METIER INSOLITE. Le dernier embauchoiriste d'Europe est picard

Il est le dernier formier-embauchoiriste d'Europe. Installé en Picardie, il travaille pour les plus grandes maisons de luxe à travers la planète et fournit aussi bien des stars de cinéma que des amoureux de belles chaussures. Mais en quoi consiste exactement son métier ? Rencontre avec Hervé Brunelle.

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Le Picard Hervé Brunelle, qui à l'origine fabriquait des chaussures, est formier-embauchoiriste. Il est même le dernier d'Europe à pratiquer cette profession peu connue, "pas référencée au répertoire des métiers". Il a créé son atelier en 2005 à Troësnes, près de Villers-Cotterêts dans l'Aisne.

L'artisan est courtisé par les maisons de luxe à travers toute la planète, de l'Australie à l'Angleterre en passant par le Japon et par les plus grandes stars.

Justement, Barbara Pravi a les yeux qui pétillent devant ce sympathique Picard à bretelles, venu avec un morceau de bois et des outils sur le plateau de Vous êtes formidables pour présenter son métier. "Fabricant de prothèses ? De mannequins ? De sabots ?", tente de deviner la chanteuse. Pas loin... Mais pas tout à fait.

Des embauchoirs pour augmenter la durée de vie des chaussures

Son métier consiste à créer la forme en bois qui servira aux artisans bottiers ou aux enseignes de luxe à tendre le cuir pour fabriquer une chaussure, une botte ou une bottine.

"Pour fabriquer une paire de chaussures, même des baskets, il faut une forme, explique-t-il. Après, lorsque la chaussure est terminée, on fait l'embauchoir pour aller dedans."

"Un embauchoir, précise-t-il, c'est la réplique de la jambe ou du pied, ça sert à remplir la chaussure ou la botte pour garder sa forme de fabrication initiale. Quand les gens partaient dans les colonies au début du XIXe siècle, par exemple en Asie du Sud-Est, où c'est très humide, il n'y avait pas de caoutchouc, à cette époque tout était en cuir."

"L'humidité s'installait à l'intérieur des bottes et il fallait les retendre pour les assécher, faire une ventilation à l'intérieur. C'est pour ça que les bottiers de l'époque ont créé les embauchoirs de voyage."

Barbara Pravi et Hervé Brunelle ©France Télévisions

Pas étonnant que Barbara Pravi, révélation féminine aux Victoires de la musique 2022, soit prête à passer commande pour ses chaussures de scène.

Les plus grandes vedettes de cinéma s'arrachent les embauchoirs créés par Hervé. Modeste, il ne cite aucun nom, tout juste consent-il à raconter qu'il a créé un prototype de chaussure pour les danseuses du Crazy Horse à Singapour.

Les maisons de luxe se l'arrachent à travers la planète

"On travaille beaucoup avec des designers de la mode, pour les défilés par exemple, décrit Hervé, mais aussi avec des particuliers adeptes de chaussures de luxe."

Ces derniers lui envoient leurs souliers pour qu'il crée des embauchoirs sur-mesure en hêtre des Hauts-de-France, à 160 euros environ la paire, qu'il façonne à l'aide d'outils et de machines, elles aussi sur-mesure.

"J'ai fait de la mécanique générale à l'école, se souvient l'artisan, et j'ai pu adapter la fabrication de la forme en alliant le travail de la main et de la machine."

Un travail entre artisanat et art, minutieux, délicat et patient. Il travaille en effet entre 70 et 80 heures par semaine. Il lui en faut quatre pour une paire d'embauchoirs simples. "Mais pour une forme sophistiquée, une bottine par exemple, cela peut aller jusqu'à 250 heures !"

En travaillant "à l'ancienne", Hervé espère préserver un savoir-faire unique, qui fait partie de notre patrimoine. "La méthode n'a pas évolué depuis 150 ans. Je ne travaille qu'avec des vieilles machines, il serait impossible de faire ce que je fais avec des outils modernes ou à la chaîne."

Il est ainsi l'un des seuls à maîtriser le travail à la volée, qui consiste à évider la forme. "L'outil est fixe et on vient travailler autour, explique-t-il. C'est un geste que plus personne ne pratique plus depuis longtemps parce que c'est très dangereux. L'outil tourne à 3000 tours, on peut s'accrocher la main, cela m'arrive d'ailleurs de temps en temps, mais je ne peux pas faire autrement."

Hervé Brunelle à l'ouvrage ©France Télévisions

Un métier en voie de disparition

Pour éviter que son métier disparaisse, Hervé s'emploie à former la nouvelle génération, comme il le met en avant sur son site Internet. "Mais c'est compliqué, car on ne peut pas ouvrir un atelier avec ce genre de machines aujourd'hui, ce ne serait malheureusement pas aux normes de sécurité."

Alors, Barbara Pravi lui a-t-elle finalement commandé des embauchoirs ? Et si vous alliez lui poser la question !

La chanteuse sera en concert pour son album On n'enferme pas les oiseaux le 23 novembre au Théâtre Jean-Ferrat de Fourmies.

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