L'épidémie de grippe aviaire, qui touche l'ouest de la France depuis plusieurs mois, impacte directement les producteurs alsaciens : faute de pouvoir se fournir en canetons, ils n'ont plus de canards à élever puis transformer en foie gras et autres gésiers ou magrets. Leur avenir est très incertain.

Même les gros bras du secteur tremblent. Ainsi la ferme Schmitt, à Bischoffsheim, fer de lance de la transformation de canard en Alsace depuis 1977. Elle représente 25% de la production régionale. En cette mi-juillet, il n'y a plus de volaille à transformer. L'élevage est vide. 

En cause : une pénurie de canetons en provenance de Vendée, où se situent les deux principaux couvoirs qui approvisionnent habituellement la dizaine de transformateurs alsaciens. La façade ouest est touchée depuis l'automne dernier par la grippe aviaire. Habituellement, la ferme Schmitt fait venir 25.000 canetons chaque année, sur les 100.000 livrés en Alsace. Depuis le mois de mars, elle n'en a reçu aucun. Il n'y a donc plus de canards à travailler.

La production est assurée jusqu'à Noël, grâce au stock constitué. Les particuliers, en tout cas, trouveront jusque là leurs produits habituels : le foie gras bien sûr, mais aussi les cuisses, les magrets et autres gésiers. Mais les restaurateurs et revendeurs devront déjà se passer des produits Schmitt cette fin d'année 2022 pour le canard.

Fin du foie gras alsacien en 2023 ?

Et après, c'est la grande inconnue. "En 2023, on ne sait pas du tout si nous allons pouvoir continuer à transformer du canard, qui représente tout de même 30% de notre chiffre d'affaires, soupire Gilbert Schmitt, qui est à la tête de la ferme avec son frère.

L'approvisionnement est un vrai problème, nous sommes impactés depuis plusieurs années. Nous n'achetons pas la matière première, nous élevons les canards sur place. Si ce n'est plus possible de le faire, faute de canetons, nous devrons penser à remplacer le canard par d'autres volailles... Il va falloir faire preuve de créativité pour adapter nos recettes, et remplacer cette viande très particulière par du poulet par exemple, ou de la dinde."

Un avenir incertain pour toute une filière, qui représente 1% à peine de la production nationale, et compte une petite dizaine de producteurs en Alsace, tous impactés par cette crise sanitaire. Alors même que la région n'a pas été touchée directement par la grippe aviaire, elle en est une victime collatérale.

L'espoir d'être indemnisés

Les producteurs, réunis en association, espèrent dans un premier temps obtenir une aide pour compenser leurs pertes pour l'année 2022, même si la région est en zone dite indemne de grippe aviaire.

A plus long terme, c'est tout le modèle économique de la filière qu'il faudrait revoir. La production alsacienne est trop faible pour espérer rentabiliser la relocalisation d'un couvoir sur son territoire. C'est pourtant l'une des pistes avancées par les professionnels, soutenus par la FDSEA.

"Nous pourrions réunir les besoins de tout le Grand-Est, ainsi que l'Allemagne. Si nous pouvions élever nos propres canetons, c'est un risque en moins d'exposition à la grippe aviaire, expose Yohan Lecoustey, directeur de la FDSEA 67. Avoir de très grosses structures qui approvisionnent toute la France devient trop risqué." Encore faut-il qu'un investisseur privé suive le projet.

Des incertitudes qui pèsent lourd. Sur l'emploi notamment : à la ferme Schmitt, une vingtaine de postes, sur les cinquante que comptent l'entreprise, sont menacés.

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