Arnaud Klein tente de battre le record du monde de visionnage de film en allant voir "Kaamelott", d'Alexandre Astier, au cinéma Opéraims (Marne). Le réalisateur lui en avait fait la promesse et a tenu parole : il était présent pour la 202e séance visionnée par le passionné, le mercredi 15 septembre.
Le réalisateur et acteur Alexandre Astier est le roi d'Arnaud Klein... et de tous les sujets fans de Kaamelott (le premier film, et la série avant lui). Arnaud Klein, un modeste - mais très déterminé - monteur audiovisuel rémois de 34 ans, qui est un recordman en devenir.
En juillet 2021, il a décidé de regarder Kaamelott plus de 200 fois pour battre le record mondial de visionnage d'un film. Heureusement qu'il possède un abonnement de cinéma illimité. Alexandre Astier a eu vent du défi, et l'a encouragé. Lui promettant même de regarder le film avec lui un jour...
Ce jour, c'était le mercredi 15 septembre 2021. Sous le plus grand secret, Alexandre Astier et Arnaud Klein ont passé un petit moment ensemble. Avant d'assister, à 15h45, au visionnage du film - pour la 202e fois en ce qui concerne Arnaud Klein - au cinéma Opéraims (voir son emplacement sur la carte ci-dessous).
À noter que c'est une 202e fois officieuse, Arnaud Klein ne comptant pas l'homologuer auprès du Livre des records (il était trop occupé à profiter du film avec Astier). Le futur recordman a tout raconté - ou presque - à France 3 Champagne-Ardenne. On vous dévoile donc les coulisses de ce moment historique.
Une surprise pour (quasiment) tout le monde
Arnaud Klein était au courant "depuis deux semaines. Mais il fallait que je garde le secret absolu. Mis à part ma femme et mes parents qui étaient au courant." C'est par Twitter que s'est organisée la rencontre. "Il suivait mon compte, je pouvais lui envoyer des messages depuis bien longtemps, mais je lui ai laissé faire le premier pas. Je savais qu'il me contacterait tôt ou tard." Effectivement.
Un dimanche, Arnaud Klein a donc reçu l'équivalent moderne du Saint-Graal : un message de son idole qu'on résumera par "il serait temps qu'on s'en fasse une". L'organisation s'est ainsi faite en ligne. "Je me suis dit : réveille ton cerveau, essaye de dire un truc intelligent." Le principal écueil était la confidentialité du moment. Personne ne devait être au courant, pour éviter la prise d'assaut du cinéma par une horde déchaînée de fans ("il l'a déjà vécu"). L'instant aurait été irrémédiablement gâché, "on n'aurait pas pu profiter comme on a profité".
Alexandre Astier s'est simplement déplacé à l'aide de son destrier (enfin, de sa voiture) qu'il a garé au parking souterrain de la place Drouet d'Erlon, où se trouve le cinéma. "Honnêtement, s'il ne m'avait pas parlé, je ne l'aurais pas reconnu. Tout simplement parce qu'il avait un sweat bleu avec la capuche sur la tête, le masque... Il n'y avait vraiment que la voix et les yeux qui auraient pu être détectables." Une arrivée très discrète.
Honnêtement, s'il ne m'avait pas parlé, je ne l'aurais pas reconnu.
Le premier mot prononcé lors de cette rencontre homérique fut... bonjour (d'une manière "un peu enjouée", précise Arnaud Klein). Pareil pour Alexandre Astier (qui est fort poli). "On a ensuite commencé à parler très très vite. J'étais un petit peu stressé car il y avait l'appréhension, mais ensuite, on a vraiment parlé de plein, plein, plein de choses. Il a vraiment ce pouvoir de mettre à l'aise extrêmement vite." Lorsqu'il a rencontré le réalisateur sur le plateau de Quotidien, il n'avait pas eu le temps de lui parler. Il s'est donc bien rattrapé...
Au programme de la discussion : le record, le film... "Et on a aussi parlé un peu travail, vu que je suis monteur audiovisuel. On a échangé nos avis sur les différents logiciels, parlé de l'aspect technique du film avec les particularités de sa caméra, qui est très très spéciale." Pour l'anecdote, il s'agit d'une caméra dotée d'une telle résolution (même en filmant de très loin) que le poids des rushes a nécessité un stockage sur serveurs informatiques, qui auraient été embarqués "sur un combi Volkswagen" présent sur le plateau (difficile de savoir si c'était une exagération ou non). Il fallait bien ça pour les "images sublimes" du film (dont vous pouvez regarder la bande-annonce ci-dessous).
"On a aussi parlé de pop culture : Star Wars, et de jeux-vidéo..." Sachez d'ailleurs qu'Alexandre Astier, sur son - rare - temps libre, est un joueur accompli de Warcraft et Starcraft. Bref, beaucoup de sujets abordés entre les deux compères.
