Aube : les restaurateurs gastronomiques ne lâchent pas leur toque et proposent des plats à emporter

En ruralité comme en ville, dans l'Aube, les restaurateurs n'ont pas lâché leur toque de grand chef et proposent leur gastronomie à emporter. Vincent Chevaliaras comme Daniel Vioix, proposent leurs mets élaborés pour survivre à leur fermeture et à ce nouveau confinement.
 

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Céline et Vincent Chevalarias sont les heureux  propriétaires  de l'Auberge sans nom à Chaource, dans l'Aube, située au centre du village. Une auberge sans client sur place, mais tout de même des clients servis, à domicile.
"Le premier confinement a été un choc terrible et il n'était pas question que ce deuxième confinement se passe de la même manière", confie Vincent. En mars, le restaurateur de 49 ans se remet en question et réfléchit à une autre façon de faire vivre sa passion, celle de cuisiner.

Vincent décide alors de réinventer une cuisine gastronomique. "J'ai commencé à imaginer une cuisine gastronomique qui pouvait s'inviter chez soi, comme proposer un hamburger au chaource avec des sauces raffinées et un accompagnement différent." Ainsi est né le Bun Bio au sésame, sauce burger, salade, tomate, oignons frits, cornichon, steak haché charolais et chaource accompagné de frites. Un succès que le restaurateur avait déjà testé en salle. De là s'est poursuivie l'aventure. Des variantes sont apparues pour les proposer en vente à emporter : comme le Burger Campagnard avec sa salade, ses tomates, ses cornichons, son steak haché charolais, du chèvre, une galette de pomme de terre, du bacon, agrémenté d'oignons confits.
 

 

Faire preuve d'imagination 

"Je suis presque content de ce confinement, car j'ai dû me réinventer", reconnaît Vincent Chevalarias, même si les fins de mois sont difficiles. L'aide versée par l'Etat de 1.500 € ne va pas suffire à aider les restaurateurs, alerte-t-il. Avec un loyer des 1.300 € et des factures d'électricité qui excèdent les 500 €, il est déjà à plus de 1.700 € par mois à débourser et d'autres charges viennent s'ajouter.

Un constat identique pour Daniel et Carla Vioix contraints de se servir dans leur trésorerie pour pouvoir faire face. Une injustice pour ce couple, installé à Troyes et qui ne compte pas leurs heures depuis qu' ils ont ouvert, il y a 10 ans, leur établissement gastronomique, Ô des lys. "Ce que nous vivons mal, c'est de devoir se servir dans nos réserves alors que notre chiffre d'affaires se portait bien", se désole Daniel.

Le moral n'est pas au beau fixe mais le couple a décidé de se relever les manches et a mis en place une carte gastronomique en ligne. Daniel a 55 ans et Carla 45 ans, en ce qui les concerne, c'est à eux de décider quand ils fermeront leur restaurant et non à une situation sanitaire réglementée différemment tous les trois ou quatre mois.

"Nous habitons dans un petit village à 80 km de notre lieu de travail. Si nous continuons, c'est justement pour ne pas se laisser abattre", explique Daniel. Pour Carla, il a fallu tout de suite réagir, car pas question de perdre une affaire familiale à cause d'une crise sanitaire qui échappe à tout le monde. "Tant pis si nous devons nous servir de nos économies pour traverser cette crise, mais il ne faut pas qu'elle dure trop non plusSi l'été prochain nous sommes encore dans une situation critique, les tombes, elles, vont s'éclairer", assène-t-elle.

Le couple a déjà subi, pendant deux ans, des travaux dans la rue de Turenne où se situe leur restaurant. Ce qui les désole, c'est de se sentir seuls, aucun élu n'est venu prendre de leurs nouvelles face à leur situation. "A Troyes, il a une cinquantaine de restaurants gastronomiques et nous devons être une petite dizaine à nous lancer dans la vente à emporter pour survivre car nous sommes des petites structures, ceux qui emploient du personnel ont pu se mettre en chômage partiel car ils bénéficient de plus d'aides", ajoute le couple. Daniel et Carla ne sont que deux à travailler dans le restaurant.

Daniel peut assurer une vingtaine de plats par jour. Aujourd'hui, il a fait 80 km pour une recette de 74€. " Je l'ai fait pour que ce soir, une famille mange quelque chose. On est à l'échelle humaine, ce que notre gouvernement n'est pas quand il prend une décision au niveau national."
 

Un sentiment totalement partagé par Vincent qui ne comprend pas ce nouveau confinement. Tout avait été fait dans son restaurant pour que les mesures barrières soient respectées. "À Chaource, les auberges sont restées spacieuses comme à l'époque des haltes-relais", relate Vincent. Le restaurateur regrette que les tablées parisiennes, avec des espaces plus réduits, aient contraints l'ensemble des restaurants de France à fermer. Carla, elle, se souvient qu'elle se trouvait dure et n'avait de cesse de rappeler aux clients la nécessité de remettre son masque dès qu'ils étaient sortis de table.
 

"Nous avons investi pour pouvoir rouvrir en juin et accepter de perdre des tables. Car forcément, nous avons réduit de 50 %, notre capacité d'accueil, pour au final se retrouver à devoir fermer", constate amèrement Carla. Pour elle, c'est la mort de certains établissements ce nouveau confinement. Le couple survit clairement grâce à la fidélité des clients.
 
 

"Quand les clients viennent chez nous, c'est aussi pour le cadre", reconnaissant les deux restaurateurs. "Nous,  nous proposons finalement de nous inviter chez eux", enchaînent-ils.


"La cuisine gastronomique ne se prête pas à être emportée" concède Carla, "on peut emporter une pizza, un sandwich, mais un repas gastronomique s'invite plus rarement ou ne s'impose pas à l'esprit forcément," conclut-elle.

C'est aussi pour cela que Vincent a adapté sa carte. Ses burgers, ses bagels et ses tartines salées côtoient des entrées comme une cassolette de pleurotes de Cussangy braisées à la bière du moulin de Saint-Martin ou encore un velouté de potimarron avec sa crème au Chaource et oignons frits. Pour les gourmets, la carte propose une entrecôte, crème de chaource ou une tête de veau, sauce gribiche, pommes vapeur ou encore un filet de julienne, crème d’aneth, linguine aux légumes.

 


Sur leur site, les messages d'encouragements des clients, leur donnent envie de retourner en cuisine. " On le fait pour dire qu'on est encore vivant et qu'on ne va se laisser mourir, notre but, c'est de survivre" confie Carla qui remet à jour sa carte avec au menu un riz de veau aux morilles accompagné de panais au miel. Son mari vient de lui faire goûter la crème praline pour le Paris Brest, un délice. "On continue aussi pour ne pas perdre la main et essayé toujours de surprendre nos clients avec de nouveaux goûts mêmes si cela devient difficile de trouver des produits" constate Daniel. "Forcément, les fournisseurs habituels ont réduit les commandes, car de nombreux restaurants ont fermé," rajoute-t-il.

Les fournisseurs locaux impactés 

Corinne Bridan est très inquiète. Propriétaire de la champignonnière de Cussangy, elle livre régulièrement les restaurateurs locaux. Ce deuxième confinement a de nouveau réduit leur trésorerie. " Nous avons déjà perdu 50 % de notre chiffre d'affaires lors du premier confinement et le scénario se répète avec ce deuxième confinement, c'est terrible pour nous" raconte Corinne. 

L'entreprise se retrouve à accueillir beaucoup moins de clients, conséquence la vente directe de leurs produits frais est fortement impacté. Corinne ne livre plus que Vincent comme restaurateur et un autre collègue à Chaource. "Nous travaillons avec des champignons naturels et nous retrouvons forcément avec beaucoup trop de marchandises sur les bras, même si nous arrivons toujours à en fournir à des supérettes aux alentours".

La restriction kilométrique a beaucoup réduit la fréquentation du lieu par le public. L'entreprise a dû également subir de nombreuses annulations d'événements comme le festival de Montier en Der ou encore le salon de la gastronomie à Troyes. Leurs portes-ouvertes annuelles prévues début décembre seront aussi annulées.

Avec les produits frais restants, là encore, il a fallu faire preuve d'imagination et Corinne transforme ses champignons en proposant des conserves de champignons, des fricassées de champignon à la bière, des soupes ou encore des fondues de champignons. On essaie de tenir comme ça explique Corinne qui regrette ce second confinement. Après juin, l'entreprise avait pu reprendre son rythme et presque oublier cette fermeture forcée.

Aujourd'hui, au lieu d'une vingtaine de clients par jour, elle se retrouve uniquement avec deux clients maximum, et même le site ne peut plus être visité. Auparavant, une marche à la campagne était proposée aux visites.  Corinne prépare déjà des produits pour les fêtes et espère que les réveillons vont donner envie aux clients de se déplacer davantage malgré les contraintes imposées par cette situation sanitaire. 
 


 
 



Pour la fromagerie artisanale de Chaource, le scénario est identique. Sylvie est vendeuse à la boutique de le fromagerie, elle aussi fait le même constat, les clients sont de moins en nombreux. La fromagerie survit grâce à ses livraisons pour la grande distribution, mais elle a perdu toute la cliente du public. " Les touristes ne sont plus là et nous voyons bien nos chiffres le soir sont réduit par cinq" confie Sylvie. "D'habitude, la cloche de la porte ne cesse de teinter durant la journée. Depuis quelques semaines, la porte est beaucoup moins poussée" regrette la vendeuse.


Les deux restaurants de Chaource dont celui de Vincent continuent à passer des commandes comme la champignonnière de Cussangy qui se situe à une dizaine de kilomètres. Les répercussions sont là sur nos ventes en directe conclut Sylvie qui ajoute que les autres produits vendus en boutique, comme les confitures artisanales ou les cidres fabriqués par des producteurs locaux, sont aussi affectés. 

Des festivités en péril

Carla s'apprête à annuler, l'événement qui tenait à cœur aux clients , depuis 10 ans à savoir "le week-end fruits de mer" : " On sert en moyenne plus de 70 plateaux chaque année, cette année, il n'y en aura pas" regrette Carla.

Vincent a perdu beaucoup d'événements. Le prochain sera celui du nouveau vin tant attendu par les français : le beaujolais. "Le Beaujolais est un jour très important pour nous," rapelle Vincent. Ce jeudi 19 novembre, les bars et les restaurants seront fermés et perdre cette soirée du Beaujolais nouveau est un vraie catastrophe. "Notre chiffre d'affaires dépend des ces événements aussi" rappelle Vincent.

À Chaource, comme à Troyes, on s'inquiète, car la date du 1er décembre approche et la  situation sanitaire actuelle ne semble pas s'arranger.Vincent comme Daniel espèrent une nouvelle aide de l'Etat pour pouvoir rebondir.

Pour eux, les repas de fêtes de fin d'année se feront probablement à emporter. Mais là encore, compte tenu des restrictions imposées, les réunions familiales réduites, les repas à emporter ne devront pas dépasser le nombre de six personnes.
Des invités à trier sur le volet pour pouvoir déguster ces mets gastronomiques.
 
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