Une expérimentation de dépistage sérologique a été menée dans dix Ehpad du Haut-Rhin entre le 14 et 17 avril, sous l'impulsion du conseil départemental. La Haute Autorité de Santé ne validant pas encore ces tests, le département a décidé de privilégier les tests virologiques, par prélèvement nasal.
Le conseil départemental du Haut-Rhin a démarré une expérimentation de tests sérologiques dans dix Ehpad le 14 avril, mais deux jours plus tard, la Haute Autorité de Santé les déclarait insuffisamment fiables et efficaces pour être homologués pour l'instant. L'Agence régionale de santé du Grand Est a communiqué dans le même sens ce 20 avril, affirmant que "le défaut de performance d’un test peut entraîner des conséquences graves pour les personnes se croyant faussement immunisées. Le recours à ces tests sérologiques n’est pas recommandé tant que leur fiabilité n’a pas été confirmée par les autorités sanitaires compétentes".
Alors il n'est désormais plus question de les utiliser à grande échelle dans les Ehpad du département, la présidente Brigitte Klinkert l'annonce d'emblée lors du bilan de l'expérimentation qu'elle dressait ce mardi 21 avril, soulignant "l'évolution constante des connaissances des experts sur ce virus et donc l'adaptation permanente des décisions en fonction de leurs avis".
Offrir une cartographie de la situation dans dix établissements
Pour autant, l'élue refuse de voir cette campagne de dépistage, qui a coûté 42.000 euros, comme un coup pour rien. Car elle permet d'établir une cartographie inédite de la maladie dans dix établissements pour personnes âgées et offre ainsi de nouvelles informations sur sa progression dans ces résidences. "D'abord, nous avons répondu à une très forte demande des directeurs et personnels d'Ehpad, explique Brigitte Klinkert. Les personnes âgées sont dans une situation de solitude et de détresse parfois, qui pèse aussi sur leur santé. Il y a de gros risques de dépression, de dénutrition. Alors il faut agir, avec les connaissances du moment, et donc toute l'humilité nécessaire face à ce virus qu'on ne connaissait pas il y a quinze jours et qui évolue, qui fait évoluer les connaissances, les avis, chaque jour.Il faut essayer d'avancer, nous avons voulu prendre nos responsabilités. Explorer toutes les pistes, pour espérer améliorer très vite le bien-être de nos personnes âgées, c'est une priorité."Nous ne regrettons pas d'avoir lancé ces tests.
- Brigitte Klinkert, présidente du conseil départemental du Haut-Rhin
Plus de 50% de résidents testés positifs dans quatre Ehpad
Ils ont été menés dans dix Ehpad volontaires donc, aux profils différents : géographiquement disparates, et touchés très différemment par la maladie. Au total, 1.000 résidents et 900 membres du personnel ont été testés. Il en ressort que dans un tiers de ces établissements, de 50 à 75% des résidents, et plus de la moitié des personnels soignants, ont développé des anticorps et ont donc été touchés par le coronavirus. Le deuxième tiers compte 10 à 35% environ de cas positifs. Enfin, trois établissements ont été épargnés, avec moins de 3% de personnes testées positivement.L'établissement le plus impacté a recensé 76% de résidents testés positifs et 62% du personnel. A l'inverse, le moins touché ne déplore aucun résident positif et 2% du personnel.
Les diagnostics des médecins le plus souvent confirmés
"Nous avons été surpris de voir autant d'établissements avec un si grand nombre de cas positifs, ni à la forte hétérogénéité des situations, d'un établissement à l'autre, vu comme le virus a frappé notre département, souligne le docteur Alain Couchot, qui préside la commission solidarité et autonomie au conseil départemental du Haut-Rhin. L'enseignement que nous pouvons en tirer, déjà, c'est la forte corrélation entre les diagnostics cliniques des médecins et les résultats de ces tests. Ça veut dire qu'il faut faire confiance aux médecins, c'est très rassurant, pour eux et pour tous."1.000 euros pour aider les Ehpad à accueillir les familles en sécurité
Le but de cette expérimentation était d'accompagner les établissements dans un assouplissement des mesures de confinement, "pouvoir faire revenir du lien social dans les Ehpad, tout en maintenant la sécurité sanitaire de tous, résidents, personnels et familles".Brigitte Klinkert dit vouloir poursuivre dans cette voie, en accompagnant notamment les Ehpad dans l'accueil des familles, à nouveau possible depuis le 20 avril. Une subvention de 1.000 euros pourra être accordée à chaque établissement pour pouvoir s'équiper en matériel de protection surtout.
547 décès dans les Ehpad du Haut-Rhin
Concernant les tests, les PCR, par prélèvement nasaux, seront désormais privilégiés, en attendant que les connaissances et les avis de la Haute Autorité de Santé ne s'affinent au sujet des tests sérologiques. "Nous sommes le département le plus touché, avec 547 décès dans nos Ehpad. Nous sommes dans un contexte d'urgence sanitaire, insiste la présidente du conseil départementale. J'ai demandé au ministre de la Santé à ce que nos Ehpad soient prioritaires dans l'obtention de tests PCR. Nous pourrons tester tout le personnel d'un Ehpad, dès lors qu'un nouveau cas apparaîtra dans des établissements où il n'y en avait pas eu depuis deux semaines. Ailleurs, la doctrine nationale autorise ces tests aux seuls Ehpad vierges de tout cas, qui seraient confrontés à leur tout premier cas."
Les laboratoires vétérinaires départementaux prêts pour les tests PCR
La région se met en ordre de marche pour pouvoir réaliser un maximum de tests très rapidement. Les laboratoires vétérinaires départementaux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, qui travaillent ensemble, attendent leur homologation - "d'ici fin de semaine, nous l'espérons", précise Brigitte Klinkert - pour venir appuyer les laboratoires de ville privés qui peuvent déjà les pratiquer. "Nous pourrons analyser 100 à 150 tests par jour dès le feu vert, puis rapidement 400 à 500...".Par ailleurs, même si ce n'est pas la préconisation nationale, ni départementale, les directeurs d'Ehpad qui le souhaitent peuvent continuer à réaliser des tests sérologiques pour adapter les activités sociales dans leur résidence, "avec toutes les précautions d'usage".