Ce dimanche 9 juin, Louis Poggi s'apprête à fouler une dernière fois la pelouse de Mezzavia en tant que joueur. À 40 ans et après plus 430 matchs disputés, l'actuel président du GFCA, a décidé de ranger les crampons au vestiaire. Définitivement.
"Parler de moi, je n’y arrive pas trop... Je parle davantage du collectif parce que sans les autres on n’est rien."
Avant d'enfiler une dernière fois le maillot rouge et bleu du GFCA ce dimanche à Mezzavia pour la réception du Gallia Lucciana en clôture du championnat de Régional 2, Louis Poggi a accepté de poser son regard sur sa carrière de joueur. De sa première licence à l'âge de 5 ans à l'AJ Biguglia à ses années Gazélec en passant par Toulon, Bastia-Borgo et le Sporting, le milieu de terrain offensif aura disputé plus de 430 matchs, dont près de 120 dans le giron professionnel avec le Gaz.
S'il avait rangé une première fois ses crampons en 2019, après une année au SC Bastia, il avait décidé de les rechausser, très vite, pour évoluer au niveau régional à l'AJ Biguglia puis l'AS Santa-Reparata. Ce qui l'avait ensuite conduit à de nouveau retrouver "son" Gazélec. Un club où il a passé en tout 17 saisons et avec lequel il a tout connu : les rétrogradations - notamment administratives - comme les plus belles victoires sur le terrain.
Ce dimanche, c'est donc sur la pelouse d'Ange-Casanova que la carrière de ce Bastiais d'origine va se terminer. "Avec ma famille du Gazélec, précise-t-il. Ce sera surtout l'occasion de remercier tous les gens. Je ne peux pas tous les nommer ici car j'ai peur d'en oublier..."
Désormais président - "par la force des choses" comme il le dit - d'un GFCA en convalescence après ses déboires extra-sportifs, Louis Poggi pourra désormais se consacrer entièrement à reconstruire ce club qu'il aime tant et dont il a été l'emblématique capitaine de l'équipe fanion pendant de nombreuses saisons.
Cet après-midi, il soulèvera avec ses coéquipiers le trophée de champion de Régional 2. Son dernier en tant que joueur, histoire de boucler une longue carrière sur laquelle il revient dans l'entretien qu'il nous a accordé.
"Une aventure humaine exceptionnelle"
France 3 Corse : Ce dimanche, vous jouerez votre tout dernier match à l’occasion de la venue du Gallia Lucciana à Mezzavia. Une rencontre de Régional 2 sans enjeu, le GFCA étant déjà champion et assuré de monter en Régional 1 la saison prochaine. On imagine que, pour vous, le moment sera émouvant...
Louis Poggi : Ce sera l’occasion de dire merci à tous les gens qui m’ont accompagné dans ma carrière et qui m'ont aidé au club. J'ai commencé cette saison pour donner une dynamique au Gazélec. Il nous manquait des joueurs parce qu’on a dû composer un groupe en très peu de temps. Ça ne s’est pas trop mal passé, et ça a payé. Ce dimanche, vu que mon départ d’ici en 2017 m’avait contrarié, je me suis dit que j’allais m'offrir un petit kif par rapport à tout ce que l'on a fait. Je vais parler un peu égoïstement, même si ce n'est pas dans mes habitudes, mais je vais me faire plaisir en jouant et en remerciant tout le monde.
Le 18 juin prochain, vous aurez 40 ans. C'était donc le moment de définitivement ranger les crampons ?
Oui. Alors, on pourra dire que j'ai arrêté plusieurs fois, notamment à Bastia, en 2019, où je pensais que c'était fini... Ensuite, j’ai eu l’appel de mon club de cœur, le Gazélec, qui avait besoin de moi, que ce soit un peu sur le terrain et beaucoup dans le vestiaire. L'an passé, il s’est passé ce qui s'est passé... Au bout du compte, j'ai fait quelques matchs en N3 les six premiers mois où le club a pu les jouer (Placé en liquidation judiciaire fin janvier 2023, le GFCA n'avait pu terminer la saison, ndlr). Cette année, j'ai voulu recommencer parce que je voulais quand même marquer l'esprit du groupe et montrer un peu le chemin qu'il fallait emprunter. Après, à un moment donné, toutes les bonnes choses ont une fin et il faut savoir dire stop. Vu mon poste et vu la saison que l’on fait, je pense effectivement que c'est le bon moment.
