Le blasphème ne serait plus un délit ?

Les représentants des principaux cultes en Alsace-Moselle, y compris l'islam, demandent que le délit de blasphème, toujours en vigueur dans le droit local, soit abrogé car "il est tombé en désuétude", a-t-on appris lundi de sources concordantes.

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Le reportage de S. Malal - P. Gidel - I. Hassid-Guimier - M. Ruch. Interviews : Eric Sander, Monseigneur Grallet, archevêque de Strasbourg, le 11 Janvier 2015, secrétaire général Institut du Droit Local - Nora Tafiroult, juriste et consultante au CRCM

Catholiques, protestants, juifs et musulmans ont fait cette proposition le 6 janvier - à la veille de l'attaque sanglante contre Charlie Hebdo - lors d'une audition commune à Paris devant l'Observatoire de la laïcité, une instance rattachée aux services du Premier ministre. "Cela montre que les cultes sont conscients du caractère excessif d'une telle mesure, et de son caractère attentatoire à la liberté d'expression. Ils nous ont proposé eux-mêmes d'y mettre un terme", a dit à l'AFP Nicolas Cadène, le rapporteur général de cet observatoire. 

Le blasphème est théoriquement réprimé en Alsace et en Moselle par un article hérité du code pénal allemand de 1871, resté en vigueur après le retour à la France de ces trois départements, en 1918. Il n'a jamais été appliqué depuis lors, a indiqué à l'AFP le secrétaire général de l'Institut du droit local alsacien-mosellan, Eric Sander. Il punit d'un maximum de trois ans de prison "celui qui aura causé un scandale en blasphémant publiquement contre Dieu par des propos outrageants, ou aura publiquement outragé un des cultes". En 2013, la Ligue de défense judiciaire des musulmans, outrée par une caricature publiée à Une de Charlie Hebdo, avait invoqué le blasphème pour attaquer l'hebdomadaire satirique devant un tribunal strasbourgeois. Mais la procédure avait été déclarée nulle, pour des raisons de forme. M. Sander n'a pas connaissance d'autres tentatives d'invoquer cette disposition légale. 

Interrogé par l'AFP, l'archevêque de Strasbourg, Mgr Jean-Pierre Grallet, a confirmé que les représentants des cultes avaient "mûri depuis un certain temps" l'idée de demander l'abrogation de ce délit "obsolète". "La République a suffisamment de moyens pour inviter au respect mutuel", a souligné le responsable catholique. "Nous sommes sur la même ligne. (...) Ce qui nous importe, c'est la liberté d'expression", a dit de son côté Abdellaq Nabaoui, le vice-président du Conseil régional du culte musulman (CRCM) d'Alsace, également auditionné mardi par l'Observatoire de la laïcité. A terme, il reviendrait éventuellement au Parlement de se saisir de ce dossier, pour abroger formellement ce délit, selon l'Institut du droit local. 

L'avocat de Charlie Hebdo, Richard Malka, a souligné lundi que le prochain numéro de l'hebdomadaire comporterait "évidemment" des dessins sur Mahomet et des moqueries sur les politiques et les religions. "Une pancarte +Je suis Charlie+, veut dire +vous avez le droit de critiquer ma religion, parce que ce n'est pas grave", a-t-il déclaré.

D'après AFP
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