Le rougissement des sapins des Vosges prend de l'ampleur. Sécheresse et chaleur de l'été dernier ont "grillé" les sapins en leur donnant une couleur rouille bien visible dans le paysage. Dans certains secteurs, comme la vallée de Masevaux, le phénomène inquiète de plus en plus les agents de l'ONF.
Le constat est de plus en plus alarmant sur les pentes du massif vosgien: le rougissement du sapin observé depuis l'automne dernier, conséquence d'un été sec et chaud, s'accélère avec les dernières journées caniculaires de ce mois de juin. Les arbres manquent d'eau, perdent leurs aiguilles, sont affaiblis et finissent par sécher sur pied. Ils sont literralement grillés. Le sapin, arbre exigeant en matière d'humidité de l'air, est le plus touché mais cette méteo difficile affecte aussi le hêtre en plaine. L'épicea est attaqué, quant à lui, par un insecte, le scolyte, qui creuse des galeries dans son écorce.
Tout le massif vosgien est concerné par ce phénomène de rougissement du sapin, en particulier sur les versants chauds ou en zones rocheuseuses. Dans la vallée de Masevaux, le désastre atteint des proportions exceptionnelles. Ici, 4.000 m3 de bois attendent d'être prélevés, l'équivalent de quatre années de récolte et un manque à gagner important. "C'est 120.000 euros que nous dégageons annuellement en temps normal. Aujourd'hui si l'exercice se solde par un équilibre budgétaire, vu le cours, c'est qu'on aura bien négocié la chose, mais on aura beaucoup de mal", explique le maire de Masevaux, Laurent Lerch.
La commune de Masevaux ne sera malheureusement pas la seule à avoir du mal à écouler son bois, car le marché est totalement saturé en Europe où le phénomène de rougissement s'est généralisé. Une cellule de crise a bien été mise en place dans le Grand Est depuis un an pour essayer de coordonner l'activité de commercialisation mais le manque de débouchés parait, pour l'instant, insoluble.
Au désastre économique qui s'annonce s'ajoute le désastre touristique. Pour faire face à l'ampleur du problème, à l'ONF on pense qu'il faut s'appuyer sur la faculté naturelle d'adaptation du sapin des Vosges. "Certains individus sont capables de résister à cette sécheresse, notre travail va être de les sélectionner. Il faut identifier ces caractères chez ces individus, ce qui nous permettraient de trouver les sapins les plus résistants", explique Rodolphe Pierrat, adjoint au directeur territorial ONF du Grand Est. Une perspective plutôt encourageante malgré les incertitudes que réservent l'évolution des conditions climatiques dans les décennies à venir. "Il est difficile de décider aujourd'hui ce qu'il faudrait prévoir pour les 150 années à venir", confie Rodolphe Pierrat.