Procès de Monique Olivier : « Vous regrettez d’avoir dit tout ça ou vous regrettez d’avoir fait tout ça ? »

Ce mardi 28 novembre, Monique Olivier a répondu aux questions du président de la Cour d’Assises et des avocats des parties civiles sur sa personnalité. Un interrogatoire de plus de 3 heures où la complice de Michel Fourniret retrace sans difficulté son passé mais « s’embrouille » quand il faut parler des actes commis.

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Elle ne finit jamais ses phrases et balbutie beaucoup. Mais Monique Olivier a passé l’après-midi à parler, retracer son parcours et sa vie devant la Cour d’Assises. "C’est d’abord à vous qu’il appartient de vous expliquer sur ce parcours de vie" a précisé le président de la Cour d’Assises, Didier Safar à la complice de Michel Fourniret avant de l’interroger pendant plus de trois heures.

Méticuleusement, chronologiquement, l’ex-épouse de Michel Fourniret est interrogée sur les faits marquants de sa vie. Elle décrit une "enfance solitaire" et revient, avec ce qui semble être un peu de difficulté, sur les débuts de sa vie sentimentale. A propos de ses parents : "ils n’étaient pas affectueux. Comme beaucoup de parents prennent leurs enfants dans leurs bras, moi je n’ai pas connu ça. C’est l’affection qui manquait" décrit-elle à propos de son enfance. Elle revient également, avec même avec un petit sourire presque fier, sur son certificat d’études, qu’elle aura fini par obtenir en prison. Ses deux premiers mariages, la naissance de ses enfants puis la rencontre avec Michel Fourniret. "Je vous ai interrogée sans avoir beaucoup de réponse sur la durée de votre vie commune" relève au bout d’un moment Didier Safar. Car dès que les questions portent sur Michel Fourniret, Monique Olivier renoue avec le silence, l'hésitation. Les phrases deviennent des mots, les mots, parfois de simples sons. "Pfff" s’agace-t-elle en levant les épaules quand le Président de la Cour d’Assises lui demande de décrire sa vie de famille avec Michel Fourniret.

"C’est avec plaisir que j’exécuterai tes ordres"

"Compte tenu de la nature des faits qui vous sont reprochés, je me dois de vous interroger sur votre vie sexuelle" précise Didier Safar devant la Cour et l’accusée avant de tenter d’en savoir un peu plus auprès de Monique Olivier. Le couple s’est formé alors que Michel Fourniret purgeait une peine de prison pour des crimes sexuels. En 1987, Monique Olivier répond alors à une petite annonce postée par le tueur en série ardennais dans le journal "Le Pélerin" : "prisonnier aimerait correspondre avec personne de tout âge pour oublier solitude" peut-on y lire. Le couple va s’écrire plus de 200 lettres dans lesquelles se dessinent déjà les contours de leur pacte criminel. Et les surnoms employés par Monique Olivier pour qualifier Michel Fourniret dans leur correspondance n’ont rien d’anodin pour le président de la Cour d’Assises. "Mon fauve", "Shere Khan". L’image du tigre, appelle celle du dompteur, d’une personne qui domine l’autre. Mais laquelle ? C’est d’ailleurs "un personnage Disney qui cherche à tuer un enfant dans Le Livre de la Jungle" souligne Me Didier Seban, l'avocat de la famille d'Estelle Mouzin (disparue en 2003) quand vient son tour d’interroger Monique Olivier. L'accusée confiera à demi-mot que c'était "ridicule". "C’est avec plaisir que j’exécuterai tes ordres. Je veux travailler auprès de mon fauve, le seconder. Cela me ferait tellement plaisir" peut-on lire dans une des lettres.

Qui domine l’autre ? Qui donne les ordres ? C’est bien ce qu’essaye de comprendre, dès le premier jour d’audience, le président de la Cour d’Assises : "La Cour a besoin de comprendre. Vous parlez d’obéissance. La Cour a besoin de comprendre pourquoi vous lui avez obéi, si tant est qu’il y ait eu obéissance". Sur sa soumission à Michel Fourniret, Monique Olivier raconte souvent qu'elle n'avait pas le choix, que Michel Fourniret lui faisait peur. Pendant plus de trois heures de questions, son ex-épouse ne prononce d'ailleurs que très rarement le nom « Fourniret ». Sa complice, déjà condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité en 2008, s’agace quand les questions se font précises sur ses sentiments amoureux. Ses mains tremblent parfois, elle cherche ses mots. A mesure que les questions s'approchent de son intimité, les silences s’allongent et durent. "Quel est le plus beau jour de votre vie ?" lui demandera Hugues Julie, l'avocat général au terme de l'après-midi.

-"Il n'y en a aucun" répond Monique Olivier.

-"Et la naissance de vos 3 enfants ?

-"Oui, je peux vous dire que le plus beau jour de ma vie c'est la naissance de mes trois enfants"

-"Et le jour de votre mariage avec Michel Fourniret ?" tente l'avocat général

-"Non"

-"Pourquoi l'avoir épousé dans ce cas ?"

-"Il me l'avait proposé..." finit par concéder Monique Olivier

"Je regrette d’avoir dit tout ça"

Mais pourtant, jamais Monique Olivier ne nie les faits qui lui sont reprochés. Même si elle "s’embrouille" parfois, elle admet aussi l’horreur à demi-mot : "C’était un peu choquant mais disons que… c’était plutôt ridicule d’être à la recherche sans arrêt de la virginité" dit-elle à propos de Michel Fourniret et de ses macabres désirs formulés par écrit dans leurs échanges de lettres. "Donc vous y avez adhéré à cette quête de virginité ?" tente de savoir Didier Safar, le président de la Cour d’Assises. Monique Olivier ne se contentera que d’un "Bah oui". Les questions s’enchaînent sur les fantasmes de Michel Fourniret que Monique Olivier consentait à lui laisser réaliser alors qu’il avait déjà tué des jeunes filles (Isabelle Laville notamment en 1987) : "je regrette d’avoir dit tout ça" précise l'accusée visiblement mal à l’aise. "Vous regrettez d’avoir dit tout ça ou vous regrettez d’avoir fait tout ça ?" lui demande Didier Safar sur sa culpabilité. Monique Olivier ne répondra rien faisant mine de s'embrouiller et ne pas trouver les mots.

Seule dans le box

 "On va voir au fil de l'audience ce qu'elle va nous dire et jusqu'où elle va aller dans sa parole" nous explique Me Corinne Hermann, avocate d'une partie de la famille de Marie-Angèle Domèce. Pour la première fois, Monique Olivier comparaît seule et dois répondre seule aux questions depuis le décès de Michel Fourniret en mai 2021 : "Je la vois différente, elle a pris une certaine liberté d'expression. On va voir quand on va s'attaquer au crime et à ce qu'on lui reproche. Elle a une facilité de parole, ce qu'elle n'avait pas au procès de Charleville ou celui de Versailles" analyse Me Dider Seban au sortir de ce premier jour d'audience. De son côté, l'avocat de Monique Olivier, Richard Delgenes tempère : "un procès, ça dure 3 semaines. Souvent, au moment d'aborder les faits, les gens sont beaucoup moins locaces".

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