Je suis arrivé au Gazélec en octobre 2000, après avoir passé deux ans au centre de formation de Nantes.
Louis Poggi
Vous avez joué quatre matchs de R2 cette saison. Vous avez quand même pris un peu de plaisir ?
J'en ai pris sans véritablement en prendre dans le sens où ma fonction de président fait que quand on est sur le terrain, on pense aussi à autre chose. Je ne pensais pas totalement à jouer au foot. Et quand on ne pense pas totalement au foot mais à ce qui va se passer au club, avec tout ce qu'on a à y faire, c’est donc un peu compliqué...
GFCA, Toulon, SC Bastia, Bastia-Borgo... En tant que joueur, vous êtes passé par plusieurs clubs mais le Gazélec garde une place particulière dans votre cœur. Vous y étiez arrivé en provenance de Nantes à l’âge de 16 ans…
Je suis arrivé au Gazélec en octobre 2000, après avoir passé deux ans au centre de formation de Nantes. Là-bas, ça a été pénible pour moi, je ne rentrais plus trop dans les plans des Nantais... Après il y a eu l'appel du GFCA, de Dédé Di Scala et Pascal Casanova. Je suis donc arrivé ici en moins de 18 ans nationaux comme cela s’appelait à l’époque. J’ai fait deux saisons puis j’ai repris avec la CFA après la rétrogradation du club en 2001 par la DNCG. Du coup, j'ai passé la saison entière avec la CFA. En 2003, on monte en National et je reste jusqu'en 2005 où le club avait décidé de ne pas me conserver. Je pars donc à Toulon.
Vous aviez notamment suivi André Di Scala qui était devenu le manager général du Sporting Toulon Var…
Oui. J’ai passé deux saisons là-bas avec un bilan mitigé : la première année, on a failli monter en Ligue 2 et la deuxième, nous avions été relégués en CFA. À Toulon, j’ai connu de bonnes personnes, notamment Jérôme Le Moigne. Après, je suis revenu au Gaz en 2007. J'y suis ensuite resté jusqu’en 2017 avec le parcours que l'on connaît...
Durant cette décennie, le GFCA va connaître plusieurs accessions pour se hisser jusqu’en Ligue 1. Il y aura aussi l’épopée en Coupe de France 2011-2012 avec une élimination face à Lyon en demi-finale. Que retenez-vous de cette période où vous avez notamment évolué au plus haut niveau ?
Cela reste la période un peu glorieuse de ma carrière où, à un moment donné, j'ai connu de très belles choses ici. En 2017, nous nous étions quittés avec le club, pas de la meilleure des façons pour ma part. J'avais végété pendant quelques mois et broyé un peu de noir. Ensuite, quand on se remémore les bons souvenirs, c'est ça qui reste, et le mauvais disparaît... J'ai passé de bons moments et j'ai vécu une aventure humaine exceptionnelle pendant toutes ces années. J'ai connu des gens magnifiques avec lesquels j'ai conservé de forts liens d'amitié. D’autres, malheureusement, ne sont plus là...
En 2018, après une saison à Bastia-Borgo, vous signez au SC Bastia en National 3. Le club est alors en pleine reconstruction après sa rétrogradation administrative en 2017. Comment s'est passée votre unique saison sous le maillot bleu ?
J'ai un peu aidé à reconstruire ce club magnifique et très exigeant pour qu'il remonte en N2. J'étais parti pour y rester plusieurs années mais la vie, notamment privée, a fait qu’il y avait des contraintes que je ne pouvais pas assumer. J’avais aussi 35 ans, un âge un peu avancé. À un moment donné, il fallait passer à autre chose. J’ai donc décidé d’arrêter et de m’amuser dans des clubs amateurs. J’ai signé en R1 à l’AJ Biguglia, puis en R2 à Santa Réparata, pour faire plaisir à mon cousin qui en était le président. On a d’ailleurs failli monter en R1. Après, j’ai décidé de stopper et il y a eu l’appel du pied du Gazélec qui était dans un nouveau projet. Je me suis donc préparé parce que j'avais pris quelques kilos et on a passé six bons mois en National 3. Je pense qu’on aurait atteint nos objectifs s’il n’y avait pas eu la liquidation... Après, on a fini la saison comme on pouvait et je suis devenu président, un peu par la force des choses...
