Après presque deux mois de confinement, les comptes des ONG et associations caritatives alsaciennes sont dans le rouge. Pour continuer à vivre, elles en appellent aux donateurs pour renflouer leur trésorerie et proposent parfois des initiatives originales.
Si la crise sanitaire a des effets sésastreux sur l'économie et les entreprises, les associations caritatives et ONG connaissent également des jours sombres. En Alsace, certaines associations estiment ne pas pouvoir s'en sortir sans la générosité du public, elles multiplient les appels aux dons et les initiatives pour renflouer leur trésorerie.
C’est le cas de la fondation Saint-Vincent de Paul qui gère seize établissement en Alsace et en Lorraine. Depuis fin mars, elle a lancé un appel aux dons pour acheter du matériel d’urgence destiné à ses quatre cliniques et douze maisons de retraite. Mais également pour financer des plateaux-repas aux soignants. Dans le rouge aussi, Caritas Alsace. L’association en réseau avec le Secours catholique fait face à une diminution des stocks de ses épiceries solidaires. Elle appelle aux dons pour acheter et distribuer des chèques-service aux familles démunies. Ces chèques leurs permettent de faire leurs courses dans les magasins ouverts.
Premier appel aux dons depuis la création d’Emmaüs en 1954
Même situation critique pour Emmaüs Mundolsheim (Bas-Rhin). Le chantier d’insertion de 90 salariés est à l’arrêt depuis le 17 mars. En temps normal, l’activité économique d’Emmaüs Mundo repose sur la collecte, le tri et la revalorisation des objets pour la vente. L’arrêt de ces activités plonge la structure dans une grande difficulté. En deux mois, "une perte de 150.000 euros", précise le directeur, Thierry Kuhn. Malgré cela, il a tenu à maintenir les salaires de ses employés qui travaillent à minima 24 heures par semaine, payés au Smic. Thierry Kuhn a maintenu aussi leur accompagnement social et professionnel. Sur le site Hello Asso, Emmaüs Mundo a fixé le montant de la cagnotte à 50.000 euros, les dons sont possibles jusque fin juin. Emmaüs Mundo a lancé sa campagne après un appel du pied de fidèles de l’association. En quelques jours, la cagnotte affiche 3.000 euros. Parallèlement, Emmaüs France a aussi lancé un appel aux dons dans le but de redistribuer l’argent dans les différentes communautés. Une première depuis la création d’Emmaüs par l’abbé Pierre en 1954. Thierry Kuhn rappelle que le principe des premiers compagnons étaient de vivre du fruit de leur travail.
Vente de plants solidaires
La solidarité est en ordre de marche et pas simplement par le biais des donateurs : Emmaüs Mundo tient habituellement un atelier de réinsertion au centre de détention d’Oermingen. Début avril, des détenus ont proposé de confectionner des masques. Une première livraison de 200 masques a permis d'équiper les bénévoles de plusieurs associations. Ils seront aussi distribués dans un institut d’aveugles et à des personnes sans abris ou en foyer d’hébergement. L’atelier devrait se poursuivre pendant toute la durée du confinement.Autre action avec le foyer d’accueil spécialisé d’Illkirch : la vente de plants solidaires.
Déjà plus de 1.700 pré-commandes ont été enregistrées pour des plants maraîchers qui seront à récupérer en drive sur le site de Mundolsheim. Cette vente permettra de financer un projet de ferme solidaire dans la Vallée de la Bruche et les activités du foyer d'accueil d’Illkirch. Pour une demande spécifique de plants : plants.solidaires@emmaus-mundo.com.
A Colmar, l’association Espoir en difficulté
A l'instar d'Emmaüs Mundo, l’association Espoir a dû stopper nette ses activités de ramassage, tri, réparation et mise en vente de ses produits. Après deux mois de confinement, les pertes de rentrées financières deviennent colossales : près de 120.000 euros par mois.Alors, la présidente Renée Umbdenstock n’a pas hésité à demander de l’aide à ses donateurs réguliers (Espoir fait une campagne de dons chaque fin d’année) et à tout ceux qui souhaitent leur donner un coup de pouce. De quoi, entre autres, financer le centre d’aide par le travail (Cava) qui rétribue une cinquantaine de coopérateurs.
"Ces personnes très fragilisées sortent bien souvent de la rue et transitent par des foyers. Ils ne relèvent pas du droit du travail. Ils ont un statut particulier qui nous permet de leur verser une rétribution. Les contrats vont de 18 à 35 heures et ils perçoivent en moyenne 500 euros par mois", explique la présidente jointe par téléphone.
L’association Espoir continue de leur verser 70 % de leur pécule. Les contributeurs la recevront encore en mai.On est dans le flou
- Renée Umbdenstock, présidente de l'association Espoir
Renée Umbdenstock doute fortement que les comptes seront à l’équilibre à la fin de l’année. Elle ne sait pas quand redémarreront les services espaces vert et menuiseries qui permettent de rentrer de l’argent. Ces prestations pour les particuliers ou les communes aide beaucoup l’association.
En revanche, à partir du 11 mai les déchetteries vont rouvrir. Et l’association Espoir dispose dans deux d’entre elles de "ressourceries". Ce sont des endroits où les gens peuvent laisser mobiliers, vaisselles…tout ce qui peut encore servir et être réparé. Charge aux coopérateurs de remettre ces pièces en état au centre d’aide par le travail.
Tant que le virus est actif, la présidente refuse de faire travailler les 200 bénévoles pourtant indispensables au bon fonctionnement de l’association. "Ce sont en général des retraités. Nous leur avons demandé de rester chez eux. Certains sont impatients et aimeraient aider. Mais c’est encore dangereux."
Impossible de savoir quand les activités pourront redémarrer normalement. Renée Umbdenstock constate que les gens ont envie d’aider. Elle compte sur cet appel aux dons sans s’avancer sur un montant. De toute façon, Espoir va souffrir de la situation. Alors, elle espère… et attend aussi un geste de l’Etat pour son association reconnue d’utilité publique. Difficile de se projeter pour l’avenir.