Réduction des pesticides, augmentation de la taxe sur le diesel agricole, contrainte de la transition écologique sur leur activité, le tout saupoudré d’un "agribashing" latent, les agriculteurs de la région saturent. Beaucoup n’arrivant plus à vivre de leur métier.
La visite de Marc Fesneau, Ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, samedi dernier dans le Cher n’a pas suffi à calmer les esprits. Le mécontentement des agriculteurs est général, "les familles d’agriculteurs sont mises sous pression", précise Arnaud Lespagnol, Président de la FNSEA en Centre-Val de Loire.
Une pression de la société, d’un gouvernement qui multiplie les règles parfois contradictoires et une économie mondiale déstabilisée par les conflits actuels. Le tout saupoudré d’un "agribashing" persistant. Cocktail épicé pour une mobilisation de masse.
Le gouvernement vient de voter le budget 2024 qui supprime la défiscalisation du diesel agricole sans trouver de contre-parti pour les exploitants. La goutte de trop dans la longue liste des normes et contraintes du secteur selon les membres de la FDSEA.
D'autant qu'en région Centre-Val de Loire, l'année 2024 à mal commencé pour les agriculteurs. Le 10 janvier, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté préfectoral qui validait les chartes d'épandage de pesticides. Saisies par Générations Futures et l'UFC-Que Choisir, ces chartes permettaient de traiter plus près des habitations que la réglementation générale. Entre 3 et 5 mètres des bâtiments, au lieu des 10 à 20 mètres préconisés dans la loi.
Des agriculteurs freinés dans leur transition écologique ?
Côté transition écologique, les agriculteurs font des efforts. En région Centre-Val de Loire, "on a multiplié les projets de décarbonations grâce à la méthanisation du lisier ou la captation du carbone par la biomasse, et ces projets sont attaqués au tribunal. Côté gestion de l’eau, nous changeons nos pratiques pour arrêter de pomper dans les nappes phréatiques en été et stocker l’eau dans des retenues. Et nous sommes déboutés par la justice," déplore Arnaud Lespagnol. Pour la FNSEA, les agriculteurs font des efforts mais ils sont freinés dans leur transition écologique par les associations ou la mobilisation des riverains.
Et les efforts ne sont pas terminés. D’ici 2030, le gouvernement souhaite réduire de moitié l’usage des pesticides par rapport à la période 2015-2017. Bien loin de l’objectif du pacte vert européen, rejeté en novembre dernier, qui voulait baisser de moitié l’usage global des pesticides d’ici 2030 pour toute l’Union Européenne. Une stratégie pour augmenter la part du bio dans l’agriculture européenne à 25% d’agriculture biologique d’ici 2030.
Une loi Agriculture en février, juste après le salon
L’Union européenne presse les Etats à prendre le tournant de la transition écologique dans l’agriculture. En France, les agriculteurs attendent leur fameuse loi Agriculture. Annoncée par Marc Fesneau, lors de la manifestation des jeunes agriculteurs Terre de Jim en septembre 2022 à Outarville, la loi agriculture peine à arriver. Après des mois d’échanges en région, les agriculteurs attendent depuis avril dernier qu’une loi soit présentée au Parlement. Les agriculteurs s'impatientent. "Il faut terminer le travail", pour Arnaud Lespagnol rassuré par le maintien de Marc Fesnea, au poste de ministre de l'agriculture au dernier remaniement. Le projet de loi devrait être présenté au Parlement après le salon de l’agriculture autour du 3 mars.
L’Ukraine, un autre "concurrent" sur le marché des céréales
En plus des craintes locales, le déséquilibre des marchés mondiaux entraîne de nouvelles tensions. Avec la guerre, les céréales ukrainiennes ne trouvent plus preneurs côté Russie, marché principal pour écouler les produits ukrainiens avant le conflit. L’Union Européenne souhaite soutenir l’Ukraine en ouvrant son marché aux produits habituellement achetés par les Russes. Si sur le papier, l’idée est louable. Pour les agriculteurs céréaliers français, l’arrivée du maïs, tournesols et blé ukrainiens risque d’engorger le marché français. Si à terme, l’Ukraine intègre l’Union Européenne, à quelle part du budget de la PAC aurait-elle droit ? Encore des raisons qui alimentent la colère.