L’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale hier soir par Emmanuel Macron a pris de court l’ensemble des partis politiques français. Dans ce "chaos", le parti autonomiste Unser Land croit en ses chances. Les récents débats sur une éventuelle sortie de l’Alsace du Grand Est pourrait bien le favoriser.
Dans ce jour d’après, les différentes forces politiques françaises sont encore groggys. L’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron dimanche 9 juin a majoritairement suscité l’incompréhension et la sidération. "Il y a une forme de stupeur chez les députés", reconnaît d’une voix atone Thierry Sother, premier secrétaire fédéral du Parti socialiste du Bas-Rhin. Partout, le branle-bas de combat a commencé pour être au rendez-vous des élections législatives anticipées. "Il est difficile de s’organiser. Une campagne en 21 jours, c’est historique et ce n’est un avantage pour personne."
Dans la mêlée qui s’annonce, le parti autonomiste Unser Land, 0 député élu lors du scrutin de 2022, s’est déjà mis en ordre de marche. "On a toujours eu de la portée et du répondant. Dès hier, on a reçu des dizaines de mails et de messages de militants, de sympathisants, qui étaient prêts à battre le pavé, à aider et à tracter. Certains ont même sorti des affiches que nous avions en stock pour aller les coller à Mulhouse", confie Maxence Helfrich, directeur du mouvement.
Passé la douche froide des récents propos du chef de l’Etat, refusant d’envisager une sortie de l’Alsace du Grand Est, ses troupes semblent prêtes à partir au combat, justifiant d’un regain d’intérêt pour une question loin d’être anecdotique dans la région. "On voit que le sujet de l’Alsace est toujours aussi important. Chaque mois, on parle de l’Alsace et du manque de démocratie. Nous, quand on parle de l’autonomie, ont à un projet de société derrière. Je sens qu’on peut créer un engouement", reprend Maxence Helfrich.
Un calendrier favorable ?
"On a beaucoup plus de gens qui sont venus sur notre site ces dernières semaines. Beaucoup plus qu’avant", renchérit Bénédicte Matz, candidate dans la 4ème circonscription du Bas-Rhin il y a 2 ans. La pédiatre installée à Strasbourg sera bien de la partie en 2024, avec "un timing au niveau de la politique locale, pas forcément mauvais". Même si, concède-t-elle, "cela nous met une fois de plus devant le dilemme cornélien de devoir choisir entre la démocratie et l’extrême droite. Alors que les petits partis ont des choses à dire aussi. Ça va une fois de plus flouer les débats démocratiques."
"Ce qui nous va très bien, c’est que ces élections arrivent un mois après les déclarations de Macron et les députés sortants vont devoir rendre des comptes par rapport à ça. Certes, on est étonnés de cette dissolution, mais pour nous ça arrive au bon moment. La voix que nous portons, la nécessité d’une refonte institutionnelle, nous sommes les seuls à la porter. Cela dépasse la simple question de la sortie du Grand Est", assure quant à lui Jean-Georges Trouillet, président d’Unser Land.
Un retour aux urnes ? Même pas peur donc. "On sera présent dans toutes les circonscriptions…On est prêts. On est en train de mettre au point notre profession de foi et de finaliser les candidatures."
Un appel au don pour financer la campagne
Côté finance, avec une moyenne de 8 000 euros dépensés par circonscription pour faire campagne, un appel aux dons sera nécessaire. Côté message, "ce qui est important pour nous, c’est donner des responsabilités aux territoires, au sein de l’Europe. Et l’Alsace en particulier à intérêt à partager avec les pays limitrophes pour développer son économie", avance Bénédicte Matz. "Nous, ce qu’on veut, ce sont des réelles compétences régionales et devenir un laboratoire de l’autonomie pour que ça puisse prendre dans d’autres régions", reprend-elle encore, avant de rappeler : "l’essence même d’Unser Land, c’est l’autonomie de l’Alsace".
Pique envoyée au délégué du Rassemblement National en Alsace, Christian Zimmermann. Galvanisé à la vue des résultats de sa formation lors des élections européennes, ce dernier a déclaré à France 3 Alsace ce lundi matin : "nous sommes le seul parti politique qui voulons que l’Alsace sorte du Grand Est et c’est une sanction vis-à-vis des LR et de Renaissance qui n’ont jamais su se positionner sur cette question."
Unser Land dans l’ombre du Rassemblement National ?
"Il se moque du monde ! Lors des dernières législatives, certains s’en sont emparés mais pour des raisons électorales, opportunistes. Il me semble que Marine Le Pen n’a jamais voulu une réelle décentralisation avec une autonomie des régions. Ceux qui ont été les seuls à le vouloir pendant très longtemps, c’était nous", réagit l’ex-future candidate autonomiste. "L’autonomie de l’Alsace, ce n’est pas juste un slogan de campagne."
Le parti régional pourra-t-il se démarquer et se faire une place dans la campagne qui débutera officiellement le17 juin prochain ? En attendant, il compte bien jouer des coudes. "On a une possibilité de faire de bons scores parce qu’on propose une vraie alternative aux Alsaciens qui ont envie de croire en une Alsace ouverte et pas en une Alsace qui se referme" reprend à son tour Maxence Helfrich.
Et pour lui, il y a bien des raisons d’y croire. "Dans les projections les plus réalistes, on peut avoir des cartes à jouer, comme à Sélestat où, en 2017, nous étions au deuxième tour. On a une belle base électorale dans le Sundgau. Je pense aussi à l’Outre-Forêt où notre candidat avait fait un très bon score, aux alentours de 9%, sur une campagne très difficile."
Celle de 2024 s’annonce courte et tout aussi rude. Restera la vérité des urnes.