Charleville-Mézières : au royaume du X, les manipulateurs radios ne veulent plus être des inconnus

Connaissez-vous le nom du manipulateur en radiologie qui s'occupe de vous faire passer un examen, un scanner ou autres radios, d'une partie de votre corps en cas de besoin ? Personne en général. Ces parfaits inconnus travaillent dans l'ombre et souhaitent plus de transparence sur leur métier.
 

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Si l'on frémit devant son radiologue médecin en attendant qu'il nous rassure, les images à la main, avec nos derniers examens en cours, on garde peu de souvenirs du travail, quelques minutes avant, des MER, les "manipulateurs en radiologie", qui nous ont accueilli et préparé pour l'acte médical.

Ce sont eux qui nous installent dans le scanner, nous rappellent avec le sourire qu'on ne va pas mourir de suite, (ça c'est pour moi en général ), et que ce n'est qu'une image de notre corps qui sera prise ce jour-là. Un métier technique, méconnu et oublié par beaucoup, en cette période d'interrogation sur les malaises du monde médical.

 X est un inconnu

Dans le froid sibérien ce jeudi 21 novembre au matin, devant l'entrée de l'hôpital Manchester de Charleville-Mézières, les visages transis sont aussi pâles que les blouses blanches. Une bonne partie des 40 "manip' radios", comme ils se nomment entre eux, du service de l'hôpital, chantent à tue-tête des encouragements militants. Une sono de folie couvre en musique les clameurs du petit groupe qui tient vraiment à marquer les esprits. Une dizaine de leurs collègues de Sedan les ont rejoints, avec des pancartes et des slogans, déroutants pour certains, mais efficaces. "Les acteurs du X ne rayonneront plus tant qu'ils ne seront pas reconnus".

Céline, 35 ans, manipulatrice en radiologie, s'est collée, elle-aussi, une banderole " En grève", en diagonale sur sa blouse. Embauchée en sortie de diplôme il y a 14 ans, elle a vu son métier changer au cours des années, et la qualité de son travail proposé aux patients se dégrader.

A l'abri du courant d'air glacial de la cour de l'hôpital, sous une porte cochère, elle nous résume son expérience sous X : " C'est déjà un métier qui n'est pas très connu à la base par le public,

Les gens nous prennent pour des infirmières ou des médecins, ils pensent qu'on est juste là pour appuyer sur des boutons et faire des radios.
- Céline Duponchel, manipulatrice radio à l'hôpital Manchester de Charleville-Mézières

"Il n'y a pas beaucoup d'évolution dans le métier et on est les oubliés du gouvernement aussi. On parle des infirmières de bloc, des médecins, mais jamais des manipulateurs radio en fait. Moi, quand je suis arrivé il y a 14 ans, on était un manip par salle, on avait notre planning, on travaillait tranquillement. Maintenant, on est un manip pour deux ou trois salles, on change de postes au fil des journées, on ne peut pas apporter une bonne qualité de soins. On nous demande des cadences avec des actes externes qui s'enchaînent de plus en plus."

En matière d'apaisement du patient, elle en connaît un rayon

"On rassure les patients, on leur explique l'examen, car lorsqu'ils viennent ils sont inquiets, pour les résultats aussi. On fait des injections de produit de contraste, ce sont des médicaments qui nécessitent une surveillance accrue. Il y a plein de choses qui font que les patients sont en stress donc, on doit prendre notre temps."

Quand on lui demande ce qui pourrait faciliter son quotidien de manipulatrice dans son service elle nous confie: " On voudrait que nos effectifs soient revus à la hausse pour pouvoir s'occuper correctement des gens, que l'on prenne un peu plus en comptes nos doléances, qu'on nous oublie pas au gouvernement pour les primes d'urgence".

On a des plannings de prévus mais, il y a des jours où il y a 30 ou 40 patients qui se rajoutent en plus, tout ça nous fait perdre de la qualité de soins. On veut simplement de la reconnaissance pour tout notre travail.
- Céline Duponchel, manipulatrice en radiologie à Charleville-Mézières

Le manip' radio est transparent

Une tête dépasse du petit groupe animé de manipulateurs professionnels : Joffrey, 30 ans, la blouse décontracte et la barbe bien taillée. Depuis seulement 6 ans dans le métier, il voit encore d'un œil neuf toutes les singularités associées à sa profession.

 Il a l'allure d'un jeune médecin, mais ce n'en est pas un, il a la carrure d'un infirmier, mais ses études lui ont ouvert d'autres portes. Il explique cette ambiguïté dans l'esprit des patients de façon simple: "il y a une différence entre un radiologue et un manipulateur en radiologie. Le radiologue est un médecin qui interprète les images, c'est lui qui pose le diagnostic. Nous, on va faire les images, les IRM, les scanners, les scintigraphies, et le radiologue va s'en servir.

On fait partie de l'équipe soignante, et on est une étape très importante du parcours de soin de santé du patient. On veut être reconnu, on veut être intégré à toutes les décisions d'ordre ministérielles, financières et de moyens personnels et matériels.

 Une revalorisation des salaires également nous permettrait de rejoindre celui des infirmières sachant qu'on a un niveau d'étude égal.
- Joffrey Marchand, manipulateur au service d'imageries médicales à CharlevilleMézières
 

La cinquantaine de manipulateurs grévistes ont été reçus en fin de journée par la DRH et la cadre supérieure en imagerie de l'hôpital Manchester de Charleville-Mézières. Les échanges ont duré 3h, les doléances locales ont été écoutées, mais le plan performance du moment mis en place par l'établissement ne permet pas de s'engager dans quelques décisions financières et autres.
D'autres réponses seront données fin décembre.

Vous passerez tous à la radio

Rassurez-vous, si ce n'est déjà fait au moins une fois  pour vous, tôt ou tard, vous aurez l'occasion de dévoiler votre "moi intérieur" aux  35.000 manipulateurs en radiologie répartis sur le territoire français. C'était un jour de colère aujourd'hui pour ces hommes et ces femmes de l'ombre, qui cherchent encore leur vraie place dans le monde médical, une image en négatif d'un service public oublié .

 
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