Cathédrale des rois... et restaurant vietnamien
Cette charmante discussion a eu lieu autour d'un repas vietnamien, dans un restaurant situé à deux pas du cinéma. Il s'agit du Saigon Caphe, pour ne pas le citer. Initialement, Arnaud Klein avait songé au très guindé restaurant de l'hôtel Continental, habitué à recevoir les VIP passant faire une avant-première à l'Opéraims. "Quand on est arrivé devant... eh bien, ce n'était pas du tout son genre de restaurant."
Le serveur du Saigon Caphe a reconnu Alexandre Astier, mais a été "extrêmement respectueux". Après les 2h20 qu'a duré le repas, ce dernier a demandé : "'Monsieur Astier, serait-ce possible de prendre une photo avec vous ?' Et il a accepté volontiers, car il y a eu cette grande forme de respect, il lui a demandé au moment opportun." La clientèle, elle, était massée sur la terrasse du fait de l'ensoleillement. Elle n'y a vu que du feu.
"Il y a deux choses à voir à Reims quand on n'a pas trop de temps", énonce Arnaud Klein. "Les caves de champagne, et la cathédrale." Il lui en a fait faire le tour. "Je me suis amusé à le faire passer là où passaient les anciens rois."
C'est vrai, quoi : il s'agit quand même du roi Arthur. "Et je lui ai montré là où se faisaient sacrer les rois, sur l'allée centrale de la cathédrale." On n'impressionne pas facilement le roi de Bretagne, mais visiblement, ce fut le cas avec cet immense édifice millénaire.
Au cinéma, "l'équipe était prévenue qu'il allait venir ce jour-là. Il y a eu le petit mot du directeur, le petit mot du sous-directeur, le petit mot de tout le monde dans l'équipe. Il est très abordable. Il y est allé de son petit compliment. Je tiens à préciser qu'il a payé sa place pour le cinéma." L'heure d'arrivée, peu avant la séance de 15h45, a fait qu'il n'y avait pas de public dans le hall ou les coursives. Évitant ainsi la cohue.
"Par contre, je pensais qu'il n'y aurait pas trop de monde dans la salle, pour la séance." Râpé : il y avait 25 personnes. "Mais PERSONNE n'a l'a reconnu." On imagine, plus tard, la réaction de ces pauvres gens en apprenant avoir assisté à une séance de Kaamelott en ignorant la présence du grand Alexandre Astier à leur côté... Arnaud Klein craignait que quelqu'un vende la mèche, mais la présence du réalisateur est clairement restée secrète jusqu'au bout. Personne même n'a eu l'occasion de le rencontrer après la séance. En conséquence : les rires entendus par Astier au cours de son film étaient 100% authentiques, il n'y avait pas à se forcer pour lui faire plaisir. "C'était hyper naturel."
Je tiens à préciser qu'Alexandre Astier a payé sa place pour le cinéma.
Puisqu'on parle de rire, sachez que ni Alexandre Astier, ni Arnaud Klein n'ont ri. Sans doute pour les mêmes raisons. Officiellement, le réalisateur ne voyait son film que pour la deuxième fois... au cinéma. Si l'on compte les visionnages dus au montage, on peut aisément multiplier par 100. Même les plaisanteries les plus drôles sont un peu émoussées après avoir été entendues 200 fois...
En fait, le visionnage du film fut presque un moment de recueillement. "On n'a pas parlé pendant parce que je le voyais hyper concentré. Ça se voyait qu'il était vraiment dans l'avenir de Kaamelott, et qu'il essayait de s'y replonger, histoire de se remettre dans les détails de ses personnages. C'est comme ça que je l'ai ressenti."
Après le film : papotages, photographies et dédicaces
"Il y a un espace au fond du cinéma, on a pu encore papoter du film." De scènes coupées au montage notamment, mais chut, c'est un secret... "Et y faire une séance de dédicaces, j'avais amené quelques petites choses..." Si Alexandre Astier amenait sa signature pour parapher les possessions du passionné, Arnaud Klein, lui, aurait aimé lui offrir une belle bouteille de champagne. Mais le réalisateur ne boit pas d'alcool (ce qui est à saluer dans notre société peu portée sur une telle sobriété). Il réfléchit donc à un autre cadeau pour une prochaine fois (quand Astier signera son record du Guinness Book encadré)...
Après les dédicaces, une petite session de photographies a eu lieu devant le cinéma. Arnaud Klein les a joyeusement partagées sur Twitter, où elles ont été abondamment commentées et appréciées (à voir dans la publication ci-dessous).
Record du monde
— Edward Tetch (@scarecrow0909) September 15, 2021
Séance ???/203
Cela ne sera pas homologuée... je voulais en profiter à fond...