Depuis vos débuts en CFA en 2001-2002, vous avez joué plus de 430 matchs (professionnels et amateurs confondus). Parmi tous les souvenirs de votre carrière de joueur, lequel est-il le plus marquant ?
Tout le monde peut penser que c’est la montée en Ligue 1 mais il y en a deux : la première montée en Ligue 2 avec le Gazélec, en 2012, lorsqu’on gagne à Épinal.
Vous marquez d'ailleurs un but décisif ce jour-là...
Oui, c'est vrai... Ensuite, je garde en mémoire cette épopée en Coupe de France, la même année, qui a été magnifique. Au-delà de l’aspect sportif, c'était une aventure humaine hors du commun où toutes les composantes du club étaient soudées. C'est ça qui a fait marcher la machine. Même si à un moment donné, on rentre dans un monde professionnel qui demande beaucoup de rigueur et beaucoup de choses à tous les niveaux, je pense qu'il faut garder cette solidarité et cette proximité entre toutes les composantes du club. Car aujourd'hui, c'est ce qui représente le mieux le Gazélec.
À l’inverse, y a-t-il un souvenir que vous souhaiteriez effacer de votre mémoire ?
Ce n’est pas un souvenir purement sportif. C'est mon départ d'ici en 2017 qui, je pense, a dépassé un peu tout le monde. Bien sûr qu'à un moment donné il faut savoir dire stop. C'était certainement la fin d'un cycle, mais j'aurais aimé que cela se passe différemment, car on s’apprécie tous. S’il y avait un petit truc à changer, ce serait celui-là. Partir, ce n’était pas un problème, mais j’aurais aimé que la façon soit différente. Après, j'ai été fautif autant que les autres.
Parmi la quarantaine de buts que vous avez inscrits, lequel retenez-vous ?
Il y en a deux : celui à Épinal qui remet le club dans le monde professionnel (en mai 2012, ndlr). Ce n’était pas le but en lui-même mais c'est lui qui conclut un peu tout avec l'accession en Ligue 2. Le second but, c’est celui contre l’ACA (en 2015, ndlr). En tant que Gazier, marquer ce but à Timizzolu…
"Regrets", "aurait pu mieux faire", "a tout donné". Quand vous jetez un rapide coup d'œil sur l'ensemble de votre carrière, quelle est votre analyse ?
Je ne suis pas de ceux qui vont dire “oui, j'aurais pu, j’aurais dû”. Je suis content de ce que j’ai fait. Alors, ça aurait pu être mieux, ça aurait pu être pire... Mais, grosso modo, personnellement, je pense que j'ai atteint ce que je pouvais, grâce à moi mais aussi au club dans lequel je me suis investi aujourd'hui. Le Gazélec m'a beaucoup donné. Je pense que sans lui, je n’aurais pas atteint les objectifs que je m’étais fixés. Aujourd’hui, de regrets, je ne peux donc pas en avoir...
Ce dimanche, pour vos adieux au terrain, vous célébrerez donc votre dernier titre en tant que joueur et le premier en tant que président du GFCA...
Exactement ! C'est mon dernier titre en tant que joueur, même si j'ai connu beaucoup plus d'accessions que de titres (rires). En tant que président, je suis jeune. Je le suis devenu alors que ce n'était pas forcément prévu que je me retrouve là aussi tôt. On a fait ce qu'on a pu avec toute la famille du Gazélec pour sauver l'association. Ce n'est pas moi personnellement, on a fait comme on a pu tous ensemble, on a sauvé les meubles grâce à beaucoup de personnes. Maintenant, il faut repartir d'en bas pour amener le club à des divisions plus nobles pour lui. C'est une belle histoire et un beau défi à relever qui nous attend...