Trente-trois personnes sans-abri ont pu trouver un peu de répit dans les locaux vacants d'une entreprise de la commune de Bondues, près de Lille. Au "Kilimandjaro". Les familles sont accueillies dans des bureaux, aidées par des associations, des entreprises et des collectivités de la métropole.
Le "Kilimandjaro". Les habitants de ce nouveau lieu de vie l’ont renommé ainsi. Huit familles sans domicile – soit au total 33 personnes, dont 21 enfants – sont hébergées dans les bureaux d’une entreprise de Bondues, à proximité de Lille. Elles viennent d’Arménie, de Tunisie, d’Algérie ou encore de République Démocratique du Congo.
"Nous sommes une grande famille", sourit Shahane, réfugiée arménienne, visiblement heureuse de faire partie de cette petite communauté. Cette mère de famille nous fait visiter sa “chambre”. Une pièce, séparée du reste des bureaux par une cloison et un large rideau. Elle vit ici avec son mari et ses trois enfants. Ils ont fui le Haut-Karabakh, en guerre, pour venir en France il y a un an. Pendant de longs mois, ils ont dormi dans leur voiture, dans les rues de Lille.
Huit familles mises à l’abri
Depuis le mois de décembre, ils sont logés, avec d'autres, dans cet espace de 350 mètres carrés. "On a eu cette chance. Chaque nuit, chaque matin, je dis merci pour cette place. Avant, je ne pouvais pas imaginer avoir une place comme ça", raconte la maman. Les occupants sont accompagnés quotidiennement par des bénévoles et des travailleurs sociaux.
Maintenant je sais que j’ai un lit, une place au chaud, quelque chose à manger… J’ai une maison.
Gore, petit garçon hébergé à Bondues
Jouets, lits, petits meubles de rangement, draps… Tout le minimum nécessaire au confort de ces familles a été donné par des entreprises de la métropole lilloise. Pour Gore, le fils de Shahane, c’est un soulagement. "Maintenant je sais que j’ai un lit, une place au chaud, quelque chose à manger… J’ai une maison", s’émeut le petit garçon. "C’est le plus beau cadeau de ma vie. Même pour mon anniversaire je n’ai jamais eu un cadeau comme ça."
4 000 personnes à la rue dans la MEL
"Pour l’instant, you’re home here", abonde François Bouy, à l’adresse de Shahane. Ce co-dirigeant de LMC, une entreprise grossiste en quincaillerie, a mis à disposition ces locaux depuis le départ d'une entreprise locataire, mi-décembre, et ce jusqu’au mois de juin.
Je lance un appel : venez, voyez et agissez à votre tour. Car au fond, ce n’est pas très compliqué quand tout ce collectif se met en marche.
François Bouyco-dirigeant de LMC
Il appelle d’autres propriétaires à en faire autant : "Il y a 4 000 personnes à la rue dans la MEL, ou dans des bidonvilles ou des squats. Et vous avez a priori quatre fois plus de logements vacants", explique-t-il. François Bouy espère donner l’exemple aux promoteurs immobiliers qui ont des bureaux vides. "Je lance juste un appel : venez, voyez et agissez à votre tour. Car au fond, ce n’est pas très compliqué quand tout ce collectif se met en marche."
Une solution provisoire
En effet, le projet regroupe de nombreux acteurs : la mairie de Bondues, la mairie de Lille – qui aide financièrement, à hauteur de 75 000 euros – ainsi que des associations soutiennent le projet.
On a mis en place une équipe qui est justement là pour que les propriétaires n’aient aucune question à se poser.
Vindhya Saravaneresponsable du Souffle du Nord
Surtout, Souffle du Nord, l’association coordinatrice du projet, fait tout pour faciliter le dispositif. "On a mis en place une équipe qui est justement là pour que les propriétaires n’aient aucune question à se poser. Qu’ils se disent simplement 'J’ai un bien vacant, j’ai envie de rendre l’inutile utile, dans une dimension solidaire'", explique Vindhya Saravane, responsable de l’association. C’est le Souffle du Nord qui se charge ensuite de fédérer toutes les énergies nécessaires à la réalisation du projet, de "trouver le cadre juridique" et "d’orienter les bonnes personnes dans le dispositif".
Financièrement, rien à craindre non plus pour les entreprises : elles ont la possibilité, comme François Bouy, de récupérer 60% du loyer théorique en crédit d'impôt. Désormais, il n’y a plus qu’à espérer qu’une autre entreprise prendra le relais en juin, lorsque le "Kilimandjaro", qui n’est qu’une solution provisoire, fermera ses portes. Ou que des solutions de logements plus pérennes seront proposées à ces familles sans-abri