Car notre ROI A TENU SA PROMESSE!!!!!!!!!@AAstierOff @operaims pic.twitter.com/coJ7L1tfQ8
C'est d'ailleurs le seul moment, à l'exception du restaurant (on mange difficilement avec un masque), où Alexandre Astier était reconnaissable. Et ça n'a pas loupé. Un monsieur en béquilles qui allait rentrer dans le cinéma lui a demandé s'il était possible de se photographier avec lui. "C'était très mignon. Et c'est le seul dans la rue à l'avoir reconnu, donc au niveau de la discrétion, on a été au top..."
Arnaud Klein a ensuite raccompagné - "guidé" - le réalisateur à son véhicule. C'était plus prudent. Avec ses cinq sorties, il aurait été fort fâcheux qu'Alexandre Astier s'égare dans le parking, y dépérisse, et qu'on ne connaisse jamais la suite du film : rappelons qu'il ne s'agit que du premier opus.
Le futur recordman est ensuite allé faire son debriefing auprès de l'équipe de l'Opéraims, qui l'a "accompagné tout au long" de son aventure : "leur aventure" également. Des relations amicales apparues grâce au futur record. "Ça m'a fait sortir, rencontrer du monde... Ça m'a permis d'enterrer ces deux années de covid, qui avaient été dures pour moi." Aller parler à l'équipe du cinéma permettait aussi "d'attendre". Car il voulait "vraiment qu'Alexandre Astier soit loin de Reims" lorsqu'il allait "commencer à publier les photos et dire : il a été là; qu'on ne le retrouve pas sur une aire d'autoroute ou un truc comme ça".
Et la suite ?
Avant l'homologation du record, Arnaud Klein va encore tenter quelques séances. "Par précaution, je vais en faire en rab. Et s'il n'y en a pas besoin, au moins, je vais asseoir le record. Je démotiverai à fond les ballons le prochain qui voudrait tenter." La 203e séance qui aura lieu le samedi 18 septembre (suivie d'une grande fête au Dropkick) marquera l'objectif que s'était initialement fixé le (presque) recordman. Le précédent record (un Américain qui a regardé Avengers Endgame en boucle) aurait dû être de 202, mais le Guinness Book n'a validé officiellement que 191 séances à cause de la faillite d'un des cinémas où s'était déroulée l'action. Pourquoi pas 222 ? "Je trouve que c'est un beau chiffre. C'est un beau palindrome", s'amuse-t-il.
Je démotiverai à fond les ballons le prochain qui voudrait tenter le record.
Et si un fan encore plus aguerri - est-ce possible ? - tente de le détrôner en faisant pareil avec le deuxième film, qu'il prenne garde. "Il y a peut-être moyen que je le refasse. En revanche, si j'ai réussi à asseoir mon record assez longtemps, et que je vois que pour le deux, c'est toujours moi, je ne vais pas retenter..."
Arnaud Klein a commencé à trier tous ses documents devant servir de preuve au Guinness Book (tickets de cinéma, registres signés par des témoins). Il souhaite d'ailleurs bien du courage aux candidat(e)s. "Beaucoup de gens le disent sur les réseaux... Mais je demande juste à voir qui va le faire. J'ai rencontré pas mal de déconvenues, c'est une sacrée organisation, j'ai dû changer d'alimentation..." On vous l'avait raconté en effet : rétention d'eau, fatigue due aux visionnages statiques et répétitifs, perte de treize kilos et de sa vie sociale (il ne consomme plus rien de gras ni d'alcool)... et ne plus savoir quel jour on est. "Bonne chance..."
Puisqu'on parle du futur deuxième Kaamelott, sachez qu'il y a eu petit moment plein d'audace. "À la toute fin... Je sais qu'il aime bien les gens qui ont de l'audace et du culot. Donc je lui ai dit texto : 'si jamais vous avez quelque chose à me faire faire [dans le deuxième film], de la figuration, un petit rôle... je suis disponible'." Beaucoup des commentaires reçus par Arnaud Klein lui suggèrent en effet d'apparaître dans la suite. "Ce à qui il m'a répondu : 'j'ai bien entendu'." Ce n'est pas un oui, ce n'est pas un non... C'est une réponse ouverte.
Voilà un homme qui en 2 phrases sait me prendre par les sentiments. Maintenant que je sais que rien n'est impossible... ma femme va me tuer ? https://t.co/2FoNKNir9n
— Edward Tetch (@scarecrow0909) September 16, 2021
En attendant le deuxième opus de Kaamelott... ou un nouveau record, théâtral cette fois-ci (mais pas sûr que sa femme accepte, cf tweet ci-dessus)... Arnaud Klein retournera sans doute au cinéma. Cette fois-ci, pour voir Shang-Shi, ou bien Dune. Mais pas 200 fois, il ne faut pas abuser...