30% de demandes supplémentaires cet été aux Restos du Coeur de la Marne, "c’est du jamais vu"

Pour la première fois, cet été aux Restos du Cœur de la Marne, le nombre des bénéficiaires a dépassé celui de l’hiver. Partout il faut pousser les murs. Au total 700 m2 de stockage sont nécessaires pour répondre à l’accroissement de la demande.

Il est 9 heures, rue des Poissonniers, au centre de Reims, l’un des trois centres de distribution des Restos du Cœur ouvre ses portes en cette fin août 2023. Une longue file d’attente est déjà constituée. Ce moment où l’on vient récupérer la dotation qui dépend de la composition de sa famille est très attendu. Quelques  pommes, une baguette de pain, une bouteille d’huile, une boîte de raviolis, des légumes, du lait ou encore des yaourts viennent remplir les sacs . Quand on vit avec une petite retraire de 600 euros, que le loyer s’élève à plus de 300 euros, comment s’en sortir ?

C’est le cas d’Aline. Elle est inscrite aux Restos du Cœur depuis 2015. Elle y vient toute l’année. "C’est très dur", confie-t-elle. "Quand on a payé le loyer, les charges, l’électricité qui a augmenté, qu’est-ce que je fais après ? Sans les Restos, j’irai sous les ponts".

Katia est maman d’un fils handicapé et d’une fille qui va entrer au lycée. Elle vit avec le RSA. Depuis 2018, elle fréquente les Restos du Cœur et d’autres associations pour s’en sortir. "Sans eux je ne pourrais pas manger à ma faim", dit-elle. "Les prix augmentent. C’est difficile d’acheter de la viande. Là on est dépanné. On ne va pas s’en plaindre".

 Les chiffres de l’hiver dépassés

Pour les bénévoles qui gèrent les Restos du Cœur marnais, cet été est marqué par la stupeur et l’inquiétude. "C’est la première fois que l’été dépasse l’hiver. C’est du jamais vu", explique Arnaud Persyn, bénévole qui assure la communication des Restos du Cœur dans la Marne. "On s’y attendait, mais pas à ce point-là. Pour l’hiver ça va augmenter. Il va nous falloir plus de bénévoles, des chauffeurs notamment pour assurer les allers-retours entre les entrepôts et les centres de distribution".

On est à saturation. Chaque semaine, on doit livrer 8 tonnes de nourriture dans les deux principaux centres de Reims. On distribue à la chaîne. Ce n'est pas satisfaisant.

Jacques Bizet, responsable des approvisionnements 51.

"Pourra-t-on maintenir nos dotations auprès des inscrits de plus en plus nombreux ?" Cette question, Jacques Bizet, responsable du dépôt départemental de la Marne, se la pose. "Cela devient très problématique. Nous aussi on est confronté à la hausse des prix. Financièrement ça commence à devenir compliqué car nous achetons 70% des produits que nous distribuons".

L’explosion des inscriptions est spectaculaire à Reims avec 1000 bénéficiaires en plus. Ces derniers mois la demande a bondi aussi à Vitry-le-François, plus 73% par rapport à l’été dernier. L’arrivée de familles venues d’Ukraine l’explique. Pour les tout-petits, la situation n’est pas moins préoccupante. La hausse est de 48%.

 Noël en question

C’est en novembre que débuteront les inscriptions pour la campagne d’hiver. Rien qu’à Reims, on estime que 500 personnes pourraient rejoindre les 5500 bénéficiaires actuels.

Pour tous, Noël est un moment particulier. Aux Restos du Cœur de la Marne on fait appel à un traiteur pour offrir aux bénéficiaires un repas un peu festif. "L’an dernier on a eu 3 000 repas. Cette année, il en faudra au moins 5000 à 6000. On espère que ça va bien se passer pour fournir tout le monde ou alors il faudra changer de système… Mais c’est un véritable problème", explique le bénévole Arnaud Persyn.

Une chose est sûre : les bénéficiaires de l’association lancée par Coluche en 1985 sont reconnaissants. Sans les Restos, quelle serait leur situation ?

Sheriffe vient d’Albanie avec ses enfants. Elle est sans papiers. Elle attend une réponse de la Préfecture. "Ici c’est très bien", dit-elle, "pour manger, pour la famille, pour les enfants. Ils sont très gentils pour nous. Merci la France !"ajoute-t-elle.

Des mots comme ceux-là font forcément chaud au cœur des bénévoles. Mais "On tend le dos", disent-ils. "Ça explose ! ". Il y a bien la collecte auprès des Français, mais elle a lieu en mars. D’ici là, il va falloir tenir.

 Des centres saturés

L’inquiétude sur l’approvisionnement se double d’interrogation sur le stockage des denrées alimentaires. Dans les deux principaux centres de distribution de Reims, dans le quartier Wilson et au centre-ville "On est à saturation !" se désole Jacques Bizet, responsable du dépôt départemental marnais. "Chaque semaine, on doit y livrer 8 tonnes de nourriture. On distribue à la chaîne. Ce n’est pas satisfaisant. Amiens qui est une plus petite ville que Reims dispose de six centres de distribution quand nous n’avons que trois".

Pourra-t-on maintenir nos dotations auprès des inscrits de plus en plus nombreux ?

Jacques Bizet, Responsable des approvisionnements 51.

Pour le stockage, un local dans le secteur de Croix Blandin sera prochainement opérationnel. Reste la question d’un nouveau local pour la distribution. Au mois de mars dernier, les représentants des Restaurants du Cœur ont été reçus par Arnaud Robinet le maire de Reims.

"Ce mois d’août, je les ai à nouveau rencontrés" indique Marie Depaquy, adjointe au maire chargée des Affaires Sociales et de la Santé. "Nous devons nous revoir en septembre/octobre. Nous allons les accompagner, les appuyer pour des demandes auprès des bailleurs sociaux pour qu’ils trouvent un local".

Que ce soit dans tel ou tel quartier importe peu aux responsables des Restos du Cœur. Ce qu’ils veulent, c’est trouver un lieu supplémentaire. La situation à Reims n’est pas un cas unique. À Epernay (Marne), on compte déjà 1100 bénéficiaires. L’été n’est pas terminé, et aux restos du Cœur on redoute déjà l’hiver. En 1985, à la création des Restaurants du Coeur, on n’imaginait sûrement pas en être là.

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