"Le gaz hilarant, c'est marrant, plus rien autour n'existe" : l'usage du protoxyde d'azote dans le viseur du Sénat

La mode du gaz hilarant ou protoxyde d'azote cartonne chez les ados. Dans les rues, on voit ces capsules grises traînant sur les trottoirs et dans les caniveaux. Utilisées en cuisine, elles sont remplies d'un gaz aux propriétés euphorisantes. Le Sénat veut en interdire la vente aux mineurs.

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Ces petites capsules grises, qu'on voit traîner en ville sur les trottoirs, restent une énigme pour le commun des mortels. Pourquoi voit-on de plus en plus de ces cartouches en forme d'ampoule abandonnées par terre? La réponse est simple : elles sont remplies d'un gaz, le protoxyde d'azote, plus communément appelé gaz hilarant ou "proto". Chez les jeunes, il fait un carton depuis quelques mois, par effet de mode, sans doute, puisque ce gaz est connu depuis longtemps. Or, le Sénat veut en interdire la vente aux mineurs.
 


Un gaz utilisé en médecine

En médecine, il est couramment utilisé comme anesthésiant : "On l’utilise depuis très longtemps, c’est un gaz anesthésiant, ça donne une légère euphorie, ça insensibilise à la douleur. On l'a beaucoup utilisé dans les camions de Samu pour faire une anesthésie légère des patients", explique le docteur Bruno Leroy, médecin au service de soins de l'association Le Cap, à Mulhouse. Le protoxyde d'azote est encore utilisé de nos jours en anesthésie pour endormir les patients. Cependant, certaines études ont montré que l'utilisation du protoxyde d'azote peut entraîner des effets nocifs. Cela a conduit de nombreux anesthésistes à remettre en question l'utilisation systématique de ce gaz dans les salles d'opération.
  

Vendu dans le commerce sous forme de capsule

Ce même gaz, en vente libre dans le commerce sous forme d'aérosols alimentaires, est utilisé dans les cartouches pour siphon à chantilly. Il est proposé à la vente pour quelques euros à raison de dix cartouches. Sur internet on trouve même des lots de 600 cartouches pour moins de 200 euros. "Tout comme beaucoup de gens, j’ai mis du temps à percuter quand on me racontait que les jeunes utilisent du protoxyde d’azote, je me dis qu’il n’y a pas de vol de matériel médical à grande échelle. Je n’avais pas réalisé que c’était avec les cartouches pour les crèmes chantilly", ajoute le docteur Bruno Leroy.


Un usage détourné

Très facile, donc, pour n'importe qui de s'en procurer et d'en faire un usage détourné. Le gaz qu'elles contiennent est déversé dans un ballon de baudruche puis inhalé. Quelques inhalations provoquent une euphorie comparable à une ivresse, accompagnée d’un fou rire irrépressible. Sur internet, on trouve même des tutoriels expliquant la manière de l'utiliser pour ceux qui n'auraient pas encore compris.
 

"L'effet est immédiat, comme le poppers"

A la sortie d'un lycée de Mulhouse, quelques-uns ont bien voulu témoigner pour nous faire part de leurs expériences.
Alice, lycéenne, 17 ans : "J'en ai pris une fois en soirée. C'est marrant dix minutes. Plus rien autour n'existe. Il n'y a pas d'effet addictif, personne ne se dit «j'ai besoin d'en reprendre»".
Nicolas, lycéen, 17 ans : "Moi, c'est pareil, c'est au cours d'une soirée que  j'ai pu tester le produit. C'était pour rigoler. L'effet est immédiat, comme le poppers, l'effet ne dure  pas très longtemps. Pour moi, c'est juste une mode qui vient des clips de rappeurs".


Perte de connaissance, risques de chute

Jusque-là, rien d'illégal. Mais cela pourrait bien changer. En novembre 2019, le ministère de la Santé a publié un communiqué mettant en garde contre les dangers de cette pratique, exposant à deux types de risque majeur :
  • des risques immédiats : asphyxie par manque d'oxygène, perte de connaissance, brûlure par le froid du gaz expulsé de la cartouche, perte du réflexe de toux (risque de fausse route), désorientation, vertiges, risque de chute ;
  • des risques en cas d'utilisation régulière et/ou à forte dose : atteinte de la moelle épinière, carence en vitamine B12, anémie, troubles psychiques.


Des cas graves

Dans les Hauts-de-France, région particulièrement touchée par ce phénomène, des cas graves ont été identifiés chez des gros consommateurs. A chaque fois, c'est le même type de symptômes qui revient : "Une sclérose de la moelle épinière, normalement chargée de transmettre les informations au cerveau pour commandes motrices", indique le docteur Deheul du centre d’addictovigilance de Lille.
 

Une loi, bientôt, pour encadrer la vente ?

Face à ce qui pourrait devenir un problème de santé publique, le Sénat a adopté, le 11 décembre à l'unanimité, une proposition de loi visant à interdire la vente de ce gaz aux mineurs, y compris sur les sites de commerce en ligne. Elle doit encore être soumise à l’Assemblée nationale, avant d'être définitivement adoptée. Le non-respect de cette interdiction est assorti d’une peine d’amende de 3.750 euros. Les industriels auraient en outre l’obligation d’indiquer sur l’emballage la dangerosité du produit. 
   
 
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