C'est une prouesse alsacienne et une première mondiale. Dans le cadre du projet R-Hynoca, Haffner Energy a conçu un équipement permettant de produire de l'hydrogène vert à partir de biomasse. L'outil de production a été livré ce 17 février à Strasbourg où une station-service doit voir le jour.
L'hydrogène, vendu comme le futur des énergies renouvelables, se déploie en Alsace. À Strasbourg, la production à partir de biomasse va pouvoir commencer avec la livraison, ce 17 février, de l'outil de production conçu par l'entreprise marnaise Haffner Energy. Cette première mondiale est liée au développement d'un compresseur thermique par la start up alsacienne Eifhytec, dont l'arrivée sur site est prévue en 2022. Eifhytec et R-Hynoca, la filiale de R-GDS (ex Gaz de Stasbourg), ont signé une convention de collaboration pour produire de l'hydrogène sur le site situé à la plaine des bouchers. Dès 2023, une station permettra aux usagers d'utiliser ce carburant décarboné.
Du bois à l'hydrogène
Pour produire de l'hydrogène vert, Haffner Energy a misé sur le bois, une énergie renouvelable. Son outil permet de passer du bois à l'hydrogène pour fournir du carburant aux véhicules lourds et légers. Christian Bestien, son directeur commercial, explique le procédé : "la biomasse est chauffée à plus de 500 degrés et sous l'effet de la chaleur, elle se transforme en gaz et passe ensuite dans un module de craquage. À la la sortie, on n'a plus que des petites molécules et beaucoup d'hydrogène" qui servira de carburant dans la future station.
Pour résumer, l'hydrogène (H2) fait partie d'une molécule, comme l’oxygène dans l’eau (H2O), le carbone ou la biomasse. Pour être utilisé, il doit donc être extrait grâce à différents procédés. La méthode la plus répandue est la fabrication à partir d'énergies fossiles. Cependant, elle émet des gaz à effet de serre et n'est pas neutre en carbone. Par rapport à un procédé mécanique, le compresseur thermique d'Eifhytec a plusieurs avantages : moins bruyant, moins de maintenance, et aussi moins d'investissements. Au total, l'installation a coûté 11 millions d'euros, construction, recherche et frais divers inclus.
"Un kilo d'hydrogène pour 100 km de route"
Alors une station à hydrogène publique, oui, mais pour qui ? Outre les particuliers (disposant du véhicule adéquat), les transporteurs pourront eux aussi être intéressés. "A terme, les poids lourds au diesel ne pourront plus pénétrer la zone strasbourgeoise et il existe des véhicules équivalents qui fonctionnent à l'hydrogène. Les entreprises se posent beaucoup de questions pour le renouvellement de leur parc roulant", explique Martine Mack, directrice générale de R-GDS. Autre client potentiel, les bus de la Compagnie des transports strasbourgeois (CTS). Cette dernière ne s'est pas encore prononcée mais "le dossier est étudié activement."
Car en plus d'être écologiquement neutre, l'hydrogène a la réputation d'être bon marché par rapport au diesel. "C’est d’autant plus intéressant dans la zone de Strasbourg parce qu’on sait que le diesel n’aura plus sa place pour des raisons de qualité de l’air." L'objectif de R-GDS est de vendre son kilo d'hydrogène entre huit et dix euros, "on compte un kilo d'hydrogène pour 100 km de route." Ne reste plus qu'à faire le calcul. Au total, l'unité de production fournira l'équivalent des besoins en énergie de 1.500 voitures par jour.
Mais ce carburant se heurte à plusieurs difficultés. D'abord, le prix des véhicules fonctionnant à l'hydrogène reste élevé et aucun constructeur français ne s'est pour l'instant lancé dans leur production. Au coeur du problème : la pile à combustible dont la fabrication reste chère. Ce n'est pas le seul obstacle. Pour l'instant, le territoire français dispose d'un faible réseau de stations d'avitaillement. Il existe seulement 33 stations à hydrogène opérationnelles et une trentaine de projets est en cours.