Comme partout en France, des membres de la police judiciaire ont manifesté ce lundi 17 octobre à Reims. Ils s'inquiètent des conséquences de la réforme en cours sur la qualité de leur travail.
Une cinquantaine de policiers ont manifesté ce lundi 17 octobre à la mi-journée devant l'Hôtel de police de Reims (Marne) contre le projet de réforme de la police judicaire (PJ). Les fonctionnaires ont choisi symboliquement de se placer de dos sur les marches donnant accès au bâtiment. La mention "Police judiciaire" visible sur les gilets qu'ils avaient enfilés était barrée de noir.
Les enquêteurs que nous avons sollicités n'ont pas voulu s'exprimer, même anonymement. Le nombre de manifestants représente une part très importante de l'effectif rémois, nous a-t-on toutefois expliqué.
Une trentaine de rassemblements étaient prévus ailleurs en France, comme par exemple à Nancy. À Reims, les policiers de la PJ avaient déjà marqué leur opposition à la réforme en cours lors d'une action symbolique le 7 octobre dernier.
Le syndicat de la magistrature a souhaité s'associer à la mobilisation des policiers. Clara van Linden, déléguée régionale du syndicat, était présente à Reims aux côtés des manifestants. "C'est important parce que ça touche à l'indépendance de l'autorité judiciaire dans le choix du service d'enquête", nous-a-t-elle expliqué. "On a peur que la spécificité de la police judiciaire soit absorbée par la sécurité publique [...] et que pour des questions budgétaires, la police judiciaire soit à terme menacée."
Vive inquiétude dans les rangs
La réforme, voulue par le ministre de l'Intérieur, prévoit de placer tous les services de police du département - renseignement, sécurité publique, police aux frontières et PJ - sous l'autorité d'un seul Directeur départemental de la police nationale (DDPN), dépendant du préfet.
Les agents de la PJ, chargée des crimes et enquêtes les plus graves, seraient intégrés à une filière investigation avec leurs collègues chargés de la délinquance au quotidien. Les détracteurs du projet pointent un risque de "nivellement vers le bas" et de renforcement du poids du préfet, sous tutelle de l'exécutif, dans les enquêtes.
Depuis fin août, la contestation monte dans les rangs des 5 600 personnels de PJ. Elle s'est élargie le 7 octobre avec le limogeage d'Eric Arella, le patron respecté de la PJ dans la zone sud, qui a suscité un tollé. Eric Arella payait la visite houleuse, la veille, du directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux, à Marseille.
Venu défendre la réforme, ce dernier avait dû traverser une "haie du déshonneur" formée de 200 enquêteurs opposés au projet. La vidéo de la traversée de cet ancien numéro 2 de la PJ est vite devenue virale sur les réseaux sociaux.
Deux jours plus tard, Gérald Darmanin a concédé quelques amendements mineurs et renvoyé la mise en œuvre du projet après le premier semestre 2023 et la reprise des discussions à la mi-décembre suite à un audit. Mais sans toutefois remettre en cause une réforme selon lui "courageuse et indispensable".
(avec AFP)