PORTRAIT. Philippe Desbrosses au secours des graines anciennes pour notre biodiversité

Dans le Loir-et-Cher, à Millançay, un conservatoire sauvegarde plus de 1800 variétés potagères anciennes. Son propriétaire, pionnier de l'agriculture biologique en Europe oeuvre depuis plus de 40 ans pour que vive la biodiversité et préserver notre sécurité alimentaire.

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Philippe Desbrosses est fils d’agriculteurs. En 1969, ses parents se convertissent à l’agriculture biologique. Un courant qui va se développer en France et dans de nombreux pays à partir des années 1980 auquel il va participer avec fougue et détermination. Il va créer et piloter plusieurs organisations nationales et internationales, et contribuer entre autres au développement et à la certification des Labels AB France et AB Europe. Il est l'un des pionniers de l’agriculture biologique en Europe.

Un conservatoire pour sauver les semences anciennes

En 1974, Philippe Desbrosses a l'idée de réintroduire les variétés rustiques pour lutter contre l'érosion de la biodiversité et la standardisation des semences produites par l'agro-industrie. Il crée alors dans la ferme familiale, un conservatoire de semences et de variétés anciennes pour sauvegarder et reproduire les variétés potagères rustiques, avec un seul but : préserver la biodiversité. Aujourd'hui, le Conservatoire des "Mille Variétés Anciennes" en recense plus de 1840.

Devant les dérives et les appropriations de notre patrimoine commun par l’industrie semencière, j’ai vite compris que nous allions à la catastrophe, ce qui est patent aujourd’hui et se traduit par une perte vertigineuse de la biodiversité sur la planète.

Philippe Desbrosses, agriculture, scientifique et écrivain

Et les chiffres ne mentent pas : en moins d’un siècle, 75 à 80 % de nos espèces végétales comestibles (chiffres de la F.A.O-ONU) ont disparu. "Et qui dit "érosion génétique" dit en même temps "érosion nutritionnelle et dégradation de la santé publique."

Lorsque Philippe Desbrosses commence à répertorier les variétés que cultivaient les anciens, il dresse un triste constat : certaines ont tout simplement disparu, remplacées par des variétés modernes qui certes poussent plus vite et en quantité mais au détriment de leurs valeurs nutritionnelles.

Philippe Desbrosses et ses équipes décident alors de choisir chaque année environ 120 nouvelles variétés. Certaines sont des graines qui lui ont été confiées par des familles de jardiniers que Philippe Desbrosses surnomme "Les trésors du conservatoire".

"Nous effectuons aussi avec l’URGC un travail de recherche et de reproduction des variétés locales de notre région, la Région Centre-Val de Loire. Avec eux, nous proposons chaque année à une vingtaine de maraîchers de la Région-Centre d’effectuer des essais avec des variétés anciennes locales. Ce domaine agricole qui se transmet de génération en génération au sein de la même famille depuis 100 ans est aussi un lieu d’étude et de démonstration de l’agriculture agroécologique".

Le conte de fées du potimarron

Philippe Desbrosses contribue aussi au succès du potimarron en France. Une des perles du Conservatoire des "Mille Variétés Anciennes" à Sainte-Marthe, le potimarron fait partie de la grande famille des cucurbitacées, originaire de l’Amérique Pré- Colombienne.

Il faut savoir que je dois beaucoup au potimarron, et qu’il a pris pour moi, l’allure d’un conte de fées."

Philippe Desbrosses

Les premiers spécimens lui sont transmis en 1973, pas d’Amérique latine mais de l’île Japonaise d’Hokkaïdo, au nord de la Mer de Chine : probablement après avoir transité par le Détroit de Béring, ainsi voyagent les plantes autour du monde au gré des climats et des migrations séculaires".
Avec toute son équipe de la ferme de Sainte-Marthe, il va extraire les graines : Et là, nouvelle intervention de la providence, en retirant à mains nues, les graines enserrées dans la pulpe soyeuse du potimarron, nous avions sur la peau de nos mains, la sensation très douce de les avoir traitées avec un élixir, où comme enduites de paraffine, et ce phénomène persistait pendant plusieurs jours après l’extraction".

Philippe Desbrosses va alors avec l’aide de scientifiques, se rendre compte de toutes les vertus de ce précieux légume : "S’en suivi une époustouflante série d’analyses, où le professeur m’appelait tous les 48 heures pour me faire part de son étonnement. Tu te rends compte, il y a tous les minéraux essentiels, dont la triade Phosphore, Calcium, Magnésium en quantité pondérale, mais aussi Potassium, fer, silicium, sodium…Tous les acides aminés essentiels, des graisses des sucres, des protéines, des amidons, et surtout la provitamine A (bêtacarotène) le double de ce que contiennent les carottes qui ont donné leur nom au Carotène aussi les vitamines B1-B2-B5-B6 – PP – D2 – la vitamine E ses acides gras insaturés, des anti-inflammatoires, du collagène, des squalènes végétaux, de la Papaïne enzyme protéolytique, bref comme l’ont déclaré plusieurs revues : LE POTIMARRON est une Mine d’Or de vitamines et d’oligo-éléments."
C’est donc à la suite de cette épopée que Philippe Desbrosses dépose le nom de potimarron à l’INPI en 1986. Et pendant vingt ans, avec son équipe il va sélectionner parmi des dizaines de souches multicolores celle qui rassemblait les caractères les plus intéressants  pour l’alimentation, la cosmétique : "le modèle qui s’est répandu dans toute l’Europe !"

► À retrouver dans l'émission "Des Fourmis dans les jambes" ce dimanche 1er octobre à 12h55 et à voir ou à revoir notre site de replay France.tv.

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