La moto française BFG équipée du moteur de la Citroën GS est une rareté. Produite à 650 exemplaires entre 1982 et 1988, il en reste 400 en circulation. Décriée à l'origine pour son esthétique, elle est appréciée par ses inconditionnels pour son endurance et sa fiabilité. Jean-Claude Hermant en fait partie.
La BFG est une bécane atypique mais aussi une comète dans l'univers de la moto. BFG pour Boccardo-Favario-Grange, les noms des concepteurs de cette machine de 1300 cm3 hors du commun. Cette moto française roule avec un moteur de voiture, celui de la Citroën GS. La firme BFG a produit 650 exemplaires entre 1982 et 1988. Aujourd'hui, il en reste 400 en circulation dont celle de Jean-Claude Hermant domicilié à Thionville (Moselle).
Il a les yeux de Chimène pour sa belle quarantenaire à la livrée rouge et au liseré bleu-blanc-rouge : "cette moto n'a que des qualités techniques. Beaucoup de couple, une tenue de route exceptionnelle grâce à sa conception. C'est une moto facile d'entretien, agréable à rouler et puis on peut y mettre les mains."
Car contrairement aux motos modernes et japon.....(non je n'ai rien dit), tout est accessible. L'entretien courant n'exige pas un diplôme d'ingénieur en informatique, bien qu'elle a bénéficié, rareté à l'époque, d'un allumage électronique. Des pièces portent des noms qui sonnent bizarres aujourd'hui comme : starter, carburateur double corps, câble d'embrayage... Jean-Claude Hermant, chaudronnier de métier, la maintient dans un état irréprochable: "j'ai refait les pots, quelques caches. Ça me plaisait bien de la personnaliser même si elle n’a pas beaucoup changé depuis l'origine. J'aime bien pouvoir y mettre les mains. Petit à petit je suis rentré dans le système BFG, pour ne pas dire la famille BFG."
Ma BFG me permet aussi de rencontrer un tas de gens exceptionnels
Jean-Claude Hermant, BFGiste convaincu.
Car si la marque a disparu, 200 aficionados entretiennent la flamme au sein du Moto club BFG fondé en 1983. Philippe Perelle est un des premiers membres. Il est aujourd'hui vice-président de l'association et roule en BFG depuis quarante ans.
Une aventure humaine
En août 1982, il achète sa première BFG. Gros rouleur, il va "lui mettre" 40.000 bornes dès la première année... Il se rend à La Ravoire (Savoie) sur le premier site de fabrication. La firme déménage en 1983 à Saint-Quentin dans l'Aisne lorsque MBK reprend la production. Il rencontre les ingénieurs et techniciens. On échange, on discute car "cette moto est avant tout une aventure humaine. La BFG c'est de la ferraille, du plastique mais surtout des hommes et des femmes passionnés et cela m'a animé dès le départ et ça m'anime encore."
Utiliser un moteur automobile Citroën pour construire une moto n'a rien d'exceptionnel. La Münch-Mammut, la 1000 Van Veen ou l'Amazonas sont aussi animées avec des moteurs de voitures. Pour Philippe Perelle, celui de la Citroën GS est bien adapté pour une machine de grand tourisme.
Question d'esthétique
Car partout où il va, le BFGiste est sûr de se faire interpeller par des connaisseurs, des anciens propriétaires, des gendarmes, des CRS, des douaniers qui roulèrent sur ces machines ou de simples curieux. Il faut dire que la machine ne passe pas inaperçue : grosse cylindrée imposante, son moteur de voiture, son tableau de bord de Renault 5 turbo et son look... Un design sans concession qui place d'emblée sur le terrain du j'adore ou je déteste. La moto favorise les rencontres et procure même "un peu de frime" avoue Jean-Claude Hermant.
Son carénage anguleux et son gros phare carré ne laissent pas indifférent et peuvent même rebuter : "il y a effectivement ce carénage à priori pas très beau mais avec le temps je m'y suis habitué. Il est extrêmement protecteur, un bon point pour les gros rouleurs. La selle est large, confortable".
Et en guise de signature sonore, Il y a ce sifflement de la boîte de vitesses : "qui s'entend de loin et qui peut surprendre" . Bref, la BFG est tout sauf une moto passe-partout aseptisée.
Une carrière contrariée
Une soixantaine d'exemplaires sont livrés à la gendarmerie, à la CRS 1 ainsi qu'aux douanes mais les commandes de l'Etat ne suivent pas malgré un coût de fabrication très compétitif. Le passage à une production industrielle s'avère aussi compliqué. Elle tire sa révérence en 1988.
Philippe Perelle estime à 400 motos encore en circulation : "le Moto Club BFG propose la quasi-totalité des pièces détachées. Du coup, on a une assez bonne idée du nombre de machines qui roulent, qui ressortent du garage et qui sont rénovées."
Sur les 650 machines produites, la moitié est attelée. Avec son cadre tubulaire et son couple généreux, la BFG est très bien adaptée pour un montage en side. Sur le marché de l'occasion, la moto en solo se négocie 3000-3500 euros. En version side, comptez entre 7000 et 8000 euros.
Le profil type du BFGiste ? : "un sexagénaire, qui aime rouler et qui possède sa BFG depuis longtemps".
Mis à part son esthétique discutée, la BFG est d'une endurance à toute épreuve. À quarante ans passés, elle tient toujours la route. Un exemplaire a même été aperçu en Casamance au Sénégal. Si vous souhaitez en savoir plus sur la saga de la BFG, Philippe Perelle recommande l'ouvrage de Thierry Cazenabe "Vous avez dit motos françaises ?"