La Cité internationale de la langue française est ouverte depuis près d'un an et accueille ce vendredi 4 octobre plus de cent chefs d'État pour le 19ᵉ sommet de la francophonie. À l'heure du premier bilan, tous saluent un succès touristique attesté par sa fréquentation, mais certains appellent à un renforcement du rayonnement local de la Cité.
234 millions d'euros, quatre ans de travaux : la Cité internationale de la langue française a nécessité des investissements considérables avant de pouvoir ouvrir ses portes en novembre 2023. Mais l'ambitieux projet promettait des retombées importantes pour Villers-Cotterêts et tout le département de l'Aisne.
Près d'un an après son ouverture, qu'en est-il réellement ?
Avec 250 000 visiteurs déjà accueillis, le succès touristique du lieu est indéniable. Certains observateurs appellent toutefois à un renforcement du rayonnement de la Cité à l'échelle de l'Aisne. La direction des lieux affirme au contraire que le pari est réussi.
Villers-Cotterêts en pleine transformation
La petite commune de Villers-Cotterêts et ses 11 000 habitants vivent de grands changements depuis un an. Un bouleversement que les commerçants appelaient de leurs vœux avant l'ouverture des lieux.
"Il suffit de regarder ce flux continu de tourisme que l'on n'avait pas précédemment, ils font aussi vivre la commune, se réjouit Céline Le Fère, présidente de l'office de tourisme du Soissonnais et du Valois. On a doublé les chiffres de fréquentation à l'office du tourisme, que ce soit à l'office même ou sur le nombre de groupes."
Des visiteurs venus des Hauts-de-France, qui "redécouvrent leur territoire" et des visiteurs internationaux. La présidente de l'office de tourisme estime que la Cité a un impact important sur un rayon de 40 kilomètres autour de Villers-Cotterêts, notamment à Pierrefonds où de nombreux visiteurs se rendent en complément de leur visite.
Ils auraient peut-être dû développer un peu plus autour, mais ça va se faire. On n'est qu'au début.
Alexandre DavisRestaurateur
Dans la ville elle-même, des hébergements et trois restaurants ont ouvert ces derniers mois. Parmi eux, la crêperie d'Alexandre Davis vient d'ouvrir ses portes. "Je ne l'aurais peut-être pas fait s'il n'y avait pas eu la Cité, confie le restaurateur. J'ai beaucoup voyagé, je sais que la langue française est très appréciée, on s'est dit 'ça peut être énorme'. Le weekend dernier, sur notre premier weekend d'exploitation, on a eu des gens qui venaient des États-Unis, des Anglais, des Allemands, des gens du monde entier. Donc, je pense que ça ne peut que monter."
Il souligne que tout reste à faire dans la petite ville, "par exemple, si vous voulez manger un dimanche après-midi, tout est fermé". Il pointe le manque d'hébergements – il n'y a que trois hôtels dans la ville. "Ils auraient peut-être dû développer un peu plus autour, mais ça va se faire. On n'est qu'au début" conclut Alexandre Davis.
Un ancrage local plus contesté
La direction de la Cité internationale de la langue française l'assure, l'équipement profite à tout le département.
"Le territoire s'est clairement approprié cette Cité : on fait un festival sur la francophonie, c'est complet, de gens d'ici, observe Paul Rondin, directeur des lieux. Je peux vous dire que ça marche très, très bien et que, majoritairement, ce sont des publics du territoire. On a créé des centaines d'heures d'actions éducatives et sociales partout sur le territoire. On a accueilli des artistes du territoire, tous les opérateurs culturels du territoire, c'est merveilleux, ce qu'il se passe."
Un enthousiasme que nuance Guillaume Hily, secrétaire départemental syndicat enseignant FSU 02 : "Même si l'outil existe et qu'il est sous-utilisé, car c'est un bel outil, il faudrait peut-être permettre à un plus grand nombre d'y aller avec des gratuités des transports."
Le rayonnement est là, mais on doit l'amplifier.
Jacques KrabalVice-président de la Conférence des organisations internationales non-gouvernementales de la francophonie
Alors que la Cité s'apprête à accueillir des dizaines de chefs d'États en grande pompe, pour le 19ᵉ Sommet de la francophonie, Jacques Krabal, vice-président de la Conférence des organisations internationales non gouvernementales de la francophonie et ancien député, regrette que l'événement n'ait pas été mieux expliqué aux populations locales.
"Vous allez dans Villers-Cotterêt, il n'y a pas une affiche, pas un drapeau, regrette Jacques Krabal. Je regrette qu'il n'y ait pas eu cette information sur ce qu'est le Sommet. C'est ce qu'attendent les gens. Ils vont n'y voir que des contraintes de circulation. Je peux comprendre cette perception, mais derrière, on devrait accompagner avec des événements pour expliquer ce qu'il se passe. Le rayonnement est là, mais on doit l'amplifier."
Si la Cité attire les visiteurs de la région et du monde entier, il semble donc qu'il reste du chemin à parcourir pour renforcer ses liens avec les habitants de l'Aisne. Ceux de Villers-Cotterêts, quant à eux, vont rapidement se rendre compte de l'ampleur du Sommet qui se déroule dans leur ville, ce vendredi 4 octobre.
Avec Rémi Vivenot / FTV