Dans une région où les plateformes logistiques poussent comme des champignons, cette décision de justice fait son petit effet. Le recours déposé par le collectif A bas le béton a été jugé recevable par le tribunal administratif d'Orléans. L'implantation du groupe Panhard à Mer est donc compromise, au grand regret des élus locaux qui misent sur ce secteur pour développer l'économie du territoire.
L'acquisition de près de 145 000 m2 sur la commune de Mer (Loir-et-Cher) par le groupe Panhard est bloquée pour dix-huit mois au moins. Spécialisé dans l'immobilier d'entreprise, ce promoteur prévoyait la création de deux plateformes logistiques - trois à terme - dans la zone d'activité des Cent Planches. Un recours déposé auprès du tribunal administratif conteste l’arrêté ICPE (Installation classée pour la protection de l’environnement) pris par la préfecture.
Depuis plusieurs années, la région Centre-Val de Loire, proche de Paris, est de plus en plus prisée par les entreprises du secteur. L'explosion du e-commerce notamment avec la crise sanitaire a renforcé la demande. A Mer, "la zone industrielle est plus grande que la ville elle-même", déplore Noé Petit, président du collectif d'opposants A bas le béton, à l'initiative du recours déposé au tribunal administratif. Dans cette commune de près de 6000 habitants, il existe déjà une dizaine de plateformes qui accueillent des entreprises comme Lapeyre, But, Colis Poste... "Ce site que nous défendons est l'un des derniers sans activité humaine. Ces entrepôts servent à stocker ici ce qui est fabriqué ailleurs", s'indigne le candidat de la Nupes aux élections législatives sur la troisième circonscription de Loir-et-Cher qui dénonce l'impact écologique du projet.
Une solution au chômage ?
Selon lui, sur la zone industrielle, "il y a des entrepôts vides à louer, d'autres à moitié remplis". "Nous avons des promoteurs qui achètent et construisent mais nous ne savons pas quelles entreprises s'installerons sur ces plateformes. Cela peut être Amazon ou d'autres", ajoute-t-il en avançant l'argument que la robotisation s'accélère à grands pas dans la logistique. Mais le directeur général du développement logistique du groupe Panhard, Jean-Michel Frammery, a réaffirmé le 10 juin dans La Nouvelle République, son engagement de créer 400 emplois sur les deux sites. Pourtant, pour Noé Petit, malgré les postes disponibles, "les gens ne veulent pas travailler dans ces plateformes", les conditions de travail sont trop précaires.
"Pour l'instant beaucoup de salariés souhaitent être embauchés en intérim, pas forcément être en CDI", justifie Pascal Huguet, président de la communauté de communes Beauce Val de Loire. Pourtant le chômage est bien là. "Nous avons 7 000 bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) sur le département, 17 000 demandeurs d'emploi et 2 000 emplois non pourvus", rappelle l'élu qui était suppléant sur la liste du candidat Pascal Brindeau (UDI-LR) qui ne s'est pas qualifié au second tour des élections législatives. " Je ne suis pas un amoureux de la logistique mais aujourd'hui nous sommes sur un projet déjà engagé depuis cinq ans dans lequel nous avons enregistré 5 millions d'euros de dépenses", précise-t-il en assurant qu'il souhaitait que ces plateformes contribuent à la relocalisation de productions. En mars 2021, la filiale française du groupe chinois Aosom e-commerce Inc ouvrait un entrepôt de près de 21 000 m2 dans la zone industrielle des Portes de Chambord.
"Tout le monde aurait considéré ces 500 emplois - que prévoit le projet à terme - comme bénis il y a vingt ans", tient à mettre en perspective Pascal Huguet. Pendant plus de soixante ans, Mer a vécu aux rythmes de l'usine de matelas et sommiers Epéda qui a fermé ses portes en 1999. "Il faut se souvenir de ce traumatisme. Nous sommes passés à l'époque d'un millier d'emplois à 0. La zone d'activité elle est partie du drame d'Epéda", rappelle-t-il.
Pour limiter les nuisances liées aux passages des camions, qui suscitent régulièrement l'animosité des riverains, l'élu propose qu'ils arrivent directement par la sortie d'autoroute A10. "Nous réfléchissons également à un port sec c'est-à-dire qu'une partie des containers de livraisons soit acheminée par train.", ajoute-t-il. L'aboutissement de ce projet dépendra de la décision du tribunal administratif.
Consulter l'avis de la mission régionale d’autorité environnementale Centre-Val de Loire sur le projet d’exploitation de deux bâtiments d’entreposage de la société Panhard à Mer publié le 2 mars 2021.