Pas un seul film financé par l'Alsace cette année sur la Croisette. Pourtant la Région et la CUS tentent de séduire les cinéastes. Elles dépenseront plus de 2,3 millions d'euros à l'aide à la production audiovisuelle en 2013. Un tout nouveau film de promotion a été présenté à Cannes.
Au moins, le festivalier cannois n'aura pas besoin en cette année 2013 de patienter dans les files d'attente pour découvrir la dernière production financée en partie par de l'argent alsacien. Il n'y en a tout simplement pas. Aucun film n'a été retenu pour ce 66ème Festival, qu'il s'agisse de la Sélection officielle ou des sections parallèles. Pas même un court-métrage (à une exception près *).
Et pourtant la petite délégation venue d'Alsace sur la Croisette ne ménage pas ses efforts. Au total, ils sont sept à avoir fait le déplacement cette année. Les rendez-vous s'enchaînent avec les réalisateurs et les producteurs.
"Nous sommes là pour leur dire que nous avons une grande variété de décors en Alsace, les villes, la montagne, la campagne, etc. le tout concentré sur un petit territoire. Et ça, ce n'est pas forcément connu" explique Estelle Zimmermann du bureau de tournages de la CUS, le regard visiblement rempli d'enthousiasme.
Chercher l'oiseau rare
Car pour 2013 et les années à venir, c'est à Cannes qu'il faut nouer les contacts. Michel Woch, loin de son quartier général du Bureau de tournage de l'Agence culturelle d'Alsace de Séléstat, a chaussé ses lunettes de soleil et adopté le look cannois à la recherche de l'oiseau rare qui viendra poser ses caméras en terre alsacienne.
2,3 millions d'euros par an
En cette période de restrictions budgétaires, d'autres collectivités, au contraire, ont tranché dans le vif. Ainsi notre voisine, la Franche-Comté, a t-elle décider de saborder son fonds de soutien au cinéma et à l'audiovisuel au profit des arts plastiques. Soit la disparition d'un budget annuel de 400 000 €. L'Alsace n'a pas fait ce choix (voir encadré ci-dessous, interview de Pascal Mangin).
2012 n'a pas été une année éclatante pour les tournages alsaciens; avec 131 jours de tournages (134 en 2011). on est loin des années "fastes" de 2009 et 2010 qui avaient connu 235 jours de tournage, surtout grâce à la production de séries comme Les invincibles et Xanadu (pour Arte).
La motivation des producteurs est surtout financière : 100% des tournages de longs métrages effectués en Alsace ont bénéficié d'aides publiques, à l'instar de la plupart des régions. Autrement dit, sans aide publique, il n'est pas certain que les atouts alsaciens soient suffisants pour attirer les cinéastes. En tout cas pour les longs métrages de fiction. Mais la région accueille toutefois un certain nombre de tournages étrangers et de publicités, deux catégories qui ne perçoivent pas d'aides régionales. Dans certaines régions comme Ile-de-France ou PACA (qui restent des exceptions), la proportion des tournages aidés est inférieure (29% pour IDF et 38% pour PACA). La Basse-Normandie, elle, ne finance aucun long métrage mais elle a vu tourner sur son sol 8 films en 2012. Elle reste un cas unique en France.
A bas les clichés
Dans cette passe en demi-teinte, l'Alsace tente donc de redoubler d'efforts : le budget est en hausse, le plafond d'aides au long-métrage de fiction est passé de 200 000€ à 250 000€, et la Région vient de produire un nouveau clip de présentation pour mettre en valeur ses atouts. Le petit film se garde bien d'ailleurs de jouer sur les clichés habituels, comme tient à le souligner Michel Woch: "Parfois un réalisateur nous dit : "J'ai un projet, je tournerai bien chez vous mais il n'y a pas de cigogne dans mon film". Nous on essaye de sortir des 5 C : choucroute, cigogne, coiffe, cathédrale, colombages".
Un savoir-faire régional
Parfois, certaines fictions, subventionnées par la Région et la CUS, ne présentent aucun rapport avec l'Alsace. C'est le cas du long-métrage tourné en 2012, Vandal, d'Hélier Cisterne (pas encore sorti en salles), dont le scénario n'a rien à voir avec la région. A ceux qui pourraient s'étonner de l'utilisation d'argent public versé à des fictions ne mettant pas en valeur l'Alsace, Estelle Zimmermann répond sans détours : "Nous ne sommes pas le Comité régional du tourisme, ce qui compte ce sont les critères artistiques". Mais aussi le savoir-faire régional : l'Alsace met en avant ses nombreuses sociétés de production et ses techniciens de l'audiovisuel installés dans la région.
Abd al Malik : tournage en juillet
En attendant que Cannes finisse par porter ses fruits, plusieurs projets sont déjà dans les tuyaux pour 2013 : Arte vient de commencer le tournage d'une série de docu-fictions sur la Première guerre mondiale. France 3 tournera un téléfilm cet été, Le sang de la vigne, qui sera diffusé dans la case fiction du samedi soir. Très attendu aussi, le tournage dès le mois de juillet du long métrage Qu'Allah bénisse la France, réalisé par Abd al Malik, adaptation cinématographique de son livre éponyme qui sera en partie tournée dans le quartier du Neuhof à Strasbourg.
(*) Le court-métrage Un, deux, trois, quatre tourné en septembre dernier au Centre hospitalier de Rouffach, était en lice pour le Prix Unifrance films du court-métrage (Unifrance est l'organisme chargé de la promotion du cinéma français à l'international).
L'Alsace à Cannes : "modeste et efficace" Pascal Mangin, président de la Commission culture du Conseil régional et de l'Agence culturelle d'Alsace, est de passage à Cannes. Interview sur la Croisette. Tout le monde est ici. On n'a pas de stand à nous, on mutualise avec les autres régions françaises grâce à Film France (NDLR : Film France réunit le réseau des 40 commissions du film et a pour mission de promouvoir les tournages et la post-production en France). On essaye de trouver la place qui peut être la nôtre, c'est à dire modeste et efficace. Le budget est en hausse de 20%.Pourquoi ? On a décidé de faire un effort. Le cinéma, c'est évidemment une activité culturelle d'importance mais c'est aussi une activité économique. Selon le type de projet, il y a un retour important pour la région. Pour les plus grands projets, on évalue que pour 1€ investi, 9€ sont dépensés. Faire un effort supplémentaire, ça montre aussi l'ambition qui est la nôtre. Le contexte économique est difficile. D'autres régions, comme la Franche-Comté, ont abandonné le soutien au cinéma. Pourquoi continuer ? Il ne me revient pas de m'immiscer dans les affaires franc-comtoises. La Franche-Comté a fait des choix. Nous on pense qu'encore une fois, il y a une réalité économique : il faut aussi soutenir les techniciens, les gens qui travaillent dans ce secteur. Quand le contexte budgétaire est contraint, la culture ne doit pas être absente. J'observe qu'à Cannes, au-delà de la compétition artistique, se déploie une vraie activité économique et il n'y a pas de raison que l'on soit absent de ça. C'est la première fois que vous êtes présent à Cannes. Quelles sont vos impressions ? Il y a une ambiance particulière : là où il y a des caméras, des paillettes, de la lumière, ça attire plein de monde. De l'autre côté, on sent bien que c'est aussi un marché. Il y a des gens qui viennent chercher de l'argent, comment faire leur film, etc. C'est un lieu de contact, de réseaux, tout se met en mouvement ici. |
Les aides cinéma et audiovisuel en Alsace
Et aussi :
Tout savoir sur les tournages en Alsace