Haut-Rhin : les professeurs toujours opposés à la fermeture du lycée Charles de Gaulle de Pulversheim

À la fin du mois de mars 2023, les conseillers régionaux de la région Grand Est se prononceront sur la fermeture du lycée professionnel Charles de Gaulle de Pulversheim (Haut-Rhin). Si rien n'est encore officiel, plus personne ne se fait d'illusions.

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Ce lundi 6 mars 2023, les syndicats d'enseignants du Grand Est ont été informés par le recteur de l'Académie de Strasbourg que le président de la région Frank Leroy soumettra au vote fin mars la fermeture dans la région de six lycées à compter de septembre 2024. Parmi eux, le lycée Charles de Gaulle de Pulversheim, au nord de Mulhouse (Haut-Rhin).

Une décision que la région justifie par la baisse démographique dans le Grand Est : "Entre 2010 et 2020, le nombre de naissances a diminué de 18%. Et ces bébés, ce sont nos lycéens de demain", fait savoir Christèle Willer, vice-présidente de la région en charge des lycées durables et de l'éducation.

Autre argument avancé, le coût de l'énergie du lycée haut-rhinois : "Nous regardons l'ensemble de nos bâtiments pour voir lesquels sont les plus énergivores. Le lycée de Gaulle coûte 1.400 euros par élève, contre 575 pour un autre élève ailleurs dans le Grand Est."

Nos filières sont toutes pleines.

Christophe Toranelli

Maire de Pulversheim et enseignant au lycée Charles de Gaulle

Mais la région s'appuie surtout sur le taux d'utilisation du lycée, qui est selon elle de 39%. Un chiffre à prendre avec des pincettes, car il ne signifie pas que les classes sont vides, bien au contraire. D'après Christophe Toranelli, maire de Pulversheim et professeur au lycée depuis 20 ans, la capacité d'accueil est excellente, de l'ordre de 92%. : "Nous avons 340 élèves pour une capacité de 370, ce qui en fait un lycée à taille humaine. Nos filières sont toutes pleines. Le delta manquant concerne les mentions complémentaires."

L'établissement propose quatre formations, qui seront réparties en 2024 dans quatre établissements aux alentours : 

  • Les métiers de la chaudronnerie iront au lycée Gustave Eiffel de Cernay
  • Ceux de l'électricité au lycée Charles Stoessel de Mulhouse
  • Les élèves des métiers de la sécurité rejoindront le lycée Louis Armand de Mulhouse
  • La 3e prépa métiers sera déplacée au lycée Bugatti d'Illzach

"Nous ne voulons pas fermer les filières. Alors, nous les déplaçons dans un secteur de 10-15 km aux alentours, dans des lycées qui ont de la place et qui ont du sens par rapport aux filières", continue Christèle Willer.

Des arguments difficilement entendables pour cet enseignant dans les métiers de la sécurité : "Les élèves s'entendent bien ici, nous avons un climat scolaire et une mixité sociale excellents. Et je suis certain que les élèves vont perdre en qualité de vie si leurs filières sont transférées. Ils vont se retrouver dans un lycée de 1.200 élèves, avec on ne sait pas quels profs... Et concernant le lycée Stoessel, c'est un établissement très difficile."

Réhabiliter le lycée plutôt que de disperser les filières ?

Ce professeur, qui enseigne à Pulversheim depuis 1999, pointe un autre problème : "Pour la chaudronnerie, il va falloir démonter tout notre matériel pour le remonter ailleurs, ça va coûter très cher. Concernant les métiers de la sécurité, nous travaillons sur notre atelier depuis 15 ans, que nous avons adapté à nos besoins. Tout refaire, ça ne va pas se faire en un été !". Le coût de tous ces transferts est estimé à 14 millions d'euros, contre 3 millions annoncés précédemment.

Les enseignants demandent alors à ce que le lycée soit réhabilité. Une option qui serait selon eux moins coûteuse que de déplacer les filières : "Ça fait des années qu'on alerte pour dire qu'il faut un plan de rénovation énergétique dans le lycée", pointe Valérie Poyet, du syndicat d'enseignants FSU dans le Haut-Rhin. Le principal problème réside dans l'internat, une véritable passoire énergétique. Le bâtiment est d'ailleurs quasiment vide, ce qui explique la faible capacité d'accueil que la Région avance.

Quel avenir pour les professeurs ? 

Dans ce cas, pourquoi ne pas faire ces travaux directement au lycée ? Christèle Willer répond que cela signifierait un investissement important pour trop peu d'élèves : "S'il s'agissait d'un lycée plus gros, le coût par élève serait moindre. Nous allons d'ailleurs faire ce genre de travaux dans d'autres établissements du secteur. Nous espérons que le bâtiment chaudronnerie qui sera construit à Cernay sera autonome énergétiquement."

Le prof d'anglais ou de français, il ne peut pas se couper en quatre.

Un enseignant du lycée

Si les élèves seront dispatchés ailleurs, c'est également le cas pour les enseignants. "On suivra sans doute la filière qui sera transférée, souffle l'un d'eux. Mais pour ceux qui n'enseignent pas dans les spécialités, c'est le point d'interrogation. Le prof d'anglais ou de français, il ne peut pas se couper en quatre. On attend des réponses du rectorat. Mais certains collègues se posent la question de partir et de faire une mutation avant qu'elle ne soit forcée."

On apprend tout par voie de presse, on a l'impression d'être méprisés.

Un professeur du lycée

Surtout, les professeurs du lycée Charles de Gaulle ne veulent pas perdre l'ambiance familiale qui règne dans l'établissement, où beaucoup travaillent depuis une vingtaine d'années : "On s'y sent bien !", résume un professeur qui regrette surtout le manque de communication du rectorat et de la région : "On apprend tout par voie de presse, on a l'impression d'être méprisés. Ce qu'on demande, c'est que le président de la région vienne sur place dans un premier temps. Comment juger uniquement avec des tableaux Excel ?"

Une prochaine action n'est pas à exclure

Autre question : l'avenir du lycée. Pour l'instant, rien n'est décidé : "Il est difficile de réfléchir à un site de cinq hectares qui reste la propriété de la Région. Le président Frank Leroy nous conseillait en visioconférence de trouver des solutions pour faire un centre de formation. Mais il existe déjà ce centre de formation, c'est le lycée !", s'insurge Christophe Toranelli. 

"Nous sommes en discussion avec la mairie et M2A, répond de son côté Christelle Willer. Il n'est pas question de laisser tomber notre territoire. Dans tous les cas, nous voulons le meilleur pour les formations de nos jeunes." 

Si les enseignants n'obtiennent pas les réponses à leurs questions prochainement, ils n'excluent pas une nouvelle journée de mobilisation dans les semaines à venir.

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