Verdun eldorado de la drogue : le constat d’une guerre perdue face aux trafiquants, racontée par le documentariste lorrain Alain Morvan

Le deuxième film du documentariste lorrain Alain Morvan sera diffusé sur France 3 Lorraine le 4 avril 2024. "Héroïne : la défaite de Verdun" raconte le combat de la justice face une situation hors de contrôle dans la ville meusienne. Nous avons rencontré Alain Morvan. Il revient pour nous sur la genèse de son film.

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"Héroïne : la défaite de Verdun" raconte le combat de la justice face une situation hors de contrôle dans la ville meusienne, où le trafic de stupéfiants a explosé en dix ans. Les points de deal se multiplient sur fond de règlements de compte dans le centre-ville, laissant la justice et les travailleurs sociaux démunis. Le deuxième film du documentariste lorrain Alain Morvan sera diffusé sur France 3 Lorraine le 4 avril 2024. Il revient pour nous sur la genèse de son film.

Qu’est-ce qui vous a amené à Verdun, à travailler sur un trafic de drogue hors de contrôle ?

Alain Morvan : "quand j'étais reporter au Républicain Lorrain, en 2011 il y avait une campagne autour d'un petit documentaire qui avait été fait dans un lycée de Verdun par un réalisateur qui avait accompagné des élèves et ça racontait l'histoire d'un gars qui avait perdu deux membres, un toxicomane. Au lycée, j'avais rencontré à l'époque une addictologue. J’avais aussi échangé avec le procureur de la République, Yves Le Clair. La situation était maîtrisée selon lui. Des consommateurs revendaient ce qu’ils avaient acheté en Belgique ou aux Pays-Bas pour financer leur addiction. Les affaires de stups étaient courantes, mais sous contrôle. Et puis en quelques années, tout a basculé. La Meuse est devenue le deuxième département de France pour la consommation d’héroïne, rapportée à sa population. On y compterait un millier de toxicomanes. Cette population grandissante a attiré des trafiquants de Metz, de Reims, de Paris… qui inondent le marché et se font concurrence avec des armes de guerre. J’ai traité des centaines de procès de stups partout en Lorraine, mais cette situation-là, je ne l’avais jamais vue ailleurs qu’à Verdun".

Dans votre film, on voit la justice faire la guerre à la drogue, mais aussi les blessés de cette guerre, les toxicomanes. Comment avez-vous réussi à les faire parler ?

AM : "grâce aux travailleurs sociaux et aux associations qui les aident. Certains me disaient qu’ils suivaient des toxicomanes depuis longtemps et qu’ils voyaient maintenant arriver leurs enfants ! Je ne voulais pas faire un documentaire pour plaquer les idées que j’avais sur le sujet. Je voulais me nourrir des témoignages, et j’ai pu passer plusieurs moments avec eux. Ça a nourri finalement ma compréhension du sujet et pas seulement. J’ai été abasourdi par le degré de violence. Moi, je la connaissais plutôt dans les cités, celles de la vallée de la Fensch, de Borny, de Bellecroix… et là, c'est en plein centre-ville de Verdun, avec des trafiquants qui ravitaillent des toxicomanes dans des bendos (des squats ou des logements de toxicomanes réquisitionnés par les dealers) et se battent pour leur contrôle. Ils se sont déplacés là où est le marché, ils ont découvert un marché d'une grande stabilité et toujours en croissance. Ça continue sans arrêt au point que les dealers fonctionnent comme les géants de la grande distribution en France : ils se donnent tous rendez-vous à Verdun parce qu'il y a un marché donc ils veulent tous se placer".

Votre film, c’est aussi la chronique d’un échec de la réponse de l’État ?

AM : "le procureur a la charge de réprimer. Il a une stratégie à mettre en place avec la police et la gendarmerie. Ils traitent un premier niveau en arrêtant les trafiquants sur les points de deal. Mais cette stratégie du harcèlement a ses limites. En fait, à Verdun, je crois que personne n'a réellement envie de considérer que sa ville est confrontée à de tels problèmes. Le maire n’a pas voulu témoigner. Verdun, c'est le tourisme de la Grande Guerre. Point. Mais moi à Verdun, je n’ai pas vu un seul SDF avec une canette à la main. Pourquoi ? Parce qu’ils sont tous toxicomanes. Il y a un décalage qui se crée entre la vision qu'on veut avoir de la ville et qu'on défend, et celle que j’ai vue".

"Héroïne : la défaite de Verdun" sera projeté en avant-première le 2 avril 2024 au cinéma le Klub à Metz à 19h30, entrée gratuite sur inscription ici. Diffusion sur France 3 Lorraine le 4 avril.

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