La clinique Sainte-Anne de Strasbourg propose différents types d'ateliers pour accompagner les personnes atteintes de cancer. Ils les aident à mieux passer le cap, tant sur le plan physique que psychologique. Des patients et des soignants témoignent.
S'évader un peu pendant un traitement douloureux, par l'intermédiaire de lunettes 3D, reprendre soin de son apparence, grâce à des conseils de maquillage adapté au visage éprouvé par la maladie, "des soutiens indispensables pour mieux passer le cap" disent les patients traités pour un cancer, à la clinique Sainte-Anne à Strasbourg.
Les hommes et les femmes bénéficient là d'un nouvel accompagnement depuis 2021. Dominique teste les lunettes 3D pour la première fois. "Vous voulez partir à la plage, dans un paysage de campagne, ou plonger au fond des mers ? " L'infirmière lui propose ensuite de choisir un style de musique et une durée, et dix minutes plus tard : "J'ai fait un petit voyage sympathique dans la campagne, accompagné par un orchestre symphonique. C'était très agréable, je suis très détendu." Détendu, alors qu'il est branché pour trois heures à une machine pour sa chimiothérapie. "Certains protocoles de soins sont longs et pas toujours agréables, mais malheureusement on n'a pas le choix, alors oui ça détend."
"Je me suis sentie bien, apaisée. J'ai senti que je me décrispais."
Marie-Thérèse Wilteberger, après une séance d'hypnose/relaxation
A un autre étage, Marie-Thérèse, arrivée en urgence quelques jours auparavant, est couchée dans son lit. Assise à ses côtés, Patricia Feidt, l'invite d'une voix calme et apaisante, à se détendre, à être dans l'ici et maintenant, à prendre conscience de sa respiration et de son corps. La séance détend visiblement le visage éprouvé par la maladie. "Je me suis sentie bien, apaisée. J'ai senti que je me décrispais, des épaules et des mains." A la question "Vous êtes-vous mise un peu à distance de la maladie?" elle répond sans hésiter : "Je l'ai oubliée."
Patricia Feidt, infirmière spécialisée en hypnose, est la coordinatrice des soins d'accompagnements (officiellement "soins supports") du groupe hospitalier Saint-Vincent. "Les soins de supports sont proposés aux patients tout au long du parcours thérapeutique, en complément des traitements spécifiques comme la chirurgie, chimiothérapie ou radiothérapie. L'objectif de ces supports, est d'aider ces personnes à mieux traverser la période de la maladie et de préserver le plus possible leur qualité de vie."
L'idée de ces ateliers vient des patients
C'est en écoutant les patients expliquer ce dont ils auraient besoin, que les ateliers ont été créés. "Ces ateliers sont des moments d'échange, sans jugement, entre les patients et les praticiens, mais aussi entre les malades eux-mêmes. Ce qui fait leur richesse est leur multidisciplinarité, car le patient ne va pas dire la même chose au médecin, qu'à l'infirmière, qu'à l'esthéticienne ou qu'à la psychologue. Selon la posture professionnelle dans laquelle nous on se trouve, on ne va pas entendre la même chose."
On va s'occuper des personnes malades, tout autant que de la maladie elle-même.
Patricia Feidt, infirmière coordinatrice des soins d'accompagnement
L'atelier d'esthétique, organisé en partenariat avec le Réseau oncologique d'Alsace est un moment privilégié, proposé une fois à chaque personne en traitement. Marion Sirco et Céline Mazur en sont les animatrices. Les deux socio-esthéticiennes passent deux heures avec les patientes. "Les personnes ressortent non seulement maquillées, mais avec un réel éclat et des étoiles plein les yeux. Avec la maladie et les traitements, elles en oublient un peu leur féminité et leur apparence. Alors se retrouver ensemble ici, à échanger et partager, elles ressortent avec plus de confiance en elles, l'estime de soi revient et l'envie de reprendre soin d'elle mêmes."
En deux heures, elles apprennent des techniques de maquillage qu'elles ne connaissaient pas avant, dont elles n'avaient pas besoin. Véronique est en fin de traitement : "J'ai perdu pas mal de cheveux, et maintenant je commence à avoir des trous dans mes sourcils, alors si ici on peut me dire comment faire pour me sentir belle pendant mon traitement, c'est avec plaisir."
Un atelier "Belle et bien" pour reprendre soin de soi
Pour Christine, l'atelier se révèle être un moment charnière. Une fois le trait de liner posé, quelque chose semble changer pour elle. "Ce regard, je l'avais avant. Avant la maladie. La maladie a pris le dessus, alors j'ai laissé de côté les soins de mon visage, même les plus simples...et là se toucher le visage, se faire du bien, oui ça revient."
Beaucoup de changements physiques surviennent au fil des traitements. Dans cet atelier de soins esthétiques, elles se confient à ce sujet : "Me regarder dans un miroir le matin, ce n'est pas forcément quelque chose que je fais avec plaisir" rajoute Christine, "c'est quelque chose que je redécouvre ici."
Peut-être un nouveau départ pour elle qui tient à préciser le rôle essentiel du personnel, des encadrants, des soignants, des spécialistes qui font tout pour créer ces bulles de bien-être. Pour les personnes en cours de traitement contre le cancer, ces ateliers, qui existent toute l'année, font partie intégrante de la guérison.