Ce lundi 27 juin 2022 s'est ouvert le procès le plus attendu de l'année en Alsace. Jean-Marc Reiser, 61 ans, comparaît devant la cour d'assises du Bas-Rhin pour le meurtre présumé de l'étudiante Sophie Le Tan, en septembre 2018. Comme lors de l'instruction, il nie la préméditation et toute intention de tuer la jeune femme.
Près de quatre ans après les faits, le procès de Jean-Marc Reiser, accusé du meurtre de Sophie Le Tan le 7 septembre 2018, s'ouvre aux assises du Bas-Rhin, le lundi 27 juin 2022. Lors du premier jour d'audience, le meurtrier présumé a reconnu avoir tué la jeune femme. Il nie la préméditation et affirme ne pas avoir voulu la tuer.
Que s'est-il passé le 7 septembre 2018 dans l'appartement de Jean-Marc Reiser, à Schiltigheim, au nord de Strasbourg ? Ce jour-là, Sophie Le Tan a rendez-vous avec le quinquagénaire pour visiter son appartement, après avoir vu une annonce sur Leboncoin. L'étudiante ne sortira jamais vivante du logement de la rue Perle.
Pendant sept jours, le procès de Jean-Marc Reiser doit faire toute la lumière sur cette histoire, qui avait choqué l'Alsace à l'époque. L'un de ses avocats Francis Metzger, s'est brièvement arrêté devant la foule de journalistes en arrivant au tribunal : "[Jean-Marc Reiser] va s'expliquer. Et le cas échéant, lorsque cela sera absolument nécessaire, il va évidemment se défendre."
Pierre Giuriato, qui défendra lui aussi Jean-Marc Reiser pendant ce procès, estime que l'accusé apportera "sûrement des approfondissements". D'autres aveux ? "Ça sera peut-être la magie des assises. J'espère qu'il s'expliquera davantage et qu'il s'adressera notamment à la famille."
La famille, justement, apparaît sur la place Gisèle Halimi en début d'après-midi, dans le plus grand calme, et marche lentement. Gérard Welzer, l'un des avocat des parties civiles, ouvre le cortège et parle aux médias d'une famille "massacrée". Derrière lui, la mère de Sophie Le Tan est en pleurs, le visage fermé. Plusieurs proches et membres de l'association Icared, qui soutient la famille, ferment la marche.
"La famille est brisée, explique Me Welzer. C'est un procès qui constitue une épreuve de plus pour la famille. Ça fait partie du travail de deuil, c'est très difficile pour elle. La famille n'attend rien de monsieur Reiser. Il a assassiné Sophie, il n'a pas arrêté de mentir, il va encore mentir. Il ne dira pas la vérité."
En entrant dans la salle d'audience, la mère de Sophie Le Tan ne supporte pas de voir celui qui a tué sa fille. Elle est à deux doigts de s'évanouir, et est évacuée par le personnel de la Croix-Rouge avant même que le juré ne soit constitué. Elle quittera le tribunal en fin d'après-midi, en marchant à peine.
La mère de la victime ne reste donc pas sur le banc des parties civiles, où se trouve plusieurs membres de la famille Le Tan. Au total, les parties civiles sont au nombre de 13. Elles sont représentées par maître Welzer et maître Stephan. En face, dans le box des accusés, Jean-Marc Reiser apparaît avec un masque chirurgical sur le nez. Il porte des lunettes et un t-shirt kaki un rien trop grand.
Il s'installe dans le box sans un regard pour la famille de la victime. Devant lui, ses trois avocats : Pierre Giuriato, Francis Metzger et Xavier Metzger, avec qui il discute régulièrement.
A la lecture du rapport de synthèse, le choc se ressent dans le public venu nombreux suivre ce procès dans une salle annexe. Quand le président explique avec précision la manière dont Jean-Marc Reiser a découpé le corps de Sophie Le Tan, le silence est lourd. Au premier rang, une amie de Sophie écoute avec attention, les yeux embués rivés sur l'écran "même si c'est très dur".
J'ai trouvé votre exposé assez complet.
Jean-Marc Reiser provoquant le président de la cour d'assises
L'ordonnance de mise en accusation, longue de plusieurs dizaines de pages, est lue par le président pendant de longues minutes : "J'ai trouvé votre exposé assez complet", se permet de commenter Jean-Marc Reiser, d'un air presque insolent. C'est à ce moment qu'il confirme rester sur sa position : "Je conteste la préméditation."
Place ensuite aux premiers témoins. Attendue à Strasbourg, la mère de Jean-Marc Reiser n'a pas pu se déplacer. Sa déposition est tout de même lue. Elle y décrit un fils "tellement gentil", qu'il n'a pas pu tuer Sophie Le Tan. Le témoignage est quelque peu flou, et les incohérences nombreuses. La mère de l'accusée a 84 ans et reconnaît perdre la mémoire.
Le témoignage en visioconférence d'une visiteuse de prison a permis d'en connaître davantage sur la personnalité de Jean-Marc Reiser. Cette femme rendait visite à l'Alsacien à la maison d'arrêt de Besançon, alors qu'il était emprisonné pour viol au début des années 2000. Ensemble, ils parlaient de tout sauf de ce qui avait conduit Jean-Marc Reiser derrière les barreaux : "On échangeait sur la spiritualité, entre autres. C'était quelqu'un de très cultivé et d'intelligent. J'ai été surprise de voir qu'il était inquiété dans cette affaire." La famille Le Tan regarde l'appel vidéo sur l'écran, sans réaction.
S'il a fait ça, c'est un monstre.
La sœur de Jean-Marc Reiser
Vient ensuite à la barre la sœur de l'accusé, de cinq ans moins âgée. Peu bavarde, elle explique ne pas avoir de très grands liens avec son frère. Les mains jointes, elle raconte derrière son masque noir qu'elle et Jean-Marc Reiser se voient peu, et qu'elle a "très mal vécu" la médiatisation de cette affaire, qu'elle ne suit que par la presse : "S'il a fait ça, c'est un monstre, lance-t-elle. On choisit ses amis, et pas sa famille. Il doit répondre de ses actes."
Un comportement étrange avec les femmes
En fin d'après-midi, un homme qui se présente comme "une connaissance" de Jean-Marc Reiser est appelé à la barre. Ils se sont connus aux Restos du Cœur, tous les deux comme bénéficiaires de repas. Il parle de l'homme de 61 ans comme quelqu'un de "bienveillant, respectueux, un peu gauche parfois", tout en notant un comportement étrange avec les femmes.
Justement, pour le deuxième jour du procès ce mardi 28 juin, le rapport de Jean-Marc Reiser avec la gent féminine sera au centre des discussions. Des anciennes compagnes, dont la mère de son unique fille, sont attendues à la cour d'assises du Bas-Rhin.