VIDEO. "Ça donne du sens à ma vie" - 70 ans après l'appel de l'abbé Pierre, les bénévoles poursuivent son œuvre à Emmaüs Cernay

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Sujet Rund Um en alsacien sous-titré. ©France Télévisions

À Cernay, soixante bénévoles donnent de leur temps chaque semaine pour faire vivre la plus ancienne communauté Emmaüs de France hors de Paris. Des femmes et des hommes, toujours portés par les valeurs du fondateur, l'abbé Pierre.

Dans l'un des hauts bâtiments d'Emmaüs à Cernay (Haut-Rhin), un grand portrait de l'abbé Pierre descend du plafond. L'ombre d'Henri Grouès, c'est son vrai nom, continue de planer sur la communauté, qu'il a fondée en 1955. C'était alors la toute première à voir le jour en province, six ans après la création de l'association Emmaüs et quelques mois après le célèbre appel à l'aide lancé par l'abbé sur les ondes de Radio Luxembourg.

Le 1er février 1954, en pleine vague de grand froid, il interpellait les Français : "Mes amis, au secours ! Une femme vient de mourir gelée, cette nuit, à 3 heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l'avait expulsée...". Dans la foulée, les dons ont afflué, un immense mouvement de solidarité est né : l'insurrection de la bonté.

À Cernay, les mots de l'abbé Pierre résonnent toujours. "Je n'ai rien mais, si tu veux, tu vas m'aider à aider des plus pauvres que toi", tel était son esprit et c'est encore celui qui habite chaque jour les 60 bénévoles. "Sa vision est mon idéal, confirme Mariette Hossenlopp, être là pour ceux qui n'ont rien."

"On accepte l'autre tel qu'il est, pas comme on aimerait qu'il soit"

Liliane Husser, 91 ans, est elle engagée depuis près de quatre décennies. Elle a commencé par une mission ponctuelle, donner des cours de remise à niveau à de jeunes compagnons, mais n'est jamais repartie. Quasi quotidiennement, elle "travaille" pour la communauté, depuis chez elle désormais. Elle crée des cartes d'anniversaire ou de mariage à partir de matériel récupéré. "On les vend trois euros", explique-t-elle.

Son action au sein d'Emmaüs "donne du sens à [s]a vie : aider les autres et donner aux autres l'élan d’aider à leur tour. Qu’ils comprennent qu’eux aussi ont quelque chose à donner. Je trouve ça génial, les échanges qu'on a avec ces gens qui nous apportent beaucoup, eux aussi", sourit celle qui a rencontré l'abbé Pierre à de nombreuses reprises.

Le profil des 50 compagnons a changé. La plupart d'entre eux sont aujourd'hui des étrangers, mais les valeurs qui animent la communauté sont toujours les mêmes. "Nous sommes guidés par trois points essentiels, affirme Michel Berna, bénévole depuis 50 ans. D'abord, l'accueil. Nous accueillons chaque être humain tel qu'il est, quelle que soit son origine, qu'il vienne de France, d'Afrique ou d'ailleurs. Nous accueillons de façon inconditionnelle. Pour travailler ensemble, c'est le deuxième point. Et le troisième point, c'est la solidarité. Partager avec ceux qui sont dans le besoin".

Il voit son engagement comme une "aventure magnifique, très humaine. On accepte l'autre tel qu'il est, et pas comme on aimerait qu'il soit. C'est une grande différence", insiste-t-il. 

"On pensait qu'un jour, Emmaüs n'aurait plus de raison d'être. Malheureusement, on se trompait"

Près de 5.000 compagnons ont posé leurs valises dans la ville haut-rhinoise depuis 1955. Au sein de la communauté, ils peuvent reprendre confiance en eux, le temps qu'il faut. C'est le cas d'Olivier, en charge du service lors des repas et de la plonge depuis 2016. À 48 ans, il considère son passage à Cernay comme un "tremplin, pour un jour pouvoir reprendre [s]a vie à l'extérieur, dans [s]on propre appartement".

Quelques femmes sont désormais également hébergées. Depuis que la communauté a déménagé dans de nouveaux bâtiments il y a sept ans, les chambres sont individuelles et équipées de sanitaires. Des conditions qui ont permis l'accueil de compagnonnes. Au total, 200 ares de terrain et 6.000 mètres carrés de plancher. Preuve qu'Emmaüs s'inscrit dans l'avenir.

"On pensait qu'un jour, Emmaüs n'aurait plus de raison d'être. Malheureusement, on se trompait, analyse Michel Berna. On peut héberger 50 personnes, et il y a toujours des gens qui n'ont pas de toit, qui viennent chercher un abri. C'est indispensable, et ça va sans doute continuer dans les années à venir. Nous, on poursuivra tout ce qu'on a fait, monté et construit ensemble."

Avec une règle d'or : se battre pour défendre les convictions de l'abbé Pierre. Celles qu'il a encore partagées lors de sa dernière visite à Cernay, en 2005, pour les 50 ans de l'association. Un guide, toujours aussi déterminé, même à 93 ans. 

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