Après une longue bataille juridique, le village suisse de Champagne ne pourra pas utiliser l’AOC « Commune de champagne » pour parler de son vin. Une victoire pour les exploitants champardennais.
On ne plaisante pas avec l'appellation "Champagne". Le village éponyme suisse vient d'en faire l'amère expérience.
Dans cette bourgade située au cœur du canton de Vaud, on est fier des 28 hectares de vigne autour du lac de Neuchâtel, dans l'Ouest de la Suisse. Si fier, que la commune s'est battu pendant de nombreuses années pour avoir le droit d'utiliser l'appelation "Champagne", une appellation d'origine contrôlée pour qualifier son vin blanc et le vendre tel quel.
Le 13 janvier dernier, le village helvète pensait être au bout de son chemin en obtenant le droit d'enfin nommer le produit de sa viticulture par le nom ancestral de son village. Le Conseil d'Etat du canton,l'équivalent du gouvernement, autorise alors le village à utiliser l'AOC "Commune de champagne" pour étiqueter son vin.
Une décision justifiée alors par le peu de risque de confondre ce vin suisse avec l'appellation mondialement connue du pétillant champenois. A l'époque, le Conseil d'Etat décisionnaire s'explique : il n'y a "pas de risque que le public croie qu'un vin blanc tranquille, vendu dans une bouteille vaudoise étiquetée "Commune de Champagne" et "Vin Suisse", puisse être un vin mousseux de la région viticole de Champagne".
Le Champagne français contre-attaque
L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais c'était sans compter sur la pugnacité d'un fervent défenseur des producteurs français de Champagne. Le tout puissant Comité Interprofessionnel des vins de Champagne (CIVC), réputé pour être le chantre défenseur de cette appellation "Champagne", visiblement si convoitée. L'organisation a déposé un recours auprès du Conseil d'Etat suisse pour demander l'annulation de cette nouvelle appellation, estimant que celle-ci nuisait à ses intérêts.
Le 1er avril, la Cour Constitutionnelle du canton de Vaud, compétente pour gérer ce genre de litiges commerciaux, a mis un point qui semble être final à cette affaire en donnant raison à l'organisation française. Selon eux, la création de cette AOC est "contraire aux accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union européenne", et plus précisément à "l'accord bilatéral relatif aux échanges de produits agricoles", qui accorde "une protection exclusive à la dénomination française "Champagne". Dans son arrêt, la juridiction constitutionnelle ajoute que "la protection exclusive déploie ses effets à l'encontre de tout usage de la dénomination protégée pour des vins qui ne proviennent pas de la Champagne française".