Transphobie : "je voudrais qu’il n'y ait plus jamais de Paula", la sœur et la mère de la victime à la barre face à un accusé muet

Jean-Paul Isaki comparaît depuis lundi 2 décembre 2024 devant les Assises de la Marne pour le meurtre de Paula Migeon, une femme transgenre tuée le 7 avril 2021 à Reims. En ce deuxième jour de procès, la sœur et la nièce de la victime ont pris la parole à la barre. L'accusé, lui, a préféré rester dans le silence.

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Deuxième jour de procès pour Jean-Paul Isaki. L'accusé, toujours la tête baissée et le regard vide, est arrivé habillé avec les mêmes vêtements que la veille. Ce mardi 3 décembre 2024, la Cour a entendu à la barre Delphine Driout, directrice d'enquête, Rénald Rousseau l'officier de police judiciaire qui a interrogé l'accusé lors de sa garde à vue en avril 2021, ainsi que des parties civiles et l'accusé.

Une rencontre via Coco.fr ?

Comment se sont rencontrés Paula Migeon, la victime, et Jean-Paul Isaki ? C'est ce qu'a tenté de comprendre la présidente, ce mardi matin. Si l'accusé évoque une escroquerie au faux chèque, qui l'a conduit à se retrouver au domicile de la victime, les enquêteurs se sont penchés sur les sites de rencontres. Lors de sa garde à vue, l'accusé avait déclaré que l’auteur de l’escroquerie lui aurait donné rendez-vous chez la victime qu’il n’avait jamais rencontrée auparavant et avec qui il n’avait eu aucun contact.

Mais d'après l'enquête, la victime fréquentait un certain nombre de sites, dont celui de Coco.fr. Sur certains de ces sites, les discussions sont éphémères. Peuvent-ils s’être donnés rendez-vous via l’un d'entre eux sans que la police ait retrouvé de trace des conversations ? "C’est possible", a déclaré Delphine Driout, la directrice d’enquête. "Le site Coco.fr a été retrouvé dans l'historique de téléphone de l’accusé et sur l’ordinateur de la victime", a-t-elle ajouté.

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Pour rappel, ce site internet, fermé en juin 2024 par le parquet de Paris, est connu pour être un repaire de contenus pornographiques et est à l'origine de guets-apens tendus à des homosexuels, piégés par des promesses de rencontre. 

"Elle ne s'autorisait à être Paula que chez elle"

Dans l'après-midi, les parties civiles se sont exprimées à la barre. "Je veux rappeler que la seule victime, c’est bien elle", a déclaré, la gorge nouée, Laura, la nièce de la victime. Elle continue : "C’est Paula qu’on a été chercher ce soir-là. Elle ne s’autorisait à être Paula que chez elle. Et on vient chez elle, on lui prend tout"

"Je veux juste qu’on lui donne le droit d’exister et qu'à travers ce procès, toutes celle et ceux qui se reconnaîtront en Paula se dise que ce n’est pas nous le problème, ce n’est pas nous les monstres", ajoute-t-elle. "Je voudrais qu’il n'y ait plus jamais de Paula". "Je demanderai juste une chose : donnez leur le droit de vivre. N’oubliez pas que la seule victime de cette histoire, c'est Paula Migeon", termine-t-elle en pleurs.

N’oubliez pas que la seule victime de cette histoire, c'est Paula Migeon

Laura, nièce de la victime

France 3

"C’était mon double. On était constamment ensemble, mains dans la main", a déclaré Brigitte Migeon, la sœur de Paula, en pleurs elle aussi. Elle se tourne vers Jean-Paul Isaki, toujours derrière la vitre du box des accusés : "Je ne peux pas te pardonner". Puis, elle se retourne vers les jurés et la présidente : "Il m’a enlevé mon pilier, mon âme. Je ne lui pardonnerai jamais".

"Ce qui est important, c'est que Paula soit reconnue comme étant la victime", souligne Samuel Tarcy, président de l'association Exaequo, à Reims, interrogé lors d'une suspension d'audience. "Les personnes non transgenres ont beaucoup de mal à s’imaginer ce que c’est d’affirmer son identité de genre. Le cheminement est très long", atteste-t-il.

Un accusé qui veut "garder le silence"

"C’est impardonnable ce que j’ai fait, je regrette d’avoir ôté la vie à quelqu'un". Ce sont quasiment les seuls mots qu'a prononcés l'accusé lors de son interrogatoire. Ce dernier ne souhaite pas répondre aux questions, mais a tout de même conscience qu'il a fait "quelque chose de grave". Face à un accusé silencieux, Maître Soukouna s'interroge : "Avec Maître Peissel, on est vos avocates et vous ne répondez même pas à nos questions ?". Encore une fois, Jean-Paul Isaki, qui n'exprime aucune émotion vis-à-vis des membres de la famille des victimes, a préféré "garder le silence"

Pour le dernier jour de procès, l'expert psychiatre sera entendu ainsi que les plaidoiries et le réquisitoire. Jean-Paul Isaki encourt la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de Paula Migeon survenu le 7 avril 2021.

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