Le 30 août 2024, trois lionnes et trois tigresses ont été sauvées de la captivité. Elles étaient enfermées dans un camion de cirque depuis quinze jours. Pour les sauver, les forces de police ont dû jouer des coudes face à des propriétaires en colère. On vous raconte.
"C'était chaud, il y a eu des affrontements... On ne savait pas comment ça finirait." Patrick Violas est encore bouche bée face aux péripéties qu'il a vécues le 30 août dernier. Un véritable ascenseur émotionnel. Le fondateur de la Tanière, un refuge pour animaux saisis dans des faits de trafic et de détention illégale, a été dépêché à Villeneuve-d'Ascq (Nord) dans la nuit suite à un signalement de l'Office de la biodiversité pour une affaire de maltraitance animale.
En arrivant sur le parking de Cora, au nord de la ville, le défenseur animalier débarque sur un champ de bataille : la police affronte un groupe de circassiens, propriétaires de six fauves retenus captifs dans un camion. Une scène ubuesque, à base de crevaison de pneus, de sabotage de remorque et de barrage avec des monster trucks, des grosses voitures normalement utilisées pour des spectacles d'acrobaties. Les membres du cirque ont tout fait pour ralentir l'intervention des forces de l'ordre, venues délivrer les félins, enfermés depuis quinze jours.
🚨 Saisie de tigresses et lionnes à Lille : un sauvetage exemplaire ! 🚨
— Association Stéphane Lamart (@StephaneLAMART) September 2, 2024
🔵Suite à une #enquête menée par Mme Carole Etienne (@ProcureurLille) , procureure de la République à #Lille, six fauves (trois tigresses et trois lionnes) ont été saisis après avoir été découverts vivant… pic.twitter.com/SaAhpgaq3N
Une opération de saisie particulièrement tendue, qui a commencé plusieurs heures auparavant, sur une aire d'autoroute. "Le camion s’est enfui une première fois à l'approche de la police", relate Stéphane Lamart, président fondateur de l'association éponyme, également impliquée dans cette affaire. "Le propriétaire du cirque s'est retrouvé en garde à vue et le chauffeur s’est enfui avec les animaux." Une course-poursuite presque grotesque, jusque devant l'hypermarché où s'est déroulé le reste de l'intervention.
Plusieurs signalements de riverains
Selon Samuel Toury, directeur de Cora Villeneuve-d'Ascq, le cirque s'est installé sur son parking dans l'après-midi du 19 août, causant déjà plusieurs conflits avec la grande surface. "J’avais refusé leur demande pour des raisons de sécurité, j'ai engagé la procédure pour une expulsion avec constat d'huissier et plusieurs plaintes." L'opération de police menée vendredi dernier a finalement accéléré le départ des circassiens, qui ont quitté les lieux dimanche en fin de journée.
J’avais refusé leur demande pour des raisons de sécurité, j'ai engagé la procédure pour une expulsion avec constat d'huissier et plusieurs plaintes.
Samuel Toury, directeur de Cora Villeneuve-d'Ascq
Pendant plus de deux semaines, les fauves étaient donc retenus prisonniers sous le nez des employés de l'hypermarché. Mais le directeur assure n'avoir entendu ni rugissement, ni rumeur concernant la présence de ces grands animaux : "ils avaient investi un périmètre pour faire le show, c'était un enclos fermé. On n'a rien remarqué."
Côté riverains, la présence de ce camion bleu et jaune a pourtant poussé certains habitants à investiguer. Plusieurs signalements ont été portés aux oreilles de l'association Stéphane Lamart, puis jusque dans les sphères du Parquet de Lille. La procureure de la République Carole Etienne s'est rapidement emparée du dossier. Une détermination que saluent les défenseurs des droits des animaux : "La saisie s'est faite en une journée, un record en protection animale. Quand on veut les saisir dans les cirques, c'est la croix et la bannière. Elle a fait appliquer la loi et on lui tire notre chapeau", commente Stéphane Lamart.
La saisie s'est faite en une journée, un record en protection animale.
Stéphane Lamart, président fondateur de l'association Stéphane Lamart
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Des animaux en bonne santé
Une fois l'opération achevée, les félins ont été placés dans une remorque et embarqués par les membres de la Tanière, placés sous escorte de la gendarmerie. Arrivé à Chartres vers midi le lendemain, c'est épuisé mais rassuré de voir les six fauves en bonne santé, que Patrick Violas entre dans le refuge.
Heureusement les animaux sont en bonne santé, on les a mis en quarantaine et ils mangent normalement.
Patrick Violas, fondateur du refuge La Tanière
"Heureusement les animaux sont en bonne santé, on les a mis en quarantaine et ils mangent normalement", rassure-t-il. "Il y avait surtout un problème d'installation et de mauvaises conditions de détention... On ne peut pas faire vivre des fauves dans un camion !" Malgré leurs manquements, les membres du cirque, inquiets pour leurs bêtes, ont pris des nouvelles des tigresses et des trois lionnes. Le propriétaire du cirque est également venu les voir.
En attendant le procès, les animaux ont été placés dans la Tanière à titre temporaire. "Ces animaux n'ont pas été saisis définitivement, mais j'espère que la justice leur permettra de retrouver leur liberté." D'autant qu'en 2028, les cirques devront se séparer de tous leurs animaux sauvages. "Alors autant anticiper", sourit Stéphane Lamart en indiquant que l'enquête se poursuit et qu'aucune date d'audience n'a pour l'instant été révélée. Contacté, le parquet de Lille n'a pour l'heure par répondu à nos sollicitations.
Même si une nouvelle vie commence pour ces six félins, la Tanière a dû lancer un appel aux dons pour récolter 400 000 euros, destinés à financer l'accueil de ces nouveaux animaux.