Plusieurs agriculteurs bio de la région sont attendus devant l'Assemblée nationale ce mercredi 7 février 2024, où ils espèrent pouvoir échanger avec les députés pour faire entendre leur colère au sujet de la suspension du projet Écophyto, mais aussi concernant le manque d'aides et de politiques ambitieuses sur le bio.
"Notre volonté n'est pas de faire une manifestation agricole bis. Elle a déjà eu lieu. C’est de rappeler que la condition agricole est d'abord une question démocratique et environnementale." Ce mercredi 7 février 2024, les agriculteurs et agricultrices de la filière bio se rendent à Paris pour une mobilisation devant l'Assemblée nationale, à partir de 13 heures, sur fond de grogne liée à une suspension du "plan Écophyto".
Cette fois-ci, pas de fumier ni de tracteurs attendus dans la capitale... Pour replacer la question environnementale dans le débat autour de l'agriculture et de l'alimentation, les citoyens et citoyennes rassemblés devant l'Assemblée proposeront aux députés et aux passants de discuter du sujet autour d'une soupe, produite avec les légumes de leurs exploitations.
CP 📷 Les #bio mobilisés face au recul des exigences environnementales dans le monde agricole
— FNAB (@fnab_bio) February 7, 2024
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Suspension du plan Écophyto
Pour rappel, en réaction à la colère des agriculteurs ces dernières semaines, le Premier ministre Gabriel Attal avait annoncé la mise en pause du plan Écophyto jusqu'au Salon de l'agriculture, prévu le 24 février prochain. Un plan environnemental pourtant ambitieux, qui vise à réduire les pesticides de 50% sur le sol français d'ici 2030.
Cette décision prise par le gouvernement provoque l'ire des agriculteurs biologiques français, pointant du doigt une mesure "qui ne va pas dans le bon sens" selon Sophie Tabary, présidente de l'association Bio en Hauts-de-France.
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La question centrale du vivant
"La question de l'alimentation ne doit pas être négociée uniquement entre députés ou syndicats, mais avec les représentants de la nation", souligne Sophie Tabary, pour qui les problématiques environnementales, comme les questions liées à l’eau, à la pollution de l’air ou des sols, doivent être réellement soulevées et prises en compte par les normes qui régissent l'agriculture. "Il faut plus de cohérence. Le gouvernement a choisi les solutions les plus faciles et les moins engageantes, mais il y a d'autres choses à faire pour aider les agriculteurs."
Le gouvernement a choisi les solutions les plus faciles et les moins engageantes, mais il y a d'autres choses à faire pour aider les agriculteurs.
Sophie Tabary, présidente de Bio en Hauts-de-France
Pour elle, la suspension du plan Écophyto a été la goutte de trop dans un contexte de crise du secteur biologique, dans lequel il manque 271 millions d’euros pour "sauver les meubles cette année", mais aussi d'urgence environnementale. "Plus d’agriculteurs doivent s'engager dans le respect du vivant, à l’heure qu’il est c'est la solution la plus scientifiquement et rationellement valide."
Un besoin d'aides criant
Avec moins de 3% des agriculteurs des Hauts-de-France considérés comme des professionnels du bio, le secteur est particulièrement peu représenté dans la région. Une situation que la présidente de Bio en Hauts-de-France souhaiterait évidemment voir évoluer, notamment en débloquant plus d'aides à l'implantation et à la reconversion ou avec une revalorisation de l’écorégime bio à 145 euros par hectare de terrain.
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"Ce n'est pas aux fermes de tout faire toutes seules", clame Sophie Tabary, en précisant qu'avec la crise du bio, les agriculteurs souffrent d'une double peine : les efforts des professionnels ne sont pas récompensés malgré les bienfaits alimentaires et sanitaires apportés à la société, en plus de voir leur exploitation mise à l'épreuve chaque jour, en raison des risques et du manque d'aide existant en France.
On met beaucoup plus de temps pour produire en bio, on a plus de préoccupations à gérer, il faut par exemple être beaucoup plus réactif en cas d'aléas.
Sophie Tabary
"On met beaucoup plus de temps pour produire en bio, on a plus de préoccupations à gérer, il faut par exemple être beaucoup plus réactif en cas d'aléas. C'est usant de ne pas avoir de reconnaissance."
Une division professionnelle
Surtout, la présidente affirme ne pas s'être sentie représentée lors du mouvement des agriculteurs ces deux dernières semaines. "Il aurait pu y avoir une volonté de réunir l'entièreté de la profession agricole, sans en exclure un pan entier... Mais là nous n'avions pas notre place dans les cortèges vu les reculs importants demandés en matière environnementale." Une thématique pourtant centrale de l'agriculture pour ces 20 prochaines années, selon la professionnelle.
Nous n'avions pas notre place dans les cortèges vu les reculs importants demandés en matière environnementale.
Sophie Tabary
"Quand voit autant de mépris pour notre travail dans les normes annoncées ces derniers jours, on se sent abandonné", finit-elle par déplorer. "Pour nous, ces annonces ont été un affront, une goutte de glyphosate de trop."