L'agence de l'eau Loire-Bretagne lance un appel à projets aux éleveurs du bassin versant de la Loire. Les volontaires peuvent candidater à des subventions pour installer des collecteurs de pluie, et ainsi économiser de l'argent, ménager les ressources en eau et se préparer au changement climatique.
Rivières asséchées, arrêtés d'interdiction de prélèvement d'eau dans les ruisseaux, sols craquelés par la chaleur… Le Centre-Val de Loire est en proie à un épisode de sécheresse, prophétisé dès le mois de mars, après un hiver particulièrement peu pluvieux. Encore une fois, il s'agit là d'une des conséquences du réchauffement climatique, des conséquences qui devraient se multiplier et s'intensifier dans les années à venir.
Cette actualité climatique semble avoir décidé les élus et le conseil d'administration de l'agence de l'eau Loire-Bretagne à rallonger une enveloppe déjà garnie de 2 millions d'euros, à destination d'éleveurs souhaitant faire des économie d'eau. Doublée fin juin, cette enveloppe contient désormais 4 millions, qui seront attribués à des agriculteurs de Bretagne, des Pays de la Loire, de Poitou-Charentes, du Limousin, d'Auvergne et du Centre-Val de Loire, soit le bassin versant de la Loire.
Économies et résilience
L'idée, c'est "qu'un éleveur qui consomme l'eau potable du réseau -soit pour nettoyer ses bâtiments, soit pour abreuver son bétail quand il n'y a plus d'eau dans le ruisseau- la substitue", explique Rémy Marques, de la délégation Centre-Val de Loire de l'agence de l'eau. En l'occurrence, avec de l'eau de pluie. Les 4 millions d'euros seront donc attribués à des éleveurs, jusqu'à 100 000 euros par projet, à hauteur de 40% des travaux, ou 45% pour les jeunes agriculteurs ou ceux installés depuis moins de cinq ans.
L'eau de pluie serait récupérée par les toits, puis stockée dans des grandes citernes. Histoire de conserver de l'eau disponible pour faire boire les vaches, y compris quand le préfet interdit de puiser dans le ruisseau parce qu'il fait trop chaud.
Car l'agence de l'eau Loire-Bretagne affirme vouloir accompagner les différentes agricultures du Centre-Val de Loire, en protégeant la ressource eau. En soutenant les prairies et les haies pour limiter l'usage et la libération de pesticides et d'engrais dans l'environnement, mais aussi en tentant de garder des éleveurs. "On en a de moins en moins, donc on essaie de les maintenir", assure Rémy Marques.
Et le meilleur moyen de les maintenir, c'est de les aider financièrement. Ainsi, l'argument massue pour entamer ces travaux promus par l'agence de l'eau, c'est les économies réalisables : moins d'eau pompée dans le réseau d'eau potable, c'est forcément des coûts en moins.
En cas de pénurie d'eau potable
Dans l'autre sens, ce sont aussi des économies pour le service, qui "préfère envoyer de l'eau potable aux humains plutôt qu'aux vaches". D'autant que Rémy Marques estime les pertes d'eau, entre sa captation dans les nappes et son arrivée au robinet, à 20 à 40% selon la zone de la région. Autrement dit, "pour 8 litres arrivés, 10 sont envoyés".
Et puis, il faut bien envisager l'avenir :
Les agriculteurs sont toujours censés pouvoir utiliser l'eau potable. Mais si demain, à cause du réchauffement climatique, on n'a plus assez d'eau pour tout le monde, c'est les vaches qui partent en premier.
Rémy Marques, délégation Centre-Val de Loire au sein de l'agence de l'eau Loire-Bretagne
Avec une ressource eau de plus en plus demandée dans les prochaines années, il est donc d'autant plus urgent d'entreprendre de telles démarches d'adaptation aux conséquences du changement climatique.
Ainsi, en 2020, l'agence avait déjà accompagné une trentaine d'exploitations agricoles cultivant hors-sol. La majorité se situaient en Bretagne, et deux en Centre-Val de Loire (une à Bonnée et l'autre à Saint-Cyr-en-Val dans le Loiret). Entre récupération de l'eau de pluie et de l'eau de drainage, 550 000 mètres cubes d'eau, soit autant de tonnes, avaient été substituées. Les agriculteurs ont avant tout réalisé des économies sur leurs forages, moins nombreux, mais ont aussi quasi totalement stoppé leurs recours au réseau d'eau potable. Un appel à projets similaire a été reconduit cette année, pour deux millions d'euros, cette fois à destination des agriculteurs sous serre sans la contrainte hors-sol, permettant d'inclure l'agriculture biologique dans la manœuvre.
Reste que venir en aide chaque année à une trentaine d'agriculteurs sur toute la zone de compétence de l'agence de l'eau Loire-Bretagne, qui compte "des milliers et des milliers d'agriculteurs", peut sembler dérisoire. Mais pour l'agence, il s'agit de faire avec ses moyens, qui ne sont pas forcément extensibles, mais aussi de "cibler l'endroit où c'est important, où on a des nappes polluées, où les ruisseaux sont souvent asséchés", note Rémy Marques. Ce dernier réalise bien que ses quelques millions pour installer des citernes pèsent peu "face à la Pac, on ne joue pas dans la même cours". Une politique agricole commune qui ne va "pas forcément" prendre en compte les enjeux de l'eau. "C'est notre travail d'appuyer sur les instances pour ne pas oublier l'eau."
Ouvert jusqu'au 31 octobre, l'appel aux projets n'a pour l'instant récolté aucune candidature. L'agence de l'eau espère voir des dossiers arriver à l'automne, après les récoltes et les comptes.