Une savonnerie artisanale bio condamnée à payer 75.000 euros d'amende pour un défaut d'étiquetage, "c'est une histoire rocambolesque"

Suite à un contrôle de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes fin 2021, Argasol, la savonnerie artisanale du Val d'Argent, a été condamnée à de lourdes amendes. En cause : l'absence de certaines mentions sur l'emballage, une omission corrigée depuis.

Après des débuts en pleine nature, dans une ancienne colonie de vacances à 800 mètres d'altitude, la savonnerie artisanale Argasol, du Val d'Argent, s'est installée dans une ancienne chapelle au cœur de la commune de Sainte-Marie-aux-Mines (Haut-Rhin). C'est là que, chaque jour, ses 17 salariés préparent des mélanges d'huiles selon la technique de la saponification à froid, les versent dans des moules, puis découpent les pains de savons durcis et les rangent dans leur emballage de carton.

Mais depuis quelques jours, le cœur n'y est pas. En cause, la condamnation du 23 mai dernier, prononcée par le tribunal judiciaire de Colmar : 50 000 euros d'amende pour la société Génération plus, qui gère la marque Argasol, et 25 000 euros pour le fondateur de la savonnerie, Lahcène Rennane. Des sommes qui pourraient mettre l'avenir de l'entreprise en péril.

La raison de cette sanction : jusqu'à fin 2021, les emballages de certains savons ne comportaient pas les indications "aroma", s'il y a quelques gouttes de parfum, ou "allergène", exigées par l'Union européenne pour les produits cosmétiques. Une omission toutefois corrigée dès début 2022.

"C'est une histoire rocambolesque qui nous affecte beaucoup, confie Cathy Mendez, la directrice commerciale et compagne de Lahcène Rennane, au micro de France 3 Alsace. On est catastrophés. Ça fait 17 ans qu'on bosse comme des fous. On a construit notre entreprise brique par brique. On trouve détestable ce genre de mise à mort d'une entreprise et d'une société alors que nos produits sont bien conformes."

Une histoire d'étiquetage

Les produits qui sortent de la savonnerie sont tous certifiés bio. Dans certains, il y a du macérat de fleurs, dans d'autres de l'huile essentielle, dans d'autres encore, quelques gouttes de parfum. Absolument rien de répréhensible. "Ce n'est pas la composition des savons qui est reprochée à mes clients, mais l'absence de mentions "aroma" ou "allergène" sur certains emballages avant 2022. C'est tout" explique maître Sophie Delahaie-Roth, l'avocate qui a défendu la savonnerie lors du procès, et plaidé sa bonne foi.

"Mes clients n'ont découvert qu'en 2021, dans le cadre d'une nouvelle certification bio extrêmement poussée, qu'il fallait rajouter ces mentions", précise l'avocate. Jusque-là, la certification bio leur était accordée par "un label associatif, donc moins drastique" reconnaît Cathy Mendez. Mais depuis 2021, la société a fait appel à un label international, Cosmos organic. Et le bureau qui a analysé ses produits lui a signalé les mentions à rajouter sur l'emballage, pour se mettre en conformité avec la réglementation européenne.

Ce qui fut fait dès janvier 2022. Depuis, "les allergènes sont tous indiqués. Ça peut être dans une huile essentielle, un parfum, un arôme ou un aliment…", détaille Cathy Mendez.

Cependant, en novembre 2021, lors d'un contrôle "assez houleux", la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) avait noté l'absence de ces mentions, puis monté le dossier qui a finalement conduit Lahcène Rennane et sa société devant le tribunal.

"Aujourd'hui, on a l'impression qu'on nous reproche que nos produits ne sont pas bio, alors que ce n'est absolument pas vrai. Tous sont certifiés par un organisme officiel" insiste Cathy Mendez. Ici, on travaille avec le cœur, et on respecte beaucoup tous nos clients."

"La composition des produits n'a pas changé avant, pendant et après le contrôle. On en revient juste à une question d'étiquetage, c'est uniquement ça, s'étrangle maître Sophie Delahaie-Roth. L'avocate estime d'ailleurs que le montant des condamnations prononcées est "ubuesque quand on le compare à d'autres dossiers, où il y a des risques pour la santé, voire des mises en danger de la vie d'autrui."

La savonnerie fait appel

L'affaire n'en restera pas là, car l'avocate a immédiatement fait appel auprès de la Cour d'appel de Colmar. Et elle n'espère rien de moins que la relaxe. "Nous avons des arguments à la fois sur l'élément matériel de l'infraction, et sur l'élément intentionnel, assure-t-elle. Car mes clients se sont mis en conformité immédiatement dès qu'ils ont su qu'ils devaient ajouter ces mentions."

Cathy Mendez aussi veut y croire. "Maintenant, on fait vraiment confiance à la justice par rapport à ça, ajoute-t-elle. Parce que franchement, on n'a pas compris cette condamnation." Elle rappelle aussi que les portes de la savonnerie "sont tout le temps ouvertes". Et que chaque client peut, comme toujours, venir assister à la fabrication des savons et poser toutes les questions qu'il souhaite.

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