Le bonus réparation remplit les cordonneries : "on a doublé notre nombre de clients"

Dans le cadre de l'élargissement du bonus réparation aux chaussures et aux vêtements, les clients de cordonnerie peuvent bénéficier de réductions à la réparation depuis le 7 novembre. Une mesure qui porte ses fruits et qui apporte pour le moment de nombreux nouveaux clients.

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Pour les cordonniers, il y a un avant et un après. Depuis le 7 novembre, le bonus réparation a été élargi par l'Etat aux chaussures et aux vêtements, permettant aux clients de bénéficier de réductions pour leurs réparations chez les commerçants agréés. L'objectif de cette mesure : augmenter le volume de textiles et chaussures réparés en France de 35 % d'ici 2028, selon Refashion, "éco-organisme" à la tête de cette opération.

Les retours sur expériences plus d'un mois après ? "On a doublé notre nombre de clients", affirme sans hésiter Jérôme Terrier, cordonnier chez Mister Minit à Reims. "Nous, on est une chaîne, et tous nos magasins ont été labellisés. Depuis, on reçoit beaucoup de coups de fil pour nous demander si on est éligibles, et beaucoup de clients qui venaient pour une paire, viennent maintenant plutôt pour trois ou quatre paires à réparer", poursuit-il.

À la carte des possibilités, plusieurs remises possibles attirent les clients : "Vous avez une subvention pour les talons, les patins et demi-semelles, les semelles entières, les collages, coutures, et les fermetures éclair", liste Jérôme Terrier.

Le plus attractif dans cette histoire ? "Le client n'a rien à faire. La remise s'applique directement sur le prix et c'est à nous de nous faire rembourser en différé", appuie le cordonnier. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que la mesure porte ses fruits. "Maintenant, on fait beaucoup de semelles complètes pour les sneakers (paires de baskets), ce qu'on ne faisait pas avant. Beaucoup de jeunes viennent et cela nous apporte des nouveaux clients", se réjouit l'artisan.

Le revers de la médaille

Le revers de la médaille pointe toutefois le bout de son nez chez les cordonniers indépendants, qui doivent gérer toute la partie administrative et faire face aux potentielles difficultés que peuvent provoquer les remboursements différés des réductions.

"C'est à double tranchant pour les cordonniers", décrypte André Poulain, également cordonnier à Reims, qui bénéficie de cette mesure de manière "évidente". "Sur le principe, c'est super pour les clients, mais fatalement, les cordonniers qui ne seront pas labellisés vont y laisser des plumes", pense-t-il.

Mais alors, pourquoi ne pas se faire labelliser ? "On met entre un mois et un mois et demi à se faire rembourser. Quand on travaille dans une grande entreprise, ce n'est pas forcément un souci. Par contre, pour les indépendants, il faut avoir un mois et demi de trésorerie d'avance. Ce n'est pas évident", appuie l'artisan qui travaille chez à la cordonnerie Services minute.

Le temps pris par les démarches administratives est un autre facteur. "Pour chaque paire, on doit prendre une photo avant réparation, une photo du ticket de caisse, préciser quelle réparation est effectuée, attendre la validation de l'opération... Cela prend facilement 2 à 3 minutes par paire, alors si vous en faites entre 30 et 50 par jour, vous dépassez vite l'heure et demie de paperasse par jour. À cela s'ajoutent les nombreux bugs du site internet dans la journée, qui font qu'on doit parfois s'y prendre à deux fois", liste André Poulain.

Une question de clientèle

Pour ces raisons, certains, comme Thierry Laplanche, ne s'y intéressent même pas. "Demander toutes ces démarches à un artisan qui fait déjà ses 70 heures... C'est compliqué", ironise-t-il. Il faut dire que le bonus s'adresse plus à certaines clientèles que d'autres : "Moi je ne répare plus que du haut de gamme en chaussure, et ce n'est pas 7 euros de remise qui vont faire bouger les clients".

Avec sa clientèle, André Poulain ne le voit pas du même œil : "Des clients qui viennent pour un talon et un patin vont avoir 15 euros de remise sur un prix de base de 39 euros. Ce n'est pas négligeable, et les clients le savent. Si on ne le fait pas, ils ne viendraient pas payer plus cher chez nous pour nous faire plaisir".

Quoi qu'il en soit, plus d'un mois après sa mise en place, la mesure apporte son lot de nouveaux clients aux cordonneries labellisées. Nouveaux clients qui ont, en plus, tendance à faire davantage de réparations au vu des moindres coûts. Reste à voir avec le temps si ceux qui ne peuvent pas se le permettre ne seront pas trop pénalisés par rapport à leurs concurrents.

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