Les bactéries peuvent-elles servir à créer de l’énergie ? C’est le sujet de la thèse du lorrain Ludovic Vauthier. Ce doctorant de l’Université de Lorraine fait partie des 16 candidats en lice pour la finale nationale de "Ma thèse en 180 secondes", un concours international de vulgarisation scientifique ouvert aux doctorants et doctorantes francophones du monde entier, qui se déroulera le 5 juin 2024 à l’opéra de Nice.
"Le tétanos, le botulisme et les gangrènes gazeuses sont des infections causées par une bactérie appelée Clostridium." Ainsi commence l’histoire de Ludovic Vauthier qui devra tenir en seulement trois minutes, soit 180 secondes, pour expliquer sa thèse.
Ces fameuses bactéries le fascinent au point qu’il en cultive dans son laboratoire. Elles pourraient nous aider à relever le défi de la transition énergétique, grâce au dihydrogène qu’elles libèrent après fermentation. "Elles sont capables de dégrader la matière organique en gaz."
Ludovic les dorlote et leur donne même à manger, ce qui lui permet de les étudier. "L’idée est d’avoir une preuve de concept pour produire une énergie qui permettrait de se passer de la pétrochimie" explique le jeune homme.
Fasciné par le monde de l’infiniment petit
"Tout le monde a déjà entendu parler de la bactérie E.Coli qui peut provoquer des symptômes intestinaux. Mais saviez-vous qu’elle est utilisée pour produire de l’insuline pour les diabétiques ?" C’est ce que nous rappelle le scientifique. Certaines bactéries pathogènes peuvent en effet se révéler de puissantes alliées si on sait les utiliser.
Le scientifique cherche en fait à trouver les conditions de culture, qui vont permettre à ces bactéries de produire un maximum d’hydrogène. "On joue sur plusieurs paramètres. L’acidité du milieu, ce qu’on va mettre dedans." Pour lui, les premiers résultats sont prometteurs. "Clostridium a déjà été utilisé dans l’industrie par le passé. Pourquoi pas pour l’avenir ?
Les archées sont des micro-organismes qui dégradent la matière organique pour faire du méthane. Je vais leur donner l’hydrogène produit avec les clostridiums. En conséquence, elles vont produire encore plus de méthane. Pour une plateforme classique de méthanisation, on aura 55% de méthane et 45% de Co2. Elles vont augmenter largement le taux de méthane ".
Un timide qui se soigne
Monter sur scène pour partager ses travaux n'était pourtant pas gagné. Car Ludovic a été un grand timide. Au collège comme au lycée, il était terrorisé à l’idée de faire un exposé. " J’ai évolué après. Pendant mes études, les enseignants qui m’ont dit que mon travail était bon m’ont donné confiance en moi. Je comprenais ce que je faisais et pourquoi je le faisais."
Comme beaucoup de timides, il a aussi développé un sens de l’humour singulier. Une forme de malice, que l’on retrouve dans ses prestations qui l’ont mené à la finale nationale de MT180.
Participer au défi est aussi une façon de faire de la vulgarisation à l'intention du grand public. "J'aime partager ce que je fais et les résultats de mes expériences. Même si monter sur scène a été un grand défi."
L'énergie pour avenir
Issu d’une école d’ingénieur en industrie alimentaire, l'ENSAIA, Ludovic s’est spécialisé en biotechnologie, plus particulièrement la biotechnologie végétale, animale ou microbienne.
"Au départ, je ne voulais pas forcément être chercheur. Je me suis intéressé à la biologie et à la chimie plutôt qu’aux mathématiques et à la physique." Aujourd'hui, il est doctorant au LRGP (laboratoire réactions et génie des procédés), qui dépend du CNRS et de l'Université de Lorraine.
Son avenir, il le voit dans la recherche académique. "Il me reste un peu de temps pour trouver ma voie. L’énergie est un domaine passionnant et qui intéresse beaucoup d’acteurs."
Il sera le 5 juin à Nice pour la finale nationale de "Ma thèse en 180 secondes" avec les 15 autres doctorants en lice. Comme pour la demi-finale, Ludovic Vauthier est serein. "La grosse panique, elle s’invitera dix minutes avant d’entrer sur scène."
La thèse de Ludovic Vauthier devrait se terminer en décembre 2025.