Ce mercredi 5 octobre 2022, la cour d'appel de Colmar a confirmé les peines retenues contre les experts-comptables de la maison Albrecht. Par ailleurs, ils écopent d'une condamnation supplémentaire dans ce dossier complexe.
Dans la tentaculaire affaire Albrecht, la cour d'appel de Colmar a rendu le 5 octobre 2022 sa décision concernant les experts-comptables de la S.A Lucien Albrecht. Condamnés en 2020 pour complicité de délit de banqueroute pour avoir fait passer en comptabilité une opération fictive, ces derniers ont également été jugés coupables de faits pour lesquels ils avaient été relaxés en première instance.
Le dossier, très complexe, repose sur des faits d'impayés et de fraudes comptables commis par la maison Albrecht. 140 viticulteurs alsaciens ont été lésés et n'ont jamais reçu leur argent. On estime le préjudice total à environ 12 millions d'euros. Si l'ancien négociant Jean Albrecht s'est désisté juste avant l'audience, ses experts-comptables ont été jugés en appel et condamnés pour de nouveaux faits : ils ont volontairement surévalué les stocks de vin de la maison.
Ce chef de condamnation supplémentaire est une "très bonne nouvelle" pour Guillaume Tumerelle, avocat de cinq viticulteurs et de la Confédération paysanne dans ce dossier : "Ce point est très important car il permet au liquidateur de se retourner contre les experts-comptables pour l'indemnisation du préjudice." Ce liquidateur judiciaire sera chargé de récupérer les fonds pour les reverser aux viticulteurs.
Ils ont déguisé les comptes de l'entreprise pour qu'ils soient plus présentables.
Guillaume TumerelleAvocat de cinq viticulteurs et de la Confédération paysanne
La condamnation pour avoir fait passer une opération comptable fictive de plus de 500.000 euros a été maintenue, et la peine prononcée en 2020 reste la même, à savoir douze mois de prison avec sursis et 20.000 euros d'amende : "Ils ont déguisé les comptes de l'entreprise pour qu'ils soient plus présentables", résume Guillaume Tumerelle.
Parmi eux, André Schlegel, de Soultzmatt (Haut-Rhin). Il estime avoir perdu 50.000 euros dans cette affaire : "Dix ans ont passé, et je pense qu'il faudra attendre encore autant de temps. Mais ce jugement en appel va permettre de réactiver les dossiers en dormance."
Un dossier encore loin d'être élucidé
Le deuxième volet pénal de l'affaire Albrecht doit maintenant s'ouvrir. Il concerne le système de revente à perte qu'aurait utilisé la maison Albrecht, en revendant moins chères des bouteilles qu'elle venait d'acheter, ce qui est illégal : "La Confédération paysanne soutient que certains acteurs de la filière en ont profité et on fait des bénéfices là-dessus. On veut savoir à qui profite le crime", commente Guillaume Tumerelle. Le juge d'instruction mène actuellement des investigations sur ce sujet.
Les victimes espèrent que lors de ce deuxième procès, elles pourront se constituer partie civile, ce qui leur a été refusé lors du procès en appel de ce 5 octobre 2022.