Effondrement d'immeubles à Lille : "mur porteur ou poutre majeure... des éléments structurels ont été fragilisés", explique un spécialiste

Marc Dumont, directeur adjoint de l'Institut d'Aménagement et d'Urbanisme de Lille (IAUL), donne des pistes d'explication sur l'écroulement des immeubles rue Pierre Mauroy. Il évoque également le reste du vieux Lille où, selon lui, "il n'y a pas matière à s'inquiéter".

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Au lendemain de l'effondrement des deux immeubles de la rue Pierre Mauroy, à Lille, les experts en bâtiment ont procédé à des contrôles. S'il est trop tôt pour connaître l'origine exacte de cet écroulement, quelques pistes peuvent être évoquées pour expliquer le drame. Cet événement a également soulevé plusieurs questions sur l'état du parc immobilier à Lille.

Marc Dumont, directeur adjoint de l'Institut d'Aménagement et d'Urbanisme de Lille (IAUL) de l'Université de Lille, offre un éclairage sur ces interrogations.

Quelle peut-être l'origine de cet effondrement ?

La principale hypothèse, c'est qu'il y a des éléments structurels qui ont été fragilisés. Pourquoi ils ont été fragilisés ? Seule l'enquête nous le dira. Cela peut concerner une ossature, un mur porteur, une poutre majeure... On peut imaginer toute une série de choses.

On a beaucoup parlé des murs porteurs, mais ce n'est pas parce qu'on détruit un mur porteur qu'un immeuble est fragilisé. Cela dépend par quoi a été remplacé le mur porteur.

Des chutes de pierres auraient été constatées sur l'immeuble l'an dernier*... Des signaux avant-coureurs ?

Des éléments de façades qui tombent, il y en a partout, tout le temps, dans beaucoup de villes. Si une pierre tombe, ça ne signifie pas automatiquement que le bâtiment est en danger sur le plan structurel. Là, nous sommes quand même dans un secteur protégé, sauvegardé, dans lequel on doit agir prudemment et sous le contrôle de l'architecte des bâtiments de France. Donc on ne peut pas faire n'importe quoi.

Le chéneau de l'immeuble était notamment fragilisé et recouvert d'un filet...

Il y a des quantités d'édifices religieux à Lille avec des éléments qui s'effondrent de temps en temps. Pour autant l'accès reste possible, en partie.

Les immeubles voisins de celui effondré peuvent-ils s'écrouler ?

Je ne peux pas répondre à la place des experts techniques en bâtiment. Mais ce que je peux faire remarquer, c'est que l'on voit deux pignons apparents et qu'il n'y a pas de solidarité entre les bâtis. Donc les deux murs mitoyens ne sont pas solidaires de l'immeuble qui s'est effondré. Ce qui veut dire qu'il n'y a pas de danger immédiat apparent sur les deux parties latérales de l'immeuble.

Combien de temps peut durer le travail des experts en bâtiment ?

Il y a tout une série de réponses qui vont être apportées au fil de l'enquête. Certaines pourront être données rapidement concernant l'état de fragilisation des immeubles mitoyens. Après, le reste de l'enquête peut prendre du temps.

Y a-t-il un problème de vétusté du parc immobilier ancien à Lille ?

Il ne faut pas confondre vétusté et insalubrité. La vétusté signifie simplement qu'un immeuble, des matériaux, les revêtements intérieurs, sont vieux. Ca c'est la réalité du secteur ancien sauvegardé de Lille. Ce qui ne veut pas dire qu'il est en situation d'insalubrité. Il n'y a pas du tout matière à s'inquiéter.

Des propriétaires privés rachètent l'ensemble de l'immeuble, occupent le rendez-de-chaussé pour faire des commerces et délaissent parfois l'entretien des étages supérieurs ou alors les mettent en location sans les mettre complétement aux normes. C'est une véritable problématique, endémique.

Le secteur sauvegardé est sous observation depuis des décennies, car depuis la "loi Malraux" (1962), ces quartiers anciens ont fait l'objet de mesures très précises et sont très accompagnés par l'Etat, les départements, les municipalités puis par les métropoles.

Les logements vacants peuvent-ils être à la source d'insalubrité ?

La vacance, c'est la problématique des quartiers centraux des métropoles européennes. Il y a beaucoup d'immeubles dont les opérateurs économiques rachètent l'ensemble de l'immeuble, occupent le rez-de-chaussée pour faire des commerces et délaissent parfois l'entretien des étages supérieurs ou alors les mettent en location sans les mettre complétement aux normes. C'est une véritable problématique, endémique.

Vous dites aussi que l'Etat ne peut pas tout contrôler...

La municipalité et les services de l'Etat n'ont pas tout pouvoir pour contrôler ce qu'il se passe dans le domaine privé. La grande difficulté, c'est d'agir auprès des propriétaires privés de ces immeubles. Car si la mise en péril n'est pas avérée, la puissance publique est en difficulté d'agir de façon rapide. Ce qui n'est pas simple.

Donc la seule chose que l'on peut mettre en place, ce sont des procédures d'aide spécifique. C'est le cas avec l'Anah (agence nationale de l'habitat), qui met en place des financements spécifiques pour inciter les propriétaires à améliorer l'habitat, mais il n'y a pas de dimension coercitive, sauf s'il y a une procédure de mise en péril.

* Informations publiées par la Voix du Nord.

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