Ce samedi 20 janvier, ils étaient plus de 400 à manifester contre l'ouverture en décembre dernier de l'Arcadia. Le groupuscule d'extrême droite Bastion Social a en effet élu domicile dans le quartier de l'Esplanade à Strasbourg suscitant un vif émoi.
"Pas de quartier pour les fachos. Pas de fachos dans nos quartiers". La force des slogans est qu'ils résument tout. Et celui là est plutôt bien trouvé.Depuis l'ouverture le 9 décembre dernier de l'Arcadia, rue Vauban à Strasbourg, dans le quartier de l'Esplanade, la polémique ne cesse d'enfler et les cortèges de défiler.
"Qu'ils aillent pas ailleurs non mais au diable !"
Car l'Arcadia n'est pas, malgré le saucisson, tout à fait le bar PMU du coin. L'Arcadia c'est le nouveau QG du groupuscule d'extrême droite, proche du GUD, Bastion Social, aux actions réputées violentes et qui se définit comme un « mouvement nationaliste-révolutionnaire ».
Malgré l'image d'Epinal du pinard et du saucisson, beaucoup d'habitants du quartier sont inquiets. Ils sont dans le cortège aujourd'hui. Comme Paul et sa femme Marie-Christine : "Nous on peut voir l'Arcadia de notre balcon avec les jumelles, c'est le principe qui me dérange. Aujourd'hui on ferme Fessenheim et pas l'Arcadia ! Quel est le plus dangereux des deux ? " et Paul de rajouter "Qu'ils partent, qu'ils aillent non pas ailleurs mais au diable". Sa femme partage son point de vue "Cela fait 50 ans qu'on milite et depuis peu on voit les idées racistes, fascistes gagner du terrain lentement mais sûrement. C'est sournois, comme si les gens étaient en train de les intégrer. Moi ça me fait peur".
Isabelle 50 ans est militante au NPA. Elle habite à côté de l'Arcadia. Presque une provocation. " On donne pignon sur rue à des gens violents, fondamentalement fascistes. Et le vivre ensemble dans tout ça ? La citoyenneté ? Si leurs idées se propagent, certains habitants ne pourront même plus sortir dans le quartier, vous verrez. " Isabelle et beaucoup d'autres ici sont partisans du "pas de liberté pour les ennemis de la liberté". "On ne peut pas tolérer leurs façons de faire au nez et à la barbe de tout le monde. Ils ne se cachent même plus".
Les manifestants arrivent au point du parcours le plus proche de l’Arcadia. Sifflers et prise de parole pic.twitter.com/QDkqjBgs49
— Aurélien Poivret (@AurelienPoivret) 20 janvier 2018
Cet après-midi ils sont plus de 400 à manifester : un cortège assez hétéroclite composé de jeunes communistes, d'anarchistes, des collectifs Justice et Libertés, du NPA, certains élus strasbourgeois sont là aussi.
Et puis il y a Pierrot, venu tout spécialement de Mulhouse pour faire entendre sa voix. "Je suis inquiet de voir des gens comme ça s'installer à Strasbourg. Ils sont encore plus à droite que le FN. Ils prennent la place qu'on leur laisse, alors faut pas leur laisser de place".
Des inquiétudes que partage le maire de Strasbourg. Il a demandé au préfet de fermer l'Arcadia.
Portes closes et bouches cousues
Moi, naïvement, je pars faire un tour là bas. A l'Arcadia. Histoire de leur demander comment ils voient la chose, ces 400 personnes qui manifestent contre eux.
Sur mon chemin, je croise une dizaine de camionnettes et une quarantaines de CRS. L'Arcadia est bien protégée si les manifestants d'en face décident d'en découdre. Ou vice versa.
Ils sont une dizaine devant la porte. Il sont jeunes ... et très désagréables. J'essaie de garder bonne figure et pose mes questions. Un seul répond les autres ont la consigne de "ne pas causer". Je ne saurais pas son nom, il ne veut pas le donner. Il me dit "ne répondre qu'à certains médias, qu'ils choisissent," Me demande si j'enregistre la conversation en cachette. La rengaine du tous pourris, malhonnêtes je la connais merci.
Je repose ma question " Je suis sûr qu'ils ne sont pas 400 ahahah, les médias exagèrent tout le temps, ils doivent être 150 et à la fin ils seront 30 comme la dernière fois". Sauf que la dernière fois ça ne s'est pas passé comme ça mais bref. Et X de poursuivre "Toute façon on est là on y reste". Je ne peux rien en tirer d'autres. On me demande pas gentiment de partir. Les rangs se resserrent. J'ai la frousse, j'obéis.
Sans photo, sans rien. Sans avoir pu vraiment faire mon métier.