Au centre historique de Langres, les pigeons sont devenus de véritables nuisibles. Leurs fientes dégradent les bâtiments et posent des problèmes sanitaires. Le fauconnier Eric Graja et ses buses de Harris sont engagés par la ville pour effaroucher les volatiles.
Cris incessants, fientes odorantes et peu esthétiques, transmission de maladies… Corbeaux, pigeons et étourneaux peuvent devenir des fléaux lorsqu’ils sont présents dans nos villes en trop grand nombre.
C’est le cas à Langres, où les pigeons ont investi le centre-ville historique. De la cathédrale à la rue Jean Roussat, en passant par le square Olivier Lahalle, les volatiles prolifèrent. La municipalité a donc opté pour une solution insolite : faire appel à un fauconnier pour effaroucher les pigeons et les pousser à construire leurs nids en périphérie de la ville.
La buse de Harris, championne de la chasse urbaine
La mission a été confiée à Eric Graja, fauconnier installé à Semoutier-Montsaon, à quelques kilomètres de Chaumont. Ses rapaces ont été spécialement dressés pour ce genre d’intervention.
« Je travaille avec des buses de Harris, explique-t-il. Elles ressemblent un peu aux buses variables qu’on croise dans nos campagnes, sauf qu’elles s’attaquent également aux autres oiseaux et pas seulement aux petits mammifères. Ce sont des rapaces de bas vol qui travaillent à hauteur de bâtiment. Elles sont très agiles et précises dans leurs mouvements, ce qui leur permet d’éviter les câbles ou les antennes. »
Deux fois par semaine, pendant trois mois environ, Eric Graja va faire voler ses buses dans le centre-ville de Langres : « Comme dans la nature, les buses vont mener des attaques répétées sur les pigeons. Mais l’idée n’est pas de décimer la population d’oiseaux. La plupart du temps, d’ailleurs, les buses ne parviennent pas à capturer leur proie. Ce qu’il faut, c’est créer un climat d’insécurité pour que les pigeons déplacent leurs nids hors de la ville. »
Le fauconnier fait voler 2 à 3 buses en même temps : « A chaque fois, les sessions ont lieu à des moments différents de la journée, pour désorganiser les colonies de pigeons. Si on vient toujours à la même heure, ils vont vite comprendre le processus. Les buses chassent pendant une heure et demie environ, avant d’avoir un temps de repos bien mérité. »
Les fientes de pigeons peuvent contenir des bactéries transmissibles à l’Homme.
Lorsqu’ils se reproduisent, les pigeons donnent en général naissance à deux oisillons. Et ce, 8 fois par an en moyenne. Les populations augmentent ainsi à toute vitesse, en particulier dans les villes où ils n’ont pas de prédateur direct. Rapidement, les lieux peuplés par les pigeons sont recouverts de déjections.
Des fientes extrêmement acides qui provoquent des dégâts sur les façades ou les carrosseries des voitures, mais qui sont aussi pleines de bactéries. « Les gens l’ignorent souvent, mais ce sont des bactéries transmissibles à l’Homme, indique Eric Graja. Elles peuvent provoquer différentes maladies, souvent liées au système respiratoire et aux bronches. »
Il existe différentes méthodes pour se débarrasser d’une population de pigeons trop importante. Certaines municipalités utilisent des ultrasons qui font fuir les oiseaux, ou encore des procédés chimiques qui empêchent les œufs d’être féconds. Mais l’effarouchement reste la solution la plus naturelle. « C’est une méthode dans l’air du temps, respectueuse de l’environnement, souligne le fauconnier. De plus, elle passe beaucoup mieux auprès de la population. Les gens viennent me poser des questions, il y a un côté vraiment pédagogique. »
Les rapaces peuvent-ils attaquer les passants ?
« Il n’y a aucun risque pour l’Homme, ni même pour nos animaux de compagnie, affirme Eric Graja. Les buses n’ont pas le gabarit nécessaire pour s’attaquer à un chat ou un petit chien, elles en sont très méfiantes. C’est une espèce qui vit en communauté, un peu comme une meute de loups. Elle respecte donc une certaine hiérarchie avec ses congénères comme avec les humains. Elle nous considère comme une espèce “amie”, ce qui nous permet de travailler en milieu urbain sans crainte. »
Les oiseaux sont équipés d’un tracker GPS pour pouvoir être localisés en cas de problème. « Les rapaces peuvent s’arrêter un long moment sur un toit, explique Eric Graja, notamment lors de la capture d’une proie. Mais ils finissent toujours pas revenir, ça ne m’est jamais arrivé de perdre un de mes oiseaux ! »