "Je ne parle pas d'innovation parce que c'est à la mode. J'en parle parce que c'est la frontière pour être plus fort." "Il est faux de penser que l'innovation est réservée pour les métropoles. J'ai été à Henrichemont pour en parler. Là-bas, j'ai notamment été bluffé par l’entreprise Génialis ! L'innovation c'est avant tout un état d'esprit, c'est la capacité à inventer et oser". "Il faut gagner la bataille de la compétence et l'intelligence," a-t-il ajouté.On ne gagnera pas la bataille du salaire le plus bas pour être compétitif, et ce n'est pas notre modèle. Mais la France peut être compétitive grâce à son intelligence collective, à son aménagement du territoire.
« J'assume la mesure sur les 80 km/h pour les routes secondaires »
C'est peu dire que la mesure n'est pas populaire dans l'opinion publique, mais Edouard Philippe reste inflexible. "Pendant 3 jours, j'ai sillonné le département du Cher à 80 km/h. Pourquoi j'ai pris cette mesure ? Certainement pas pour emmerder les ruraux ! Chaque année, il y a 3600 morts en France et 25 000 blessés graves. Ces chiffres sont plus bas qu'il y a 10 ans, mais sont plus hauts que l'année dernière. Je ne m'y résous pas. La vitesse n'est pas la principale cause des accidents mais c'est un facteur aggravant sur les routes secondaires."La mesure doit entrer en application dès le 1er juillet 2018. Il s'agit d'une expérimentation sur 2 ans. "Si à l'issue de l'expérience, je me suis trompé, je le reconnaîtrai volontiers . Je vous donne d'ailleurs rendez-vous ici même pour faire le bilan," a conclu le chef du gouvernement.