INTERVIEW. Franck Leroy, président du Grand Est : "on ne peut pas laisser des commerces et des services fermés suite aux émeutes"

L'ancien maire d'Epernay est président de la Région Grand Est depuis janvier 2023. Il revient au micro de France 3 Champagne-Ardenne sur les actions qu'il souhaite mettre en place concernant l'économie et l'environnement dans le Grand Est. Il en profite pour réagir sur l'actualité brûlante liée à la mort de Nahel, et aux violences urbaines que cela a engendré.

Six mois, et déjà l'heure d'un premier bilan. Franck Leroy, l'ancien édile (divers droite) de la ville d'Epernay, a connu une ascension fulgurante jusqu'au poste de président du conseil régional du Grand Est, qu'il assume depuis le mois de janvier 2023. 

Avant de dresser ce bilan, l'élu apporte sa réaction face aux violences urbaines qui ont secoué le pays et la région ces derniers jours, suite à la mort de Nahel à Nanterre et qui ont vu des élus être agressés directement ou indirectement. L'illustration la plus prégnante concerne le maire de l'Haÿ-les-Roses, dont la famille a été victime d'une tentative d'assassinat à la voiture bélier. 

Est-ce qu'en tant qu'homme politique, vous vous sentez visé par toute cette colère ? 

"C'est un déchaînement de violence. Que ce soit à l'égard de la famille du maire de l'Haÿ-les-Roses, ou encore de l'ensemble des communes touchées par cette violence, n'est pas acceptable. Nous vivons dans un Etat de droit, dans laquelle la justice existe. Le drame que représente la disparition du jeune Nahel est terrible pour sa famille, pour ses proches et pour la Nation tout entière. Mais rien ne justifie un tel déchaînement de violence. Il faut y mettre fin et j'ai confiance dans l'action des pouvoirs publics pour le faire. Celles et ceux qui pillent les supermarchés ne le font pas en souvenir de Nahel. Il y a de la délinquance, il y a des criminels et s'en prendre à une famille sans défense, c'est lâche et ça doit être puni". 

Franck Leroy, qui a annoncé par ailleurs ce lundi 3 juillet sur les réseaux sociaux qu'il proposerait devant l'assemblée du conseil régional un fonds d'aide d'urgence pour les élus et les commerçants à hauteur de dix millions d'euros. La somme est répartie équitablement : cinq millions pour les commerçants, et cinq millions pour les entreprises publiques de coopération intercommunale. 

Nous vivons dans un Etat de droit, dans laquelle la justice existe. Le drame que représente la disparition du jeune Nahel est terrible pour sa famille, pour ses proches et pour la Nation tout entière. Mais rien ne justifie un tel déchaînement de violence

Franck Leroy, président de la région Grand Est

"On a des écoles qui ont brûlé, on a des crèches qui ont brûlé, on a des équipements publics qui ont brûlé ou qui ont été endommagés. Il est important pour les communes de pouvoir très vite réinvestir, et de redonner un fonctionnement à ces équipements publics. De l'autre côté, nous avons des commerçants, des artisans dont l'outil de travail - le commerce - a été ruiné par les incendies. Là aussi, il est important qu'ils sachent que la région Grand Est est de leur côté. Il ne s'agit pas de payer à la place des assurances ou de payer à la place des délinquants, mais de permettre à ces activités de redémarrer au plus vite. Avec l'été qui arrive, on ne peut pas imaginer qu'ils restent trois mois fermés. J'espère que le Conseil régional votera cette proposition.

40% des communes du Grand Est ont perdu leurs services de proximité en 40 ans. Comment leur donner envie de rester ou de revenir ? 

"C'est un phénomène assez ancien, mais depuis, nous avons beaucoup investi, notamment dans la ruralité. On a par exemple déployé la fibre optique partout. Il n'y a pas un village du Grand-Est aujourd'hui qui n'a pas accès à la fibre optique. On soutient évidemment toutes les dynamiques territoriales, toutes les communes qui investissent. On s'apprête à la rentrée à annoncer un grand plan pour la ruralité, parce que nous croyons dans une ruralité qui retrouve des couleurs, qui gomme cet aspect parfois passéiste qu'on lui prête. Je peux comprendre que beaucoup d'élus ont en tête le souvenir de la ruralité d'autrefois, plus florissante, où il y avait plus d'emplois, plus de services publics. Les choses ont changé maintenant, il faut construire une dynamique nouvelle."

Comment pousser vers la réindustrialisation de la région ? 

"Elle est déjà très spectaculaire dans le Grand Est. Lors du sommet "Choose France" du mois de mai dernier, 20% des projets qui ont été annoncés concernent notre région qui ne compte que 11% de la population française. C'est dire qu'on a quasiment fait le double de notre capacité normale, en accueillant des projets porteurs d'avenir. On va par exemple fabriquer dans le Grand Est des panneaux photovoltaïques de conception et de fabrication européenne. On va également construire demain des usines qui permettent le recyclage de ce plastique que l'on trouve sur les plages du monde entier. On va investir dans le luxe et dans la cosmétique, je pense à l'usine Clarins de Troyes qui est un projet emblématique.On pourrait aussi parler d'Hermès à Charleville-Mézières, de Cibox qui va fabriquer entre 150 000 et 250 000 vélos électriques dans les Ardennes. Bref, des réussites incontestables, et en même temps, nous préparons l'avenir avec la construction d'un nouveau centre de recherches à Pomacle-Bazencourt (51), qui coûtera 18 millions d'euros et financé par la région.

L'objectif de la région : réduire de 45% la consommation d'énergie dans les transports d'ici 2050, comment souhaitez vous mettre cela en place ?

"Cela passera notamment par le développement des trains et des TER, qui a déjà commencé partout. Si l'on prend l'exemple des TER, on travaille secteur par secteur. A Strasbourg par exemple, par rapport à l'automne dernier, il y a 650 trains de plus par semaine. C'est en déployant une offre compétitive, qu'on va convaincre un certain nombre de particuliers de ne plus aller en ville en voiture, mais d'y aller avec le train. Ce sera aussi le cas à Reims. Partout où nous déployons le train, nous l'accompagnons en amont par le biais d'aides permettant au territoire d'investir dans le vélo. 55% des habitants de notre territoire sont à moins de cinq kilomètres d'une gare. Pourquoi ne pas laisser la voiture à la maison et prendre le vélo ? Et puis la mobilité du quotidien, ça n'est pas tout : il faut aussi entamer la décarbonation de l'industrie, et la transformation de notre système énergétique. Autant dire, du pain sur la planche."  

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