Depuis Noël, la tranche à charbon de la centrale Emile Huchet Saint-Avold (Moselle) n’a plus produit d’électricité. Sortie de sa retraite le 28 novembre 2022, elle fait face à des températures douces et à une baisse de la demande. Le propriétaire, Gazel Energie, s’interroge sur la poursuite de l’activité, tout comme les salariés.
Elle avait été sortie de sa courte retraite pour pallier les nombreux arrêts de réacteurs nucléaires en France. Mais depuis son redémarrage, la tranche à charbon de la centrale Emile Huchet de Saint Avold n’a produit de l’électricité que pendant quelques semaines, en décembre 2022.
La relance de l’atome et la douceur de l’hiver laissent ainsi la centrale à nouveau au chômage technique, "le marché ne nous appelle pas" explique la porte-parole de Gazel Energie, le propriétaire du site, "mais nous sommes disponibles".
Camille Jaffrelo précise que "les prix ont baissé, la demande également. En cas de pointe de consommation, nous sommes les derniers appelés, c’est comme ça, les autres installations passent avant nous. Chaque installation a un prix. Oui notre électricité est chère, mais nous avons prouvé que nous avons rendu des services au système".
Le groupe rappelle ainsi que c’est le gouvernement qui a ramené la centrale mosellane à la vie. Promise à la retraite au 31 mars 2022, la centrale est revenue dans la course à la production, notamment en raison du contexte international avec la guerre en Ukraine, mais aussi les arrêts d’installations nucléaires en cascade. Lors des pics extrêmes de consommation d'électricité, comme c’était le cas en décembre dernier, la centrale à charbon a produit "à bloc" selon Gazel Energie, ce qui justifierait son fonctionnement au-delà du 31 mars 2023 prochain, date fixée par le gouvernement pour la fin de son exploitation.
Le gouvernement vers une prolongation ?
Jean-Pierre Damm, le secrétaire FO du Conseil Social et Economique (CSE), estime que "le charbon, c’est une garantie d’approvisionnement en électricité, la question que nous posons au gouvernement c’est : voulez-vous de cette garantie ou préférez-vous laisser planer la menace de coupures ?".
Selon lui, les salariés, qui ont accepté de revenir travailler en CDD, ne veulent pas revivre le scénario de l’année dernière : "c’était déjà très difficile, on ne le fera pas deux fois nous disent les agents". Même point de vue pour la direction qui "ne veut pas jouer au yoyo avec nos salariés : soit le gouvernement se prononce avant le 1er avril pour une poursuite de l’activité, soit on arrête tout" explique Camille Jaffrelo.
Sur le site, 70 salariés sont présents en continu, ainsi qu’une centaine de personnels extérieurs, dédiés notamment à la maintenance. Il resterait sur le parc entre 400.000 et 500.000 tonnes de charbon, de quoi couvrir quarante à cinquante jours de production, "mais si nous devons commander du charbon pour l’hiver prochain, c’est maintenant qu’il faut le faire, parce qu’il met entre quatre à six mois à arriver" selon Gazel Energie.
Agnès Pannier-Runacher, en déplacement à Metz le 6 janvier 2023, n’avait pas fermé la porte à une prolongation d’activité pour la tranche à charbon de Saint-Avold. Au micro de nos confrères de France Bleu, la ministre de la Transition Energétique avait déclaré qu’ "il est trop tôt pour dire ce que nous aurons à faire en 2023-24 (…) J'attends d'avoir les scenarios de notre expert énergétique et électrique RTE pour tracer la situation de disponibilité des réacteurs nucléaires et la situation de tension sur le marché international en matière de production d'électricité de nos voisins, en particulier de l'Allemagne, pour prendre une décision éventuelle de prolongation d'un an".
"Nous attendons une décision ferme du gouvernement, et nous prolongerons les contrats de nos agents, qui sont tous en CDD jusqu'au 30 avril 2023, dans les mêmes conditions de rémunération, avec les bonus adossés" précise Camille Jaffrelo. Si l’hiver s’installe, Gazel Energie affirme pouvoir relancer la production en moins de douze